Législatives : la droite en mode survie
Législatives : la droite en mode survie
«La marque est morte », lâche un pilier des Républicains rebaptisés « indépendants » en prononçant l'éloge funèbre de la famille gaulliste, coupée en deux par la trahison d'Éric Ciotti, qui a pactisé avec le diable RN. À droite, on ne se raconte plus d'histoires : exit les doux rêves de cohabitation ou de retour précipité au pouvoir à la faveur de l'adoption d'une motion de censure. Les quelque 400 candidats investis par le parti sont passés en mode survie. « On est dans la merde ! On va finir à 20 », soit un tiers de moins, spécule une figure LR. S'ils ne l'avoueront pas publiquement, les ténors ont fait une croix sur ces législatives, où ils n'espèrent plus que sauver les meubles pour préparer sans attendre la suite. Et encore, si les électeurs parviennent à y voir clair, entre les LR-RN de Ciotti qui dissimulent le logo du parti de Marine Le Pen et les LR « indépendants » qui masquent le leur? « Les rares qu'on va sauver seront des survivors [« survivants », NDLR]. Pour ceux qui sortiront des flammes, ce sera l'année zéro. Ces périodes ont un avantage, elles font le ménage, car il y a quand même beaucoup de zombies là -dedans », griffe un candidat LR à sa réélection, pas loin de penser qu'il fallait un électrochoc pour réveiller une droite en perdition.
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Un homme a compris qu'il lui fallait accélérer son calendrier pour avoir une chance d'incarner la relève demain : Laurent Wauquiez, critiqué jusqu'alors parce que trop silencieux, qui mènera son camp à la bataille depuis son fief de Haute-Loire. « C'est le meilleur général possible. Après, il faut qu'il gagne. Grâce à cette dissolution, il va revenir dans le jeu. Si la présidentielle est l'ambition de sa vie, c'est le moment d'aller au mastic ! » défie l'un de ses amis. Il n'est pas anodin que Wauquiez se soit rapproché, ces jours-ci, du député sortant du Lot Aurélien Pradié, forte tête qui songe également à la suite. Car les présidentiables à droite ont tous compris que la France était entrée en terra incognita. Qui peut affirmer avec certitude qu'Emmanuel Macron achèvera son mandat en cas de blocage le 7 juillet ? Il faut, dès lors, se tenir prêt. « Le seul sujet, c'est de préparer le lendemain. Notre ambition doit être de préserver, pour les Français, un espoir à l'Assemblée nationale, une offre de la droite indépendante qui pourra être un recours et ne pas laisser le pays tiraillé entre les extrêmes et une macronie en décomposition », décrypte un conseiller du parti.
L'Élysée dans le viseur
À charge pour Emmanuelle Mignon, numéro deux de LR et avocate à la ville, de mener dans l'ombre la riposte juridique face au félon Ciotti. C'est elle qui a pris la direction des opérations ce vendredi soir maudit où la justice, saisie en urgence, a rétabli le Niçois dans ses prérogatives de président en attendant un jugement sur le fond, enlisant la droite dans la crise. « C'est une tueuse, une lionne ! » applaudit un cadre. Le but : récupérer la marque LR, le siège et les dotations publiques afférentes pour notamment financer demain un candidat à l'Élysée. « Ce n'est plus qu'un problème de pognon, parce qu'on n'a pas un fifrelin en caisse. Il faut virer l'autre, récupérer le fric et bâtir autre chose », avoue un stratège. À moins que? Reste l'espoir, infime, de peser sur le prochain gouvernement en cas de blocage, si les députés LR survivants s'alliaient aux indépendants du petit groupe Liot (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) pour faire le pivot. « Il faut se battre ! presse Xavier Bertrand. C'est une question d'honneur. »