38 % des Français pourraient voter NFP… sans Mélenchon

38 % des Français pourraient voter NFP… sans Mélenchon

Un Nouveau Front populaire (NFP) constitué en quatre jours pour faire face à la menace d’un raz-de-marée du Rassemblement national (RN) : voilà la principale innovation politique des élections législatives anticipées. Celle que le président de la République Emmanuel Macron n’a pas vue venir avant de dissoudre l’Assemblée nationale… Certes, l’attelage des socialistes, des écologistes, des communistes et de La France insoumise (LFI) comporte des faiblesses évidentes : des divergences massives persistent, le programme de redistribution comportant des dépenses sociales et des hausses d’impôt est discuté par les milieux économiques et la bataille pour le leadership menace, à chaque instant, de tout emporter…

Sondage exclusif Odoxa-« le Nouvel Obs » : RN (33 %) à portée de la majorité absolue, Nouveau Front populaire en dynamique (28 %) et Ensemble en grand péril (19 %)…

Mais cette embarcation fait mieux que surnager dans la tempête politique déclenchée par la dissolution. Selon notre sondage Odoxa-« le Nouvel Obs », paru le 21 juin, le NFP recueillerait 28 % des suffrages au premier tour des législatives de 2024 (contre 25,6 % aux législatives de 2022). De quoi garnir 160 à 210 sièges de la future Assemblée nationale (contre 150 dans l’Assemblée sortante). Et empêcher – peut-être – le RN d’obtenir une majorité absolue, ce qui demeure l’objectif principal de la manœuvre.

Néanmoins le NFP peut-il encore progresser dans les derniers jours de la campagne ? Dispose-t-il d’une réserve de suffrages ? Et comment pourrait-il améliorer son image ? Pour répondre à ces questions, l’institut Odoxa a réalisé pour « le Nouvel Obs » une étude spécifique – « les Français et le Nouveau Front populaire » –, dont voici les principaux enseignements.

• Le peuple de gauche représente 32 % de l’électorat

Selon notre sondage, les Français qui ont voté à gauche au premier tour des dernières élections présidentielle, législatives et européennes représentent 32 % de la population. Il s’agit d’un électorat jeune : 39 % des 25-34 ans et 44 % des 18-24 ans ont voté au moins une fois à gauche ces deux dernières années. Il est également dominé par les CSP + (36 %) et, plus particulièrement, les cadres (40 %), les salariés du public (39 %) et les habitants des métropoles (36 %).

(MEHDI BENYEZZAR POUR « LE NOUVEL OBS »)

A première vue, cet électorat peut paraître étriqué. Mais il est susceptible de s’élargir. L’étude Odoxa - « le Nouvel Obs » indique que le NFP dispose d’une marge de progression en vue du premier tour des législatives anticipées : 20 % des Français interrogés indiquent qu’ils voteront « certainement » pour lui,et 18 %, « probablement ». « Ce qui constitue un “potentiel de vote” de 38 %, soit 10 points au-dessus de son niveau actuel des intentions de vote, souligne Gaël Sliman, président de l’institut Odoxa. Mais pour progresser, le NFP doit impérativement continuer à dédiaboliser son image. »

• L’image du NFP s’améliore… mais demeure trop radicale

Si 77 % des électeurs de gauche ont une bonne opinion du NFP, 63 % de l’ensemble des Français en ont une mauvaise. Et tandis que les premiers font largement confiance au NFP pour « défendre les classes populaires », « améliorer les conditions de vie » et « défendre des idées proches des leurs », les Français, dans leur ensemble, estiment majoritairement qu’il « peut amener du désordre » et que « son programme est dangereux pour l’économie ». 52 % des personnes interrogées le considèrent « d’extrême gauche ».Un qualificatif rejeté par 65 % de l’électorat progressiste. « L’image de l’alliance auprès de nos concitoyens semble encore plombée par la stratégie passée de la Nupes et surtout de LFI de perturber la vie politique », analyse Gaël Sliman.

Il n’en demeure pas moins que la perception du NFP s’est améliorée par rapport à celle de la défunte Nupes. Le NFP est moins considéré comme étant « d’extrême gauche » (-3 points) et jugé plus susceptible d’améliorer les conditions de vie des Français (+5 points).

• Une majorité de Français préféreraient une gauche sociale-démocrate

Dans l’hypothèse où leur circonscription était remportée par un député du NFP, 50 % des Français interrogés préféreraient qu’il soit issu du PS, 24 % qu’il vienne des écologistes et seulement 14 % qu’il soit estampillé LFI. Cette préférence est partagée par les électeurs de gauche. Si la plupart d’entre eux ont davantage voté insoumis que PS en 2022, ils aimeraient mieux aujourd’hui un représentant PS (44 %) plutôt que LFI (24 %).

S’agissant des leaders du NFP, les Français comme le « peuple de gauche » désignent Raphaël Glucksmann comme la figure la plus positive : 51 % des Français et 70 % des électeurs de gauche le perçoivent comme un atout. Il devance Fabien Roussel (vu comme un atout par 44 % des Français et 68 % des électeurs de gauche), François Ruffin (41 % et 69 %) et Laurent Berger (41 % et 65 %) . Au-delà des quatre premiers cités, Olivier Faure, Yannick Jadot, Clémentine Autain, Marine Tondelier et François Hollande sont tous considérés comme des atouts par une majorité de l’électorat progressiste. « Les dix principales figures de gauche sont appréciées, à l’exception d’une seule : Jean-Luc Mélenchon », observe Gaël Sliman.

« Il y a vraiment un truc qui est en train de se jouer… » : comment La France insoumise a séduit les quartiers

Une grande majorité des sondés, 81 % des Français et 66 % des électeurs de gauche (dont beaucoup avaient voté pour lui au premier tour de la présidentielle de 2022), considèrent le leader de La France insoumise comme un « handicap » pour le Nouveau Front populaire. Ce rejet culmine à 80 % auprès des sympathisants écologistes et à 90 % auprès des sympathisants socialistes. Même les sympathisants LFI sont 27 % à considérer leur « chef » comme un handicap pour le NFP. Celui qui fut la locomotive de la gauche en 2022 est bien devenu le « boulet » de la nouvelle alliance de gauche. CQFD.

Enquête réalisée sur internet les 19 et 20 juin 2024 auprès d’un échantillon représentatif de 2 006 Français âgés de 18 ans et plus dont 1 861 inscrits sur les listes électorales parmi lesquels ont été identifiées 616 personnes ayant voté au moins une fois à gauche à l’un des trois derniers scrutins nationaux. Les marges d’erreur des intentions de vote s’établissent selon le score visé, entre plus ou moins 1,2 et 2,5 points.