« Mon cher président, il va la tuer » : une jeune femme interpelle Emmanuel Macron sur les violences conjugales subies par sa mère

L’ordonnance de protection de sa mère n’a pas été renouvelée (illustration). LP/Stéphanie Forestier

En cinq jours seulement, la vidéo cumule quasiment deux millions de vues. Le 15 avril dernier, une utilisatrice dénommée « Broceliande » a posté sur TikTok une vidéo adressée à Emmanuel Macron, pour dénoncer l’inaction de la justice face à la question des violences conjugales.

Pendant plus de cinq minutes, face caméra, « Broceliande » lit la lettre qu’elle a envoyée au président de la République, qui a fait des violences faites aux femmes la « grande cause » de ses mandats. Elle y raconte l’histoire de sa mère, victime de violences conjugales par son ex-conjoint, qui vient de perdre son procès contre lui.

«Ã‚ Cher président, j’ai l’honneur de vous annoncer que ma mère a perdu son procès. Il y a un peu plus d’un an, ma sÅ“ur m’a appelé pour me dire que ma mère s’est fait agresser en bas de chez nous, par son ancien compagnon. Après des mois à craindre la séparation, elle a finalement trouvé le courage de le faire, et lui, après des mois à la supplier de revenir, il a vu que ça ne marchait pas. Alors un soir, il a attendu, caché toute la nuit en bas de chez nous, et alors qu’elle rentrait d’une fête entre amis, il l’a agressé », débute-t-elle.

« Il lui a promis que si elle ne revenait pas, il la tuerait »

«Ã‚ Cher président, cette nuit-là il ne l’a pas seulement agressée, il lui a aussi fait une promesse : cher président, il lui a promis que si elle ne revenait pas, il la tuerait, elle et peut-être même ses enfants », continue-t-elle. « Ça vous surprend ? Pas nous », répond-elle. Car l’ex-compagnon, selon la jeune femme, est « violent », « colérique », « obsessionnel », « alcoolique », possède de nombreuses armes à feu et un casier judiciaire.

«Ã‚ Je vous parle là d’un homme qui, il y a six ans, a scié le canon de son fusil (une technique permettant plus précis et plus puissant), et nous a pointées ma mère et moi pendant d’une crise de colère, hurlant qu’on méritait de mourir », poursuit-elle.

«Ã‚ Broceliande » passe ensuite en revue le quotidien cauchemardesque de la famille, terrifié par cet homme, qui reste parfois plusieurs heures en bas de leur domicile, « suit » sa mère et « la retrouve où qu’elle aille ». « Mon très cher président, pendant que vous dormez paisiblement, ma petite sÅ“ur fait des crises d’angoisse et des cauchemars où elle voit toute sa famille se faire tuer. »

La jeune femme dénonce également l’inaction des forces de l’ordre : « Quand ma mère appelle la police pour leur dire qu’il est garé en bas de la maison, en train de la suivre (…), on lui répond que la rue est publique et qu’il a le droit d’être là. »

« Vous n’écoutez pas les mortes, vous n’entendrez pas les vivantes »

Malgré un dossier composé de 37 pièces jointes, de plaintes, de témoignages et de main courante contre l’ex-compagnon de sa mère, la justice n’a pas renouvelé l’ordonnance de protection de cette dernière, valable six mois. « Un juge vient de décider de ne pas protéger une mère et ses enfants car peut-être qu’elle ment. Cher président, on ne parle pas là d’une condamnation mais d’une simple ordonnance de protection l’interdisant de s’approcher de nous ».

Selon « Broceliande », l’homme, lui, aurait monté un dossier de cinq pages décrivant son ex-compagne comme une « p**** », affirmant que l’une de ses belles-filles « pratiquerait de la magie noire ».

«Ã‚ Cher président, j’ai peur parce que chaque jour je vois le compteur des féminicides augmenter et depuis plus d’un an je ne peux m’empêcher de penser que j’y verrai un jour le nom de ma mère et de mes sÅ“urs », poursuit-elle. Et selon elle, « c’est toujours la même chose ». Malgré les plaintes, les menaces de mort, les alertes auprès des forces de l’ordre, ces femmes, victimes de féminicide, ont été « étranglées, battues à mort, poignardées, torturées, brûlées vives. Parce qu’on ne les a pas crues. Souvent, les assassins étaient connus des services de police », dénonce-t-elle.

Macron et Attal tagués par des internautes

La jeune femme conclut ensuite de manière poignante : « Mon cher président, il va la tuer. Il va le faire, peut-être demain, dans six mois ou dans un an. Il y en a qui attendent des années que ce soit le bon moment. » Si elle explique avoir hésité à s’exprimer, elle a décidé de le faire pour les autres victimes : « Cher président, je vous écris mais je n’attends rien de vous. Vous n’écoutez pas les mortes, vous n’entendrez pas les vivantes. »

La vidéo se termine avec un extrait d’un appel de sa mère sur le téléphone « grave danger » : « Un juge a décidé de faire annuler l’ordonnance de protection, qui était le seul rempart, fragile, qui me protégeait de ce monsieur (…) Je ne sais pas s’il faut amener en preuve ultime un corps, un cadavre, de moi-même ou d’un de mes enfants pour que la justice se rende compte de l’ampleur de ce que l’on vit et des conséquences de sa décision », explique-t-elle calmement.

La vidéo a suscité de très nombreuses réactions, plusieurs internautes ont tagué Emmanuel Macron et son Premier ministre Gabriel Attal sur la vidéo, espérant une prise en charge.