Législatives : « Chaos », « chute dans l’inconnu »… La presse étrangère retient son souffle après le premier tour
La photo de la députée RN Marine Le Pen, célébrant sa victoire, figure en Une de nombreux journaux internationaux. AFP/FRANCOIS LO PRESTI
La France sur un point de bascule « historique ». Les résultats du premier tour des législatives françaises, qui ont vu le Rassemblement national l’emporter haut la main devant le Nouveau front populaire de gauche et le camp macroniste, arrivé 3e, figurent en une de plusieurs titres de presse internationaux. Le ton sombre, ils décrivent une situation inédite et craignent de voir la démocratie française tressaillir.
La photo de Marine Le Pen triomphante, les bras grands ouverts, se retrouve en première page de nombreux journaux, d’El País en Espagne, qui relève que « l’extrême droite remporte sa première victoire aux élections législatives », à Die Presse en Autriche, qui constate une « nette victoire » des « populistes de droite » sur « l’alliance du président Macron ».
« Un tournant dans l’histoire »
La photo de la députée réélue du Nord s’étend aussi en une de la presse anglophone, sur celle du Financial Times britannique, qui s’alarme que ce scrutin « rapproche la France d’un gouvernement nationaliste potentiel, ce qui provoquerait une onde de choc dans toute l’Europe ». Ou encore celle du Wall Street Journal, qui souligne lui aussi l’enjeu inédit de ce vote : « le RN est en passe d’obtenir un nombre de sièges parlementaires sans précédent (…), marquant un tournant dans l’histoire de la cinquième république moderne de la France », pose le journal américain.
L’information fait la une jusqu’au Brésil, où le O Globo affiche Marine Le Pen réélue tout sourire derrière une nuée de drapeaux agités, et décrit un président « isolé » face à la victoire de l’extrême droite et l’union de la gauche. Le Pùblico portugais relève quant à lui que « l’extrême droite gagne le premier tour, presque tout le monde est contre elle », sur une large photo de la députée RN, la main sur le cœur.
« Le Pen gagne, la France est divisée », résume aussi La Republica, estimant que « les scrutins qui se dérouleront dans sept jours seront décisifs ». Le quotidien italien fait toutefois le pari que « l’accord de désistement » voulu par le camp présidentiel et le Nouveau Front populaire leur permette d’être « sûrs de l’emporter ».
« Le pari du président s’est retourné contre lui »
Le ton est bien moins optimiste pour nombre d’autres titres de presse. « La démocratie française parle et elle fait peur », lance Le Temps, déplorant un « chaos français » et une « effarante débandade ». Du côté de la Belgique, La Libre s’inquiète aussi d’une « chute vertigineuse dans l’inconnu ».
Une possible bascule signant l’échec cuisant d’Emmanuel Macron, estiment de nombreux journaux à travers le monde. « Coup dur » et « humiliation écrasante » pour « l’alliance centriste », décrit le magazine britannique The Economist, pour qui une « nouvelle ère dramatique » s’ouvre en France. « Le pari du président s’est retourné contre lui de manière spectaculaire », cingle-t-il.
« La France sanctionne les centristes », titre aussi The Washington Post, estimant que « les résultats de l’élection de dimanche vont sans doute alarmer de nombreuses capitales européennes ». Pour le journal, le scrutin aura fait figure de « référendum » sur le chef de l’État lui-même, « àbien des égards ».
« Emmanuel Macron a perdu le contact avec les personnes que le Rassemblement national a mobilisées », constate également The New York Times, quand l’espagnol El Pais estime que « le macronisme a peut-être signé son acte de décès ce soir ». En Argentine, ClarÃÂn décrit « un vote de colère et de déception (qui) a permis àLe Pen de remporter un triomphe historique ».
« Maux de tête incalculables »
Désormais, « M. Macron risque de partager le pouvoir avec le premier gouvernement d’extrême droite depuis la France de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale. Le calcul de Macron semble s’être retourné contre lui », analyse aussi le Wall Street Journal. Ne mâchant pas ses mots, La Vanguardia espagnole déplore un « séisme politique » et estime même qu’Emmanuel Macron est « passé du statut de séducteur irrésistible à celui d’homme le plus détesté de la vie politique française ».
Quant à la suite, The Daily Telegraph se projette déjà sur une possible victoire du RN, estimant qu’une cohabitation avec Jordan Bardella, qui accéderait alors à Matignon, « créerait des maux de tête incalculables pour M. Macron ». « Le meilleur scénario pour Macron serait un Parlement sans majorité dans lequel aucun bloc ne pourrait revendiquer la majorité », anticipe également The Financial Times. « Le blocage serait assuré, mais il pourrait faire un dernier effort pour former un gouvernement techniciste », avance le journal.
« Le groupe de Macron et l’alliance gauche-verte devront coopérer pour maintenir le Front national hors du pouvoir, mais ce ne sera pas facile », résume aussi le britannique The Guardian, pour qui la situation reste toujours « très incertaine ».