Législatives: vers un "match de la peur" entre le RN et le NFP au second tour, selon les sondages
Bernard Sananès, le président de l'institut de sondage Elabe, fait le point ce lundi sur RMC sur les tendances dans les sondages avant les législatives. Il estime qu'une "hausse très forte de la participation s'annonce", ce qui profiterait "à tous les camps". Et admet que les projections de sièges restent fragiles.
La France entame ce lundi 24 juin 2024 sa dernière semaine de campagne avant le premier tour des législatives, décrites comme les plus importantes depuis 1945, dont l'extrême droite est aujourd'hui la favorite devant une fragile union de la gauche. "Ce scrutin ressemble à une confirmation des européennes", résume Bernard Sananès, président d'Elabe, sur RMC, en commentant les sondages de son institut sur les intentions de vote au premier tour.
"Le RN et ses alliés, si on ajoute Reconquête, ferait quasiment le même score que le bloc de la droite radicale il y a 15 jours (36-38%). Ça lui donne une dynamique très forte notamment pour le premier tour et ça lui permettrait de se qualifier dans la grande majorité des circonscriptions", explique le président de l'institut de sondage.
Le Nouveau Front populaire confirme sa deuxième place, une dizaine de points derrière, "notamment parce qu'il arrive à mieux mobiliser son électorat, qui était un peu abstentionniste", poursuit-il. "A l'inverse, il est pénalisé par une chose: les reports de voix de l'électorat (Raphaël) Glucksmann (PS) sur les candidats du NFP ne se font pas dans la totalité, il en manque un tiers, ce n'est pas négligeable", selon Bernard Sananès. C'est-à-dire qu'une partie des électeurs ayant voté pour lui il y a une quinzaine de jours "disent pour l'instant qu'ils ne voteront pas pour le candidat du NFP, vraisemblablement dans les circonscriptions où le candidat est issu de LFI". "Ça peut pénaliser cette dynamique unitaire qui était pourtant réelle pour le NFP." En troisième position, la majorité sortante (autour de 20% d'intentions de vote).
Des bulletins de vote le 26 mai 2019 (photo d'illustration)
>> Suivez notre direct sur les législatives anticipées
Une forte hausse de la participation attendue
Mais qui votera dimanche prochain, alors que le cap du million de procurations a déjà été franchi? Et les Français savent-ils déjà le bulletin qu'ils glisseront dans l'urne? "On est dans une campagne très courte, la cristallisation arrivera tardivement" mais "on a déjà 7 Français sur 10 qui savent pour qui ils iraient voter", indique Bernard Sananès.
Surtout, "le point marquant, pour l'instant, c'est qu'une hausse très forte de la participation s'annonce", poursuit-il, rappelant qu'aux dernières législatives, elle avait été de 48%. "Là, on pense qu'on sera à 60, voire 62 ou 64%", d'après l'indicateur projeté par Elabe sur la base de son enquête. Nettement plus, donc, qu'aux européennes, puisque "ça pourrait être 5 millions d'électeurs" supplémentaires par rapport à ces dernières.
Cela "profite à tous les camps, il n'y a pas de différence". "En revanche, sur la classe d'âge, on voit bien que les jeunes seraient plus surmobilisés", a contrario des européennes qui ne les avait pas énormément mobilisés.
"Là, les jeunes iraient plus voter, avec une petite dynamique pour la gauche."
"Les blocs RN et NFP inquiètent un Français sur deux"
Après dimanche, viendra l'entre-deux-tours. Le sondage d'Elabe donne des projections en sièges: le RN et ses alliés obtiendraient une majorité relative (entre 250 et 280), suivi du Nouveau Front populaire (150 à 170 sièges), puis du groupe de la majorité sortante Ensemble (90 à 110 sièges). Pour rappel, 289 sièges sont nécessaires pour obtenir la majorité absolue. Des projections qu'il faut "prendre avec prudence, comme toujours, jusqu'au soir du premier tour", précise le président de l'institut.
Quelle est la méthodologie de fabrique de ces projections? "L'intention de vote se fait sur l'offre réelle: les sondés ont devant eux, non pas des étiquettes politiques, mais les noms des candidats dans leur circonscription. C'est beaucoup plus fin, les enjeux locaux sont mieux appréhendés", explique-t-il. Les échantillons sont aussi plus importants: "2.000 personnes au lieu des 1.000 traditionnelles". Enfin, la question du vote en fonction de la configuration au second tour est posée aux sondés, donnant "ce qu'on appelle des matrices de report". Les consignes de vote données par les différents partis politiques avant le second tour pourraient aussi avoir un effet.
A partir de cela, Elabe constate que "les chiffres sont très proches, les blocs RN et NFP inquiètent un Français sur deux voire plus" mais "on voit que le NFP inquiète légèrement plus". "Dans un second tour qui donnerait 200 duels, voire plus, opposant le RN et la gauche, ce sera 'un match de la peur'. De qui a-t-on le plus peur? Ce sera l'une des clefs", analyse Bernard Sananès.