Al, 42 ans, a été condamné par le tribunal correctionnel de Bordeaux, ce lundi, à dix mois d’emprisonnement dont neuf avec sursis pour trafic de stupéfiants. Le tribunal a retenu la profonde addiction du prévenu au 3MMC
Le prévenu est accroc au 3-MMC, une drogue de synthèse qui circule beaucoup dans les soirées « chemsex ».
procès – Al, 42 ans, a été condamné par le tribunal correctionnel de Bordeaux, ce lundi, à dix mois d’emprisonnement dont neuf avec sursis pour trafic de stupéfiants. Le tribunal a retenu la profonde addiction du prévenu au 3MMC
Il a failli y laisser sa peau. Le 15 mars 2024, celui que tout le monde surnomme Al, 42 ans, a été retrouvé inconscient par la femme de ménage du logement Airbnb qu’un de ses amis avait loué à Bordeaux. Il passera plusieurs heures dans le coma avant d’être hors de danger.
Depuis le 13 mars, il se livrait quasi en continu à des sessions de « chemsex », à savoir des relations sexuelles sous l’emprise de drogues de synthèse, avec trois autres amis. Il raconte qu’il a ingéré par erreur un fond de GBL (solvant industriel utilisé comme drogue) en prenant un médicament, le lendemain de la fête. En mars, trois décès ont eu lieu à Bordeaux dans le contexte de ces soirées « chemsex » qualifiées par la procureure Marion Mare, de « problème de santé publique majeur ».
Dans l’appartement, du matériel de conditionnement pour différentes drogues de synthèse et des stupéfiants ont été retrouvés. Al comparaissait ce lundi pour importation, acquisition, transport, offre ou cession de manière illicite de substances ou plantes classées comme stupéfiants : de la 3-MMC, du GBL, de la cocaïne, de l’ecstasy et de la MDMA, entre le 1er janvier 2021 au 16 mars 2024. Inconnu des services de police, il a été condamné à dix mois de prison dont neuf avec sursis. Le profil de ce « dealer » atypique, qui est avant tout, de son propre aveu, très accro au 3-MMC (une drogue de synthèse appelée aussi métaphrédone) peut expliquer la clémence du tribunal.
Des rêves brisés
C’est un homme de grande taille, au crâne rasé, qui peine à développer ses réponses et qui se dit « perturbé », « impressionné » d’être face aux magistrats. C’est son conseil Me Anaïs Karapetian qui va mettre les mots sur ses maux. Dès ses 8 ans, il se découvre une passion pour un sport collectif qu’il pratique à un haut niveau. Il pratique en tant que professionnel jusqu’à ses 24 ans. « Lors d’une compétition une blessure au genou gauche met fin à ses rêves », raconte son avocate. Il sombre dans une dépression avant de trouver finalement un métier qu’il aime, celui d’aide-soignant. Mais après seize ans d’exercice, sa blessure au genou le rend incapable de continuer, dans une profession où l’on est souvent debout. « Encore une fois, il est forcé de mettre fin à une activité qu’il aime », pointe son conseil. Une séparation amoureuse juste avant le confinement va finir de le faire retomber dans la dépression.
Avec Grindr, une application de rencontre pour les hommes homosexuels ou bisexuels, il en vient à découvrir « une autre facette de sa personnalité avec les soirées chemsex », continue son avocate. C’est lors de ces événements qu’il devient addict au 3-MMC. « Là c’est la réelle descente aux enfers, appuie-t-elle. Il ne peut pas faire autrement que de s’en procurer et de consommer, et ce avec de l’ecstasy et d’autres substances, dont les effets durent plusieurs jours. »
Un homme sans domicile et peu argenté
Avec seulement quelques euros en banque, on est loin de l’image d’un dealer qui cumulerait train de vie élevé et biens de luxe. « La 3-MMC a eu raison de lui » résume son avocate. Il a conscience d’être à un très haut niveau d’addiction. « Je m’en prends beaucoup, je me pique plusieurs fois par jour », avait-il déclaré à la police. Ces derniers temps ses revenus ont même baissé. « Au lieu de revendre vous vous l’injectez », conclut la présidente du tribunal.
Il est déjà suivi par la Case (centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues à Bordeaux) et le CEID (comité d’étude et d’information sur la drogue et les addictions). Fin 2023, il confie « avoir arrêté une semaine ou dix jours, ce qui est énorme pour moi. Je pense que ma famille va beaucoup m’aider. » C’est sa mère qui va l’héberger, le temps qu’il reprenne pied.
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