Antisémitisme : le Nouveau Front populaire dénonce une «odieuse campagne de diffamation menée par une macronie en déroute»
Mathilde Panot, Manuel Bompard, Marine Tondelier, Olivier Faure, Yannick Jadot et Fabien Roussel, lors de la présentation du Nouveau Front populaire, à Paris, le 14 juin.
Sortir de la nasse. Ce dimanche après-midi, alors que commençait dans le XVIe arrondissement de Paris un rassemblement en soutien aux Juifs de France, les chefs des quatre principaux partis qui composent le Nouveau Front populaire ont diffusé un communiqué appelant à «combat[tre] l’antisémitisme et toutes formes de racisme» et dénonçant des «campagnes de diffamation». «Le drame du viol antisémite de Courbevoie nous bouleverse, affirment d’emblée Marine Tondelier (Les Ecologistes), Fabien Roussel (Parti communiste français), Manuel Bompard (La France insoumise) et Olivier Faure (Parti socialiste). Cet acte à l’encontre d’une enfant de 12 ans traitée par ses agresseurs de “sale juive” est une abomination. Nous affirmons tout notre soutien à la victime et à ses proches.» Pour couper court à l’idée, propagée par l’extrême droite et certains responsables de la majorité, que cette nouvelle union à gauche n’est pas claire sur le sujet, les quatre martèlent : «Ce crime témoigne de la résurgence inquiétante des actes antisémites dans notre société, et de la culture du viol qui gangrène les comportements masculins dès le plus jeune âge. Cela doit nous interpeller et nous mobiliser.»
«Combattre sans faiblesse et sans répit l’antisémitisme»
Rattrapés depuis plus d’une semaine par certaines formules ambiguës ou très maladroites de la part de certains insoumis – notamment de Jean-Luc Mélenchon – sur l’antisémitisme, les dirigeants du Nouveau Front populaire assurent «condamn[er] avec la plus grande fermeté ceux qui utilisent nos compatriotes juifs comme boucs émissaires de tous les maux de la planète». «Nous nous tenons aux côtés de nos compatriotes juifs qui ont peur face à ces menaces, comme aux côtés de tous nos concitoyens menacés en raison de leur confession religieuse, poursuivent-ils. Ils et elles doivent savoir qu’ils peuvent compter sur nous et que nous serons à chaque instant à leurs côtés pour combattre sans faiblesse et sans répit l’antisémitisme, l’islamophobie et toutes les formes de racisme.»
Par ailleurs, ils qualifient d’«odieuse campagne de diffamation menée par une macronie en déroute» les attaques de ces derniers jours, menées notamment par le Premier ministre Gabriel Attal qui, selon les chefs des formations de gauche, «préfèr[e] salir son opposition plutôt que d’assumer une confrontation de nos projets politiques respectifs». «Nous, la gauche, à l’origine de la loi Gayssot pénalisant le racisme et l’antisémitisme, nous restons dans la fidélité à notre tradition depuis l’Affaire Dreyfus», déclarent-ils.
«Stratégie électorale cynique de la droite et de l’extrême droite»
Selon eux, «la stratégie électorale cynique de la droite et de l’extrême droite dessert la lutte indispensable contre l’antisémitisme» et «poursuit par là même la banalisation de l’extrême droite à l’œuvre depuis plusieurs années». Tondelier, Roussel, Faure et Bompard rappellent au passage que l’extrême droite «s’est construite en France sur la haine du juif et de l’étranger dans la nostalgie de la collaboration» ou qu’«il y a encore quelques mois, le président du Rassemblement national Jordan Bardella défendait Jean-Marie Le Pen alors que celui-ci a été condamné à de nombreuses reprises pour apologie de crimes de guerre, provocations à la haine et antisémitisme». S’appuyant sur plusieurs enquêtes de presse, notamment celles de Libération, ils pointent le fait que «ces derniers jours encore, ce sont plusieurs candidats du Rassemblement national qui se sont rendus coupables de tweets racistes ou antisémites».
Enfin, ils réitèrent les propositions en la matière inscrites dans le programme du Nouveau Front populaire : plus de «moyens» pour la justice afin «de poursuivre et de sanctionner les auteurs de propos ou actes racistes, islamophobes et antisémites», l’instauration d’un “Commissariat à l’égalité” doté d’un Observatoire des discriminations», la mise en œuvre d’un «plan de lutte contre les discriminations, notamment à l’embauche, à la santé et au logement, et le renforcement des sanctions» ainsi que de «plans interministériels pour analyser, prévenir et lutter contre l’antisémitisme en France, notamment à l’école, et contre l’islamophobie» ou encore le renforcement de «la sécurité autour des lieux cultuels et culturels (juifs, musulmans, chrétiens, etc.)» La veille, sur le plateau de l’émission C l’hebdo sur France 5, Jean-Luc Mélenchon, déjà, avait tenté de clore le chapitre des attaques de la majorité sortante et de l’extrême droite sur l’antisémitisme : «Ce n’est pas une interview, c’est un procès, avait-il fustigé à l’encontre des journalistes face à lui. Je n’ai rien à voir avec le racisme, je n’ai rien à voir avec l’antisémitisme, ça suffit maintenant, tout cela est un prétexte pour dire que La France insoumise est une organisation antisémite, de manière à favoriser le vote Rassemblement national.»
Rebondissements
Enfin une position unanime ? On le pensait jusqu’à ce que… en fin de journée dimanche, l’ex-tête de liste du Parti socialiste et de Place publique, Raphaël Glucksmann, annonce sur X (ex-Twitter) avoir signé «avec le Parti communiste, les Verts et le Parti socialiste» une «charte contre l’antisémitisme avec des engagements précis». Dans ce second communiqué – diffusé d’abord avec tous les logos des partis puis seulement celui de sa formation – les signataires insistent sur «l’explosion des actes antisémites» qui «ont été démultipliés au premier semestre 2024», «une recrudescence inédite des actes antisémites depuis la Shoah» et la «condamn[ation] avec force [de] toute expression visant à minimiser ou relativiser cette explosion de l’antisémitisme dans notre pays». Fabien Roussel a fait de même avec le seul logo du PCF. Le PS et les écolos se font plus discrets avec ce deuxième communiqué... Et pourquoi La France insoumise n’est-elle pas signataire de ce deuxième texte ? «Dans ce communiqué, il est indiqué que les candidats investis par chaque formation signaient une charte, explique à Libération le coordinateur national de LFI, Manuel Bompard. Or les insoumis avaient déjà signé une charte il y a dix jours, qui comprend des engagements contre le racisme et l’antisémitisme, ce qui n’était pas le cas des autres.» Une version confirmée côté écolos. Deux chartes et deux communiqués. Voilà qui prête à de nouvelles confusions malgré les clarifications…
Mise à jour à 19h40 : ajout du deuxième communiqué signé par Place publique.