Titres-restaurant. L’utilisation pour faire ses courses examinée ce jeudi, on vous explique le débat

titres-restaurant. l’utilisation pour faire ses courses examinée ce jeudi, on vous explique le débat

Une femme paie dans un commerce du quartier parisien de Rennes-Saint-Sulpice, en septembre 2015. Photo d’illustration.

Objet de polémique, la prolongation de la possibilité d’utiliser des titres-restaurant pour les courses alimentaires en 2024 va être examinée à l’Assemblée nationale, ce jeudi 23 novembre 2023. Retour en six actes sur ce sujet qui fait débat entre les salariés qui en bénéficient, le gouvernement et les restaurateurs.

Créés à la fin des années 1950 et développés dans les années 1960 en France, les titres-restaurant sont utilisés aujourd’hui par plus de 5 millions de salariés pour régler des repas ou des prestations alimentaires chez quelque 234 000 commerçants. L’an dernier, leur utilisation a été étendue à tous les produits alimentaires, même non directement consommables.

Une dérogation en faveur du pouvoir d’achat qui était censée prendre fin en même temps que l’année 2023. Mais, face à la polémique grandissante, à l’approche de cette échéance, la prolongation de l’utilisation de ces avantages pour les courses alimentaires l’an prochain va être examinée à l’Assemblée, ce jeudi 23 novembre 2023. Retour en six actes sur ce sujet qui fait débat.

Lire aussi : Titres-restaurant : 700 millions d’euros sont perdus chaque année par les salariés français

Acte I : dérogation à l’été 2022

Les titres-restaurant sont déjà à l’agenda politique. Doublé en juin 2020 pour aider les restaurateurs à faire face aux conséquences économiques de la crise du Covid-19, leur plafond repasse à 19 € par jour en juillet 2022. Puis le gouvernement se dit « prêt » à rehausser le plafond journalier à 25 €. Ce qui est chose faite, pour tous les titres de ce type (tickets-restaurant, chèques-déjeuner…), à compter d’octobre 2022.

Une autre dérogation est mise en place à partir du 18 août 2022. Jusque-là cantonnée aux produits « immédiatement consommables » (sandwichs, salades, plats congelés ou fruits et légumes), la liste des produits éligibles aux titres-restaurant est élargie, selon l’article 6 de la loi pour la protection du pouvoir d’achat. L’extension de l’utilisation de ces titres concerne toutes les denrées alimentaires, même si elles ne sont pas directement mangeables sans cuisson ou préparation (farine, pâtes, riz, œufs, poisson, viande, etc.).

Et ce, pour aider les Français, touchés par l’inflation et la hausse, entre autres, des prix alimentaires et de la facture énergétique. Le législateur précise néanmoins que cette disposition devrait prendre fin le 31 décembre 2023.

Acte II : fin programmée en 2023

Oui mais voilà, arrivés mi-novembre 2023, la date butoir approchant, certains salariés bénéficiaires de ces dispositifs sont prévenus que la liste des achats possibles va se réduire et s’en émeuvent. Sur les réseaux sociaux par exemple, comme le relève alors l’Agence France-Presse, où plusieurs mettent en avant les difficultés liées à l’inflation.

«Â Quand il s’agit d’engloutir un plat devant un ordinateur entre deux réunions, que préférez-vous ? Prendre une formule spécialement conçue pour utiliser le plafond quotidien de votre carte ticket-restaurant […] ou acheter pour la même somme ou presque, de quoi cuisiner des plats pour plusieurs jours et bien plus savoureux à la maison ? » s’insurge une journaliste dans une tribune publiée sur Welcome to the jungle, plateforme dédiée à l’univers du travail, le 9 novembre.

«Â Ce n’est pas le moment de retirer du pouvoir d’achat à des personnes qui travaillent, mais qui ont quand même de bas revenus, alerte auprès d’Ouest-France Joséphine Dubois, chargée du plaidoyer au Secours catholique, le 14 novembre. Même si le niveau de l’inflation diminue, cela ne veut pas dire que les prix vont baisser. Ils vont juste augmenter moins vite. »

Des protestations qui entraînent une vague de réactions. Tandis que des associations et des responsables politiques, pour qui un retour en arrière paraît inacceptable, appellent à maintenir la dérogation actuelle, le gouvernement, pris dans la polémique, semble « étudier les possibilités ».

Acte III : prolongation face à la contestation

Alors que des parlementaires et des usagers tirent la sonnette d’alarme, le gouvernement choisit de calmer le jeu. Il annonce que les règles ne bougeront pas en 2024. La ministre déléguée au Commerce assure en effet, le 14 novembre sur M6, qu’il restera possible d’utiliser les titres-restaurant pour payer toutes les courses alimentaires « tout au long de l’année 2024 ». « Rien ne changera pour les Français », déclare Olivia Grégoire à l’antenne. Le plafond d’utilisation de 25 € par jour restera également inchangé. « Les bonnes idées, il faut les garder. »

Après 48 heures de polémique, le ministre de l’Économie dément tout rétropédalage de la part du gouvernement. Bruno Le Maire souligne d’ailleurs, le 15 novembre, que le choix précédent d’arrêter la dérogation au 31 décembre 2023 était « un choix du Sénat » et que c’était « un choix du gouvernement » de le prolonger en 2024.

Acte IV : vers des titres-repas ?

Le 14 novembre, Olivia Grégoire indique aussi que l’idée d’une utilisation dérogatoire de ces moyens de paiement pour acheter de la nourriture en supermarché au-delà de 2024 « fera partie des points que nous aborderons dans la négociation de la réforme » du marché, devant être présentée d’ici la fin de l’année. Le lendemain, Bruno Le Maire explique également qu’elle pourrait être pérennisée.

Et si les titres-restaurant devenaient des titres-repas ? « Au-delà de la prolongation pour un an » de la mesure, « je suis prêt à ce qu’on ouvre la discussion », indique le ministre sur Europe 1 et CNews. « Est-ce qu’il ne faut pas utiliser le ticket-restaurant de manière plus globale pour l’achat des produits alimentaires ? Changer cette dénomination qui induit un peu en erreur ? Avec une seule obsession, que ça corresponde aux attentes des gens. »

Comment ? Si Bruno Le Maire évoque le projet de loi de finances pour 2024 en discussion au Parlement, les trois groupes de la majorité annoncent le dépôt d’une proposition de loi dédiée à l’Assemblée, tout comme les sénateurs LR au Sénat. À l’Assemblée, le groupe Renaissance demande une procédure d’examen simplifié, mais à ce stade le RN est contre.

Lire aussi : Les titres-restaurant seront entièrement dématérialisés en 2026, annonce le gouvernement

Acte V : opposition des restaurateurs

Dans tous les cas, la prolongation de la mesure pour 2024 est décidée. Une bonne nouvelle pour les bénéficiaires de ces titres, moins pour les restaurateurs, que ces annonces ont rendu furieux. Comme en 2022, ces derniers sont vent debout contre la transformation du titre-restaurant en « titre-caddie », selon les termes de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih), première organisation patronale du secteur.

«Â Nous entendons bien les voix qui s’élèvent pour tenter d’utiliser le titre-restaurant contre l’inflation mais c’est aux pouvoirs publics de proposer des dispositifs spécifiques avec par exemple, la création d’un chèque alimentaire pour améliorer le pouvoir d’achat des publics les plus défavorisés », estime dans un communiqué Franck Chaumes, président de la branche restauration de l’Umih.

Le chef étoilé Thierry Marx, président du principal syndicat de l’Umih, monte en personne au créneau. Il demande à être reçu « dans les meilleurs délais » par la Première ministre Élisabeth Borne. « Avec sa volte-face […], le gouvernement envoie un très mauvais signal à notre profession », déplore-t-il dans un communiqué transmis à l’AFP, le 16 novembre. « En 2023, c’est un manque à gagner de 200 millions d’euros pour nos restaurateurs », selon lui. Cette année, « la grande distribution a vu sa part de marché titre-restaurant augmenter de plus de 6 % » quand « celle des restaurants diminuait de 3 % », avance-t-il encore.

Lire aussi : Titres-restaurant : pourquoi l’Autorité de la concurrence pousse à la dématérialisation obligatoire

«Â J’entends bien les voix qui s’expriment à propos de l’utilité de ce titre, en période d’inflation, pour faire ses courses au quotidien. L’inflation concerne tous les Français. La hausse des prix impacte aussi nos restaurateurs », poursuit Thierry Marx. Il appelle ainsi le gouvernement à « concevoir un titre alimentation ou un chèque alimentaire pour lutter contre l’inflation et aider les plus défavorisés ». Avant d’asséner : « Dans titre-restaurant, il y a restaurant. Ce titre doit rester une aide au déjeuner des salariés ne disposant pas de restaurant d’entreprise. »

En marge d’un déplacement, Olivia Grégoire lui répond au nom du gouvernement : « Nous sommes et nous serons aux côtés des restaurateurs » mais « il faut aussi entendre les Français ». « L’inflation alimentaire […] demeure assez élevée » et pouvoir continuer à utiliser ces titres pour des achats alimentaires en général « est une liberté de bon aloi ». Avant de conclure : « Il faut que les restaurateurs l’entendent et je ne doute pas que Thierry Marx l’entende. »

Acte VI : proposition examinée dans l’hémicycle

Ainsi, promis par le gouvernement, le texte proposant la prolongation en 2024 de la possibilité de payer toutes ses courses alimentaires avec des titres-restaurant sera examinée ce jeudi par l’Assemblée nationale, annonce sa présidente Yaël Braun-Pivet sur France 3, le 19 novembre. La proposition de loi des groupes de la majorité présidentielle (Renaissance, MoDem, Horizons) devant être examinée « mardi [21] en commission et jeudi [23] en séance publique ».

«Â Nous allons très vite pour que si le Parlement décide de voter cette dérogation, elle puisse s’appliquer dès le 1er janvier. Je suis très confiante car il y a une même proposition de loi déposée par LR au Sénat donc je pense que nous trouverons une majorité », ajoute la présidente de la chambre basse.

Le texte de loi examiné par les députés ce jeudi vise néanmoins uniquement à prolonger le dispositif jusqu’au 31 décembre 2024. L’examen du texte similaire par les sénateurs est, lui, programmé par la conférence des présidents de la chambre haute pour le 12 décembre.

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