Assassinat de Nathalie Debaillie : anatomie d’une faillite

assassinat de nathalie debaillie : anatomie d’une faillite

Assassinat de Nathalie Debaillie : anatomie d’une faillite

Avant le procès d'assises qui doit se tenir en juin, c'est d'abord l'État français qui est appelé à la barre du tribunal judiciaire de Paris, ce 24 mai. Un mis en cause plutôt inhabituel dans une affaire d'assassinat. Pourtant, en décembre dernier, c'est bien l'État que Me Isabelle Steyer, qui représente la famille de Nathalie Debaillie, égorgée en 2019,a annoncé attaquer en responsabilité. Car, pour l'avocate et la famille de la victime, au-delà de l'assassin présumé de Nathalie, la police de Lille (Nord) a, elle aussi, permis le crime.

Remontons cinq ans en arrière, au 27 mai 2019, à Lille. Aidé de trois complices, Jérôme Tonneau, l'ex-compagnon de Nathalie, l'enlève, la jette dans le coffre d'une fourgonnette et la bâillonne. Elle sera retrouvée quelques heures plus tard gisant dans la baignoire de son ex-conjoint, égorgée au cutter. Tragique dénouement d'un drame annoncé : entre février et mai 2019, Nathalie Debaillie avait déposé trois mains courantes et une plainte à l'encontre de son ex-conjoint.

« Elle n'en pouvait plus »

Avec Jérôme Tonneau, ils font connaissance en 2017, sur un site de rencontres. Elle a alors 45 ans, lui 52. Ils n'habitent pas ensemble, mais cela n'empêche pas Jérôme Tonneau de lancer chez Nathalie d'importants travaux. « Il voulait s'approprier les lieux », observe Me Steyer. Nathalie Debaillie est pourtant formelle : elle ne souhaite pas qu'il emménage chez elle. Début 2018, elle confie à sa s?ur qu'elle se sent envahie, privée de sa liberté et épuisée.

«Ã‚ Elle me disait qu'elle n'en pouvait plus, qu'il prenait de plus en plus de place dans sa vie, qu'il voulait absolument s'installer chez elle mais qu'elle ne voulait pas », expliquera la s?ur de la victime devant les enquêteurs. À la même période, Nathalie Debaillie fait aussi plusieurs découvertes concernant Jérôme Tonneau, notamment qu'il est visé par une enquête pour escroqueries. Il a d'ailleurs été condamné en juillet 2020 des chefs de tentative d'escroquerie, complicité de destruction par incendie, fausses déclarations à l'assurance et dénonciations mensongères pour avoir mis volontairement le feu à l'un des pressings dont il était propriétaire.

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En août 2018, Nathalie Debaillie essaie une première fois de mettre un terme à la relation. Mais elle se heurte à un homme insistant, qui refuse d'accepter la rupture. Ce n'est que plusieurs mois plus tard, en février, qu'elle parvient à rompre définitivement avec Jérôme Tonneau. Mais ce dernier ne disparaît pas de sa vie pour autant. « Il revient toujours me voir », confie Nathalie Debaillie dans une première main courante datée du 11 février 2019. Quelques jours avant cela, il a aussi tenté de mettre fin à ses jours. « Un moyen de faire culpabiliser Nathalie », estiment ses proches.

« Ils choisissent la non-assistance »

Malgré la rupture, Jérôme Tonneau persiste à contacter Nathalie et la surveille régulièrement depuis le restaurant situé en face de la Société générale où elle est cadre. Le 5 mars 2019, elle décide donc de se rendre une deuxième fois au commissariat de Lille. Dans sa main courante, elle indique : « Hier, mon ex-compagnon a pénétré au sein du parking de ma société afin de me parler. J'ai coupé court à ses propos, lui reprochant sa présence sur mon lieu de travail. Il m'a suivie jusqu'aux ascenseurs et, alors qu'il voulait y entrer, je l'ai poussé de la main. Il a observé qu'une caméra était présente. » Après le dépôt d'une main courante, une plainte avec transmission au parquet aurait dû être enregistrée par les policiers.

Mais, pour une raison inconnue, rien ne se passe. À tel point que Nathalie Debaillie est contrainte de revenir quatre jours plus tard pour déposer une plainte, cette fois pour « menaces de mort réitérées ». Aux policiers, elle explique que, selon plusieurs connaissances communes, Jérôme Tonneau l'a menacée après sa tentative de suicide. « Pendant l'internement, il aurait dit à ses amis qu'il me mettrait bien dans un coffre de voiture pour me mettre un ?coup de pression?. [?] Il aurait également dit vouloir me buter puis dans le fil de la même conversation, il aurait dit vouloir se procurer une arme. »

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Elle affirme que son ex lui fait peur, qu'il est « imprévisible ». Les policiers invitent Nathalie Debaillie à déposer une main courante, et non une plainte, alors même que les faits qu'elle dénonce constituent du harcèlement et des menaces de mort. « Les services de police auraient dû effectuer les diligences relatives à une plainte », s'émeut Me Steyer. À l'issue de ce dépôt de plainte, Jérôme Tonneau ne sera pas convoqué. Rien ne sera transmis au parquet. « À ce moment-là, ils choisissent la non-assistance », affirme Me Steyer.

Pierre tombale

Le 12 avril, c'est au tour de Jérôme Tonneau de se rendre au commissariat. Il accuse Nathalie Debaillie de lui avoir volé un téléphone et porte plainte. « De fait, elle est convoquée, alors que lui ne l'a jamais été », souligne Me Steyer, qui se demande si un téléphone vaut plus que la vie d'une femme. Le 22 mai, soit cinq jours avant sa mort, Nathalie Debaillie se présente aux policiers et apporte une facture dudit téléphone sur laquelle est écrit de la main de son ex-conjoint qu'il s'agit d'un cadeau. Elle informe aussi les enquêteurs que Jérôme Tonneau la suit constamment, qu'elle est obligée de changer de trajet pour l'éviter, qu'il se rend à des endroits où elle a l'habitude d'aller.

Elle profite aussi de cette convocation pour expliquer aux enquêteurs avoir vu un ami de Jérôme Tonneau le 16 mai au matin devant son lieu de travail et le soir devant son domicile, précise qu'un pneu de sa voiture a été enlevé, un autre dégonflé, qu'elle et ses enfants reçoivent constamment des appels de numéros masqués, et elle ajoute : « J'ai aussi reçu une photo de pierre tombale. »

«Ã‚ Le commissariat, alors même qu'il est saisi d'une plainte dénonçant des faits extrêmement graves, va une nouvelle fois, dans l'ignorance la plus totale de la situation, enregistrer une main courante », écrit Me Isabelle Steyer dans son assignation de l'État. L'agent de police chargé de la rédiger l'intitule « Différend entre concubins ».

Inertie de la police

Dans la plainte en date du 9 mai, Nathalie Debaillie avait indiqué être inquiète car Jérôme Tonneau voulait venir chez elle pour récupérer des affaires. « Elle avait prévenu ses voisins pour qu'ils veillent sur elle et elle avait même sollicité la présence d'une patrouille de police dans le quartier », racontera sa voisine. À cette demande d'assistance, le policier avait conclu : « Aucune mesure de protection n'est à mettre en ?uvre. Importance du préjudice subi par la victime : néant. Mais nous avisons la victime de faire appel à nos services dès qu'elle le jugera nécessaire. » Trois témoins des faits de menaces de mort ont été cités dans cette plainte. Aucun d'eux ne sera entendu.

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Le 27 mai 2019, à 8 h 50, Nathalie Debaillie sera enlevée dans le parking de la Société générale, comme Jérôme Tonneau l'avait annoncé à plusieurs reprises, puis séquestrée chez lui avant d'y être égorgée. Là encore, malgré l'alerte enlèvement, les policiers lillois ont mis plus de quatre heures à intervenir. Pour Me Steyer, il est certain que l'inaction des services de police a constitué pour la victime « une perte de chance » d'être sauvée. Et, si les policiers avaient convoqué Jérôme Tonneau ou transmis sa plainte au parquet en vue d'un déferrement, ils auraient pu constater que trois autres femmes l'avaient déjà accusé de violences, dénonçant des scènes de strangulation, du harcèlement et des menaces de mort.

À deux reprises, l'État a déjà été condamné pour « faute lourde » dans des dossiers similaires. Comme en 2014, après un féminicide et un double meurtre survenu à Grande-Synthe (Nord). Le tribunal avait estimé que la faute des services de police avait « mis en position » l'assassin pour tuer son ex-compagne et ses beaux-parents. À l'époque, c'est déjà Me Isabelle Steyer qui représentait la famille des victimes. Jérôme Tonneau, lui, doit comparaître à partir du 25 juin aux assises du Nord. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

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