"Un phénomène qui nous inquiète": les féminicides de personnes âgées en hausse en Provence

Dans les Bouches-du-Rhône, quatre femmes âgées de plus de 50 ans ont été tuées par leur conjoint depuis le début de l’année. Une hausse du nombre de féminicides qui inquiète les autorités, et touche également le département du Var.

“Le monsieur d’un certain âge -il a plus de 75 ans- a sorti le fusil, et il l’a pointé sur madame.” Ce dossier traité par maître Azzedine El Kolli, avocat au barreau de Marseille, fait partie d’affaires qui deviennent de plus en plus fréquentes chez les avocats provençaux.

Voiture de police (ILLUSTRATION)

Dans ce cas précis, la fille du couple est intervenue à temps. Mais depuis le début de l’année, quatre femmes âgées de plus de 50 ans ont été tuées par leur compagnon ou leur ex-conjoint dans les Bouches-du-Rhône.

Plusieurs cas dans les Bouches-du-Rhône et le Var

Ces féminicides chez les personnes dites “seniors” inquiète de plus en plus les associations, les avocats et les autorités, car leur nombre semble en hausse.

En 2023, le collectif Féminicide par compagnon ou par ex avait recensé deux féminicides chez les personnes âgées de plus de 50 ans. Un chiffre désormais deux fois plus important sur les seuls trois premiers mois de l’année 2024.

Le 15 mars dernier, une femme de 84 ans a été abattue à Marseille par son mari de 89 ans, qui s’est ensuite suicidé avec la même arme. Le corps d’une femme de 76 ans a également été retrouvé à Marignane début février et son mari de 86 ans a par la suité été interpellé. Mi-janvier, la piste d’un double-homicide intraconjugal a été privilégiée après la découverte des corps d’un couple dans une maison de Martigues.

Et le phénomène ne semble pas propre aux Bouches-du-Rhône. Dans le département voisin du Var, les corps d’une femme de 56 ans et de son ex-mari de 66 ans ont été retrouvés en janvier à Saint-Mandrier-sur-Mer. Les enquêteurs ont alors privilégié la piste du féminicide suivi d’un suicide. Début janvier, un homme de 84 ans a même reconnu le meurtre de sa femme de 75 ans à Vinon-sur-Verdon.

À Puget-sur-Argens, une femme de 95 ans a été tuée par balle début février par son mari de 97 ans, qui a par la suite reconnu les faits. Début février encore, une femme de 65 ans a été tuée par son mari de 69 ans à Sanary-sur-Mer, deux heures après l’intervention d’un équipage de police-secours appelé pour un “différend conjugal”.

“Ils ne supportent pas l’idée qu’elle puisse leur survivre”

Les autorités reconnaissent un phénomène qui prend de l’ampleur. “C’est un phénomène qui nous inquiète davantage, dans le passé, on voyait beaucoup moins ça”, explique à BFM Marseille Provence Rudy Manna, porte-parole de la zone Sud pour le syndicat Alliance police nationale.

Mais les enquêteurs peinent encore à déterminer les éléments qui entraînent cette hausse du nombre de féminicides chez les personnes âgées.

“Il faut vraiment s’attacher à mener des enquêtes qui vont jusqu’au bout, en essayant d’avoir le maximum de renseignements pour savoir d’où peuvent provenir ces envies de féminicide, et le fait de passer à l’acte”, conclut Rudy Manna.

De leur côté, les associations voient un lien entre la hausse de ces féminicides et une peur liée à l’âge avancé des victimes et de leur meurtrier.

“La maladie, la vieillesse, sont également une forme de séparation. Il arrive qu’ils tuent car (…) ils ne supportent pas l’idée qu’elle puisse leur survivre”, explique le collectif Féminicide par compagnon ou par ex.

Les associations précisent par ailleurs que dans 74% des cas, les féminicides sont commis au domicile conjugal.