« Des centaines de prélèvements »… Dépouillés par Hubside ou la Sfam, ils ont le sentiment d’avoir pactisé avec le diable
Prélevées malgré elles de plusieurs centaines voire plusieurs milliers d’euros, les victimes des sociétés du milliardaire Sadri Fegaier témoignent du parcours du combattant pour (ne pas) récupérer leur argent
L'enseigne Hubside store est visée par une action collective en justice pour «pratiques commerciales trompeuses » (illustration).
Votre vie, votre avis - Prélevées malgré elles de plusieurs centaines voire plusieurs milliers d’euros, les victimes des sociétés du milliardaire Sadri Fegaier témoignent du parcours du combattant pour (ne pas) récupérer leur argent
Ce mercredi, le tribunal de commerce de Paris doit se prononcer sur la mise en liquidation judiciaire d’Indexia, le groupe de sociétés d’assurances multimédia du milliardaire Sadri Fegaier. Parmi ces sociétés, la Sfam et Hubside sont particulièrement bien connues de nombreux Français, victimes de prélèvements indus pouvant aller jusqu’à des dizaines de milliers d’euros en quelques années. Certains ont tenu à raconter à 20 Minutes cette expérience traumatisante.
Nos lecteurs ont été nombreux à réagir à notre appel, et les témoignages reçus racontent tous la même histoire. La galère a souvent commencé par un passage à la Fnac, chez Darty, dans une boutique HubsideStore ou sur le site internet Hubside. « J’ai constaté des prélèvements étranges sur mon compte après l’achat d’un drone à la Fnac », explique Pascal, 64 ans. Pour Alain, cela remonte à 2019, après l’achat « d’un portable reconditionné dans un HubsideStore à Villeneuve-d’Ascq ». C’était « un casque Bluetooth » pour sa fille acheté « à la Fnac début 2018 », se souvient très bien Ahmet.
Tombés dans le piège, volontairement ou pas
Après l’achat, deux scénarios se sont dessinés. Pour le casque audio à 269 euros de sa fille, Ahmet a cédé au vendeur qui lui proposait « une assurance et que nous pouvions résilier sous quinze jours ». A 15,99 euros par mois, il accepte de s’engager un an avant d’entamer la procédure de résiliation. « Malgré plusieurs courriers en recommandés avec AR, les prélèvements ont continué pendant 6 ou 7 mois avec toujours le même montant », assure Ahmet. Même chose pour Bruno, Denis ou Mélanie, qui ont vu le montant de leur assurance de téléphone continué à être prélevé malgré l’annulation du contrat.
D’autres ont découvert qu’ils avaient souscrit à différents services sans même le savoir. « Je me suis vu prélevé subitement de deux montants de 150 euros par mois. Apres avoir cherché à avoir des clarifications, j’ai été informé qu’il s’agissait d’un abonnement automatique », rage Mio, 26 ans. « Je n’ai jamais signé de contrat et je me suis retrouvé avec parfois quatre prélèvements de 69 euros par mois au lieu de 29,99 euros », s’insurge aussi Patrice.
Prélèvements en série et montants ubuesques
«Ã‚ Je suis victime de plusieurs centaines de prélèvements qui vont jusqu’àplusieurs milliers d’euros », assure Julien, 28 ans. « Ils m’ont prélevé jusqu’àplus de 500 euros en un mois pour un contrat de 25 euros par mois normalement », renchérit Samuel. Olivier, lui, a vu 700 euros s’envoler en trois mois, avec des pics à« parfois quatre prélèvements par mois ». Encore pire pour Amélie, 36 ans, qui a « constaté 26 prélèvements de 29,99 euros et 69,99 euros depuis le mois de décembre, pour un montant total de 1.059,74 euros ». Et que dire du cas de Cindy, débitée de « 49,99 euros jusqu’à12 fois dans le même mois », pour un préjudice qu’elle estime à2.800 euros ? Ou de Zohra, dépouillée « parfois deux fois par jour, quatre àcinq fois par semaine » ?
Le triste record revient à Huguette, 76 ans, après qu’elle a souscrit une assurance pour le portable de son mari à 4,99 euros par mois. « La Sfam m’a prélevé plusieurs fois cette somme. Puis ça a été des sommes de plus en plus grandes », détaille-t-elle. Près de 2.000 euros le dernier mois, 36 prélèvements qui ont mis Huguette sur la paille. Au total, la septuagénaire s’est fait dépouiller de 17.000 euros.
Victime un jour, victime toujours
Les démarches pour annuler les abonnements, souscrits volontairement ou pas, n’aboutissent quasiment jamais. « J’ai été prélevée pendant plus de deux ans alors que j’avais résilié le contrat plusieurs fois », témoigne Anaïs. Entre « courriers perdus et service téléphonique catastrophique », Claire a bataillé « des semaines » pour résilier un contrat. « Et puis presque deux ans après avoir enfin tout résilié, je découvre un prélèvement sur mon compte sorti de nulle part », s’étonne-t-elle encore. Denis a perdu 3.000 euros entre septembre et décembre 2022 pour une assurance qu’il pensait résiliée depuis deux ans. C’est cinq ans après avoir mis fin à son assurance mobile que Lucia a subi le retour de la Sfam, avec « deux prélèvements de 19,99 euros et 69,99 euros ».
Ces pratiques scandaleuses touchent le fond avec les cas d’Amélie et d’Odile. La première, qui dit avoir été prélevée abusivement une trentaine de fois, a contacté par téléphone le service client pour se plaindre de sa situation. A peine le combiné raccroché, elle a reçu deux mails l’informant qu’elle venait de souscrire à un nouveau service facturé 9,99 euros par mois ! Odile, elle, s’est aperçu en vérifiant les comptes de sa mère décédée que cette dernière était prélevée chaque mois de plusieurs centaines d’euros par la Sfam.
Entre résignation, plainte et parano
Parmi les nombreux témoignages reçus, beaucoup ont déposé plainte et attendent avec impatience que la justice tranche. Dans la plupart des cas, les réclamations auprès d’Hubside ou de la Sfam n’ont donné lieu à aucun remboursement, ou à un remboursement partiel des sommes indûment débitées. Les banques des victimes semblent assez compréhensives, tant pour rembourser les prélèvements abusifs que pour bloquer les prélèvements à venir. Pour autant, certains de nos lecteurs, comme Amélie, ont dû se résoudre à clôturer leur compte bancaire pour régler le problème.
Mais tous et toutes ont développé une forme de paranoïa hélas justifiée. Anaïs scrute désormais ses comptes bancaires : « il faut être toujours vigilant car les prélèvements peuvent réapparaître », craint-elle. « Escroqué de 700 euros », Christophe « vérifie tout le temps » son compte aussi.
Avec les prélèvements intempestifs de la Sfam, Mélanie s’est « retrouvée avec des difficultés pour payer ses charges pendant plusieurs mois ». Dépouillée de 2.800 euros, Cindy, « vendeuse en boulangerie à mi-temps avec un salaire de 900 euros », accuse Hubside de l’avoir mise « dans une situation très précaire ».
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