Allergie alimentaire : « On a constaté une augmentation de 300 % des cas en 20 ans »
Ils sont 8 % des enfants de moins de 15 ans à souffrir d'au moins une allergie alimentaire. Au fil des années, la situation s'aggrave. Aujourd'hui, plus de 3 millions de Français sont concernés. Du 24 au 29 juin se tient la Semaine mondiale de l'allergie organisée par le Syndicat français des allergologues (Syfal) et la Fédération française d'allergologie (FFAL).
Cette année, les médecins ont choisi de mettre l'accent sur les allergies alimentaires et leurs répercussions dans la vie des patients. Séverine Fernandez, médecin allergologue à La Ciotat et présidente du Syfal revient sur ce qui est devenu un enjeu de santé publique.
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Le Point : Quelle est la différence entre l'allergie et l'intolérance alimentaire ?
Dr Séverine Fernandez : L'intolérance alimentaire se manifeste par des troubles digestifs, des douleurs et une fatigue qui peuvent survenir après les repas. Ce qui est important, c'est que le pronostic vital n'est pas en jeu. Généralement, il suffit d'adapter le régime alimentaire pour diminuer l'inconfort. Concernant l'allergie alimentaire, il s'agit d'une hypersensibilité allergique immédiate ou retardée. L'allergie alimentaire peut, elle, entraîner une perte de connaissance, un choc anaphylactique jusqu'à causer la mort. Il faut garder en tête que l'on peut mourir d'une allergie alimentaire, c'est très sérieux.
Comment expliquer cette augmentation ?
Les données du Réseau d'allergo-vigilance (Rav) rapportent que de 6 % à 8 % des enfants de moins de 15 ans souffrent d'une allergie alimentaire. En vingt ans, les chiffres ont augmenté de 300 %. Au total, 3 millions de personnes sont atteintes d'une allergie alimentaire en France. Il faut lever le tabou autour des allergies alimentaires, les patients sont en souffrance totale. Une allergie alimentaire est une réponse immunitaire. Dans le cas des allergies immédiates, elle est induite par les IgE au contact d'une protéine présente dans un aliment. Aujourd'hui, ces allergies ont une origine multifactorielle : des facteurs environnementaux, un stress de l'organisme, etc.
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Comment mieux accompagner les allergies alimentaires ?
Il y a quelques années, les médecins alertaient sur les pollens en insistant sur les cas d'allergies respiratoires. Aujourd'hui, les cas explosent. Avec les allergies alimentaires, la situation pourrait se répéter. Les répercussions sur la vie sociale sont nombreuses, les patients s'isolent. Il est recommandé de réaliser une diversité alimentaire précoce ? entre 4 et 6 mois ? avec les bébés. Il ne faut pas avoir peur d'intégrer même l'arachide ou certains fruits à coque lors de la diversification même pour les patients atopiques.
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Qu'est-il possible de mettre en place pour améliorer la vie des patients ?
L'allergie alimentaire doit être prise au sérieux. Il faut davantage informer toutes les personnes qui travaillent dans l'alimentaire, et, notamment, ceux qui travaillent avec les enfants. Il faut appliquer et faire appliquer la réglementation Inco [Information du consommateur], une réglementation européenne. La liste des allergènes à déclaration obligatoire doit être révisée en y intégrant les allergènes émergents et à la mettre à jour régulièrement selon les données scientifiques. Les industriels doivent indiquer ce qu'il y a dans les produits, cela faciliterait grandement la vie des patients et des parents des enfants concernés. Dans les restaurants ou en cantines scolaires, il faut améliorer l'intégration des patients allergiques, l'application de la réglementation Inco est un point important qui favorise cette intégration il faut la respecter.