Présent lors d’une représentation d’opéra interrompue par des militants écologistes à New York, Louis de Vogüe raconte « une véritable reconstitution théâtrale et miniature de la scène mondiale en matière de lutte contre le réchauffement climatique » où « les implications […] de notre inaction nous apparaissent de manière […] saisissante ».
J’ai assisté le 30 novembre 2023 à la première de l’opéra Tannhäuser au Metropolitan Opera de New York. L’opéra a été interrompu au milieu du deuxième acte par des manifestants écologistes qui ont déroulé des banderoles depuis les balcons et crié différents slogans. Je ne souhaite pas prendre parti dans le débat qui cherche à déterminer si cette action est politiquement ou moralement justifiable et pertinente, mais plutôt souligner une dimension psychologique de l’expérience qui me semble souvent négligée.
Quelle que soit notre opinion concernant la légitimité de ce type de manifestation, je pense qu’on peut en effet faire le constat suivant : en rejouant à échelle réduite les mécanismes d’(in)action collective en matière de lutte contre le réchauffement climatique, l’interruption de l’opéra par les manifestants permet de mettre en perspective de manière particulièrement saisissante notre comportement de tous les jours en matière de lutte contre le réchauffement climatique à l’échelle réelle. L’intérêt de l’échelle réduite est qu’elle met ce comportement en perspective de façon beaucoup plus saisissante qu’un discours théorique.
Des militants d’Extinction Rebellion manifestent devant le Royal Opera House de Londres en 2019.
Lorsqu’on est assis et que les manifestants se lèvent, se mettent à crier et dérouler des banderoles, notre option « par défaut » est de rester assis. Cette option « par défaut » nous renvoie cependant malgré nous au camp « d’en face », au camp de ceux qui ne luttent pas contre le réchauffement climatique. Ce renvoi au « mauvais » camp est d’autant plus saisissant que plusieurs membres du camp des « assis » – auquel on appartient désormais – se mettent à hurler des insultes à l’encontre des manifestants et de la lutte écologiste. On se sent alors assez impuissant (car on est assigné à un camp sans avoir agi).
Ceci peut paraître une banalité : l’option « par défaut » n’est pas une option neutre en matière d’urgence climatique, car elle est l’option de l’inaction, qui mène au désastre. Ce que j’essaie cependant de souligner est que, lorsqu’on entend cette « banalité » dans des discours, elle nous atteint sur le plan intellectuel et dans une certaine mesure sur le plan émotionnel. Toutefois, dans le cas où l’on fait l’expérience de la manifestation à l’opéra, cette « banalité » est rejouée de manière très intense à échelle réduite (une salle d’opéra plutôt que toute la planète).
Alors que les marches pour le climat s’essoufflent, le mouvement cherche sa stratégie
Les implications de notre choix « par défaut » et de notre inaction nous apparaissent donc de manière beaucoup plus saisissante grâce à cette expérience à l’échelle réduite où les rôles sont endossés de manière très concrète et figurative (les manifestants, les « assis », les personnes qui dénigrent l’écologie en hurlant, etc.). C’est une véritable reconstitution théâtrale et miniature de la scène mondiale en matière de lutte contre le réchauffement climatique, ce qui est particulièrement saisissant quand on en fait l’expérience.
Bien évidemment, ma proposition (« En rejouant à l’échelle réduite les mécanismes d’(in)action collective en matière de lutte contre le réchauffement climatique, l’interruption de l’opéra par les manifestants permet de mettre en perspective de manière particulièrement saisissante notre comportement de tous les jours en matière de lutte contre le réchauffement climatique à l’échelle réelle ») est indépendante de ma position concernant la légitimité de ces actions. Le constat de la mise en place de ce mécanisme psychologique est neutre et n’implique pas d’opinion particulière concernant la légitimité de cette action.
Louis de Vogüe, New York (Etats-Unis)
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