Législatives : après le débat entre Attal, Bardella et Bompard, deux gagnants et un grand perdant
Législatives : après le débat entre Attal, Bardella et Bompard, deux gagnants et un grand perdant
D’abord, on était sceptique : à quoi bon ce débat ? Un de plus ? Dans une campagne dominée par le bruit et la fureur, avec des électeurs se déclarant pour beaucoup déjà certains de leurs choix, une telle confrontation pouvait-elle avoir la moindre utilité ? On avait tout faux. Ce débat aura été captivant. Et qui sait : il aura peut-être fait bouger quelques lignes.
La grande surprise aura été la prestation de Manuel Bompard. Au sein du Nouveau Front populaire, en apprenant sa nomination, beaucoup avaient levé les yeux au ciel : Ah non pas lui ! Le député de Marseille étant considéré par certains comme « trop sectaire », par beaucoup, comme « trop proche de Jean-Luc Mélenchon », et par presque tout le monde, comme n’étant pas « une bête de télé ». Surprise, les spectateurs auront découvert un leader politique souriant, calme, parlant simple, tout en maîtrise. Surtout, ils auront vu et entendu un responsable de gauche qui assume ses positions.
Surprise, Bompard s’est très bien tiré du débat sur TF1
Oui, il faut augmenter les impôts des 8 % des Français les plus riches. Oui, il faut bloquer les prix de 150 produits de première nécessité. Non, il ne faut pas rejeter les immigrés - ceux-ci rapportant infiniment plus à la France qu’ils n’en coûtent. Et non, il est inconcevable de vouloir traiter des mineurs – même délinquants – comme des adultes. Bref, un discours à gauche, devenu il est vrai inhabituel lors de ces débats à forts enjeux. Les dernières grandes confrontations télévisuelles, que ce soit pendant les présidentielles de 2017, ou 2022, ou bien encore lors des dernières européennes, s’étant systématiquement limité à un duel Macron (ou Attal) face à Le Pen (ou Bardella).
Des retraites aux binationaux
S’il a réussi sa prestation, Manuel Bompard le doit pour partie à Gabriel Attal. A l’évidence dans ce débat à trois, le Premier ministre avait choisi son ennemi : Jordan Bardella. Infiniment plus percutant que lors de leur dernier duel, le Premier ministre a réussi cette fois-ci à bousculer le leader du RN. Le président du Rassemblement national a eu beau se présenter sans cesse comme le « futur Premier ministre de la France », mardi soir, il était très loin d’en avoir l’étoffe. A deux reprises, le jeune homme de 28 ans s’est même retrouvé dans les cordes. Interrogé sur les retraites, il a dû admettre qu’avec sa réforme, une personne qui aurait débuté dans la vie active à 24 ans, devrait travailler jusqu’à… 66 ans ! Très loin donc des 60 ans promis. Aussitôt après avoir lâché ce chiffre, Jordan Bardella est d’ailleurs resté silencieux quelques instants, comprenant lui-même qu’il venait de commettre… une énorme boulette.
De même, il a été bien incapable de justifier son interdiction de postes « stratégiques » pour les binationaux. Surtout quand Gabriel Attal a sorti un nom de son chapeau : Tamara Volokhova, une conseillère du RN qui siège dans les instances européennes, et qui se trouve, précisément, être Franco-Russe. « Il y a 3,5 millions de Français qui sont stigmatisés par votre proposition » sur les binationaux, a asséné Gabriel Attal à un Jordan Bardella blème. Même s’il s’est trouvé parfois en peine de justifier sa politique, le Premier ministre, s’est montré au final incisif et percutant, comme s’il s’était soudain libéré de l’empreinte d’Emmanuel Macron.
Binationaux : les lourdes ambiguïtés du RN
À l’issue d’une heure trente, il est donc sorti de cette confrontation deux gagnants, Attal et Bompard, et un très grand perdant, Bardella. Le leader du RN si à l’aise d’ordinaire à la télévision à cette fois trébuché. Le grand jeune homme a commencé à fendre le masque. Le leader à poigne est apparu bien fragile, et sans aucune consistance. Mardi soir, c’était donc un peu comme un remake du débat Macron – Le Pen de 2017. Sauf que depuis, tout a changé.