Désavoué de tous, Macron marche seul
Emmanuel Macron, à Paris, le 29 septembre 2021.
La perspective angoissante de voir l’extrême droite s’installer à Matignon a presque fait passer à la trappe un fait politique majeur de cette très courte campagne législative : la disparition d’Emmanuel Macron. Le chef de l’Etat est aujourd’hui une persona non grata, ou quasi, au sein même de sa majorité. Les candidats Renaissance l’ont effacé de leurs tracts. Moult leaders de la majorité ont clairement exprimé leur désaccord avec sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale. Certains ont laissé entendre qu’il déchirerait bien leur carte de fidélité au chef de l’Etat. D’autres que le futur de la majorité – future minorité ? – s’écrira plutôt sans lui que sous sa dictée. Et quand Emmanuel Macron a tenté d’exister (avec sa lettre aux Français ou sa participation à un podcast), il a fait pschitt.
Aucun président n’a complètement échappé à cette solitude inhérente à l’exercice du pouvoir. L’Elysée a souvent été décrit du temps de ses prédécesseurs comme une tour d’ivoire qui isole. Mais depuis sept ans, cette «tradition» élyséenne a été décuplée par le chef de l’Etat lui-même. Car au fond, Emmanuel Macron n’est-il pas seul depuis le début, c’est-à-dire depuis sa prise de l’Elysée en 2017 ? Son casse du siècle, salué à l’époque comme un coup de maître, était un pari solitaire. Et si l’on revisite ses sept ans de mandat, de la crise des gilets jaunes à sa décision de dissoudre, la solitude macronienne est omniprésente. C’est cette solitude-là dont Emmanuel Macron paie le prix aujourd’hui. Faute d’avoir su la transformer en force collective, son audace personnelle originelle est devenue le boulet qui l’entraîne par le fond. Car si la politique est bien sûr une question d’incarnation, d’ambition personnelle, de charisme qui embarque, c’est aussi une aventure collective, qui suppose de savoir s’entourer, de bâtir un parti qui ne soit pas qu’une coquille vide, de considérer les élus, les corps intermédiaires… Emmanuel Macron n’a jamais cru bon de faire tout ça. Résultat, il est aujourd’hui au milieu d’une tempête qu’il a lui-même provoqué, et quand il se retourne, il se retrouve… très seul.