Législatives 2024 : le RN aux portes du pouvoir, risques économiques et financiers en vue ?
De gauche à droite, Jordan Bardella, président du Rassemblement National (RN), Gabriel Attal, Premier ministre, et Manuel Bompard, député de La France insoumise (LFI), lors d'un débat politique diffusé sur la chaîne française TF1 le 25 juin 2024, en prévision des élections législatives anticipées en France des 30 juin et 7 juillet 2024.
Suivez en direct le premier tour des élections législatives 2024 avec nous. Les résultats provisoires seront annoncés ce dimanche 30 juin à 20 heures, suivi du second tour le 7 juillet. Ces élections marquent un tournant pour la France, avec la possibilité d'une quatrième cohabitation sous Emmanuel Macron depuis 2002. Le RN pourrait obtenir une majorité à l'Assemblée nationale, potentiellement renversant le gouvernement actuel de Gabriel Attal. Jordan Bardella envisage déjà le poste de Premier ministre, ce qui suscite des inquiétudes parmi les patrons.
La fin d’une campagne intense. Le premier tour des élections législatives anticipées a lieu ce dimanche 30 juin, suivi du second tour le dimanche 7 juillet. Trois semaines après la dissolution historique de l'Assemblée nationale, marquée par la percée historique du Rassemblement National (RN) de Jordan Bardella aux élections européennes avec 31,37% des voix, les Français sont appelés aux urnes pour élire leurs nouveaux députés. Ce scrutin crucial pourrait redéfinir le paysage politique du pays.
Le système électoral repose sur un scrutin majoritaire à deux tours : un candidat aux élections législatives peut être élu dès le premier tour s'il obtient plus de 50% des suffrages exprimés et au moins 35% des voix parmi tous les électeurs inscrits dans une circonscription. Au second tour, les candidats doivent recueillir au moins 12,50% du nombre total d'électeurs inscrits pour l’emporter. Ce mécanisme électoral peut ainsi donner lieu à une triangulaire, où trois candidats s'affrontent lors du second tour des élections législatives.
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La montée en flèche de la participation aux élections législatives
Cette année, les élections législatives 2024 pourraient voir une explosion de triangulaires grâce à une participation record. L’institut de sondages français Ipsos parle même d’une «explosion de triangulaires» et prévoit environ 350 triangulaires, avec une majorité impliquant le Rassemblement national, le Nouveau Front populaire et Ensemble pour la République. Le taux de participation pourrait atteindre 63 à 65%, bien plus que les 47,5% de 2022. De plus, le nombre réduit de candidats pourrait également favoriser ce phénomène. Ipsos estime que 80 à 90 députés pourraient être élus dès le premier tour, dont 55 à 65 soutenus par le RN.
Les Français montrent en effet un engouement exceptionnel pour ces élections législatives anticipées. Selon Ipsos, 81% des citoyens sont intéressés par ce scrutin. Déjà, 410 000 Français résidant à l’étranger ont voté en ligne, contre seulement 250 000 en 2022. De plus, le ministère de l'Intérieur a annoncé le 28 juin que plus de deux millions de procurations avaient été enregistrées, soit près de six fois plus que lors des précédentes législatives.
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La percée inédite du Rassemblement national depuis les européennes
Cette participation massive s'explique par le caractère inédit de ces élections. D'une part, la campagne électorale, la plus courte de l’histoire de la Ve République, a bouleversé le paysage politique. D'autre part, le Rassemblement national recueille un nombre record d'intentions de vote, surtout après sa victoire aux élections européennes en France. D'après un sondage Ipsos réalisé du 21 au 24 juin auprès de plus de 10 000 électeurs, le Rassemblement National totalise 32% des intentions de vote. A ce score, s'ajoutent 4% de soutien des Républicains, après l'alliance conclue entre Eric Ciotti, président du LR malgré les divisions internes, et Jordan Bardella, président du RN.
Les candidats du Nouveau Front populaire recueillent 29% des intentions de vote, selon Ipsos. Ce niveau est proche de celui atteint par la gauche aux législatives de 2022, lorsque la Nupes avait totalisé 32,64%. Né durant cette campagne, le Nouveau Front populaire (LFI, PCF, PS, EELV) présente un programme commun visant à contrer la montée du Rassemblement National et de ses alliés. Marine Tondelier, leader des écologistes, et Raphaël Glucksmann, eurodéputé Place Publique, ont appelé au désistement des candidats de gauche en cas de triangulaire pour maximiser leurs chances de succès. «Je n'hésiterais pour qu'il y ait un retrait si jamais les candidats du nouveau Front populaire sont 3e et ne sont pas en mesure de battre le Rassemblement national», a affirmé Raphaël Glucksmann sur France 5 jeudi 27 juin.
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Les candidats soutenus par la majorité présidentielle Ensemble pour la République (Renaissance, MoDem, Horizons) obtiennent 19,5% des intentions de vote, selon Ipsos. C'est mieux que les 14,60% obtenus aux européennes par Valérie Hayer, mais bien en dessous des 38,63% des législatives de 2022. En comparaison, les candidats Les Républicains n'atteignent que 8% des voix, restant loin derrière.
Le spectre de la cohabitation après les élections législatives
Alors que les intentions de vote favorisent largement le Rassemblement national, et que le parti est aux portes du pouvoir, 35% des Français votent principalement pour faire barrage, d'après Ipsos. Parmi eux, 52% souhaitent contrer le RN et ses alliés, tandis que 36% se mobilisent contre le Nouveau Front populaire. La majorité (65%) de ces électeurs proviennent du parti d'extrême droite.
Ces élections législatives 2024 s'annoncent comme un tournant historique pour la politique française, avec la possibilité d'une quatrième cohabitation depuis 2002 pour Emmanuel Macron. Les résultats incertains du second tour pourraient bouleverser l'équilibre politique, le RN étant en position de devenir le parti majoritaire à l'Assemblée nationale. Cette situation ouvre la voie à un possible renversement du gouvernement de Gabriel Attal, avec Jordan Bardella, du RN, envisageant déjà le poste de Premier ministre.
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L'inquiétude grandit dans le monde économique
Une étude de la CPME révèle que près de 60% des chefs d'entreprise retarderaient leurs investissements ou recrutements en cas de victoire du Nouveau Front populaire aux législatives, et 36% si c'est le Rassemblement national qui l'emporte. Cette enquête en ligne menée du 20 au 24 juin auprès de 1 066 dirigeants indique que seulement 12% continueraient comme prévu en cas de victoire de la majorité présidentielle. Selon un sondage d'OpinionWay pour CCI France, 23% des entrepreneurs prévoient un impact négatif sur leur activité, à la suite des élections européennes et législatives anticipées, tandis que 7% s'attendent à des effets positifs et 53% à aucun impact notable.
Malgré cela, 68% des dirigeants se montrent confiants pour les prochains mois, bien que cette confiance ait baissé de 5 points depuis mai 2024. Le président de CCI France, Alain Di Crescenzo, appelle «à ne pas détruire la dynamique fragile engagée ces derniers mois par (les) entreprises». Les mesures économiques proposées par le Nouveau Front populaire, comme la hausse du Smic à 1 600 euros, suscitent une forte opposition : 14% envisagent de cesser leur activité, 27% de licencier et 50% d'augmenter leurs prix de vente pour compenser.
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Les chefs d'entreprise sont majoritairement contre une réduction du temps de travail à 32 heures (83%) et un abaissement de l'âge de départ à la retraite (82%), craignant également qu'une augmentation des dépenses publiques ne conduise à une faillite nationale et à une intervention du FMI (78%). En revanche, une majorité de patrons seraient favorables à l'indexation des pensions (70%) et des salaires (50%).
Et à l'international ? Le ministre allemand des Finances, Christian Lindner, a averti que l'élection d'un gouvernement trop dépensier en France pourrait mener à une «tragédie» sur le plan budgétaire, similaire à celle du Royaume-Uni sous Liz Truss. Les marchés financiers pourraient perdre confiance, nécessitant potentiellement une intervention de la Banque centrale européenne (BCE).