« Je n’y suis plus opposée » : une sénatrice LR se confie sur son vote pour la constitutionnalisation de l’IVG

« je n’y suis plus opposée » : une sénatrice lr se confie sur son vote pour la constitutionnalisation de l’ivg

«Ã‚ Je n’y suis plus opposée » : une sénatrice LR se confie sur son vote pour la constitutionnalisation de l’IVG

«Â Gisèle Halimi par ses mots avait fait changer la loi. Je veux aujourd’hui que la force de ce message nous aide à changer notre Constitution afin d’y graver la liberté des femmes à recourir à l’IVG pour assurer solennellement que rien ne pourra entraver ou défaire ce qui sera ainsi irréversible, pour adresser aussi un message universel de solidarité à toutes les femmes qui voient cette liberté bafouée. » Le 8 mars 2023, Emmanuel Macron a annoncé un projet de révision constitutionnelle pour intégrer dans le texte fondateur de la Ve République l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Après une adoption du texte à l’Assemblée nationale en décembre dernier, l’inscription de liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse sera débattue le mercredi 28 février au Sénat.

Mais dans la Haute Chambre du Parlement, les sénateurs de droite ne sont pas tous en faveur de ce changement. Le président du Sénat, Gérard Larcher, avait notamment exprimé récemment des « réserves » à ce propos. « La Constitution n’est pas un catalogue de droits sociaux et sociétaux », avait-il déclaré. Certains craignent que ce texte ne soit pas adopté par les sénateurs. Mais depuis plusieurs semaines, des sénateurs LR, qui avaient voté contre cette inscription par le passé, changent d’avis. La sénatrice LR de Seine-Maritime, Agnès Canayer, également rapporteur de ce texte de révision constitutionnelle, se confie au Point sur son changement de position.

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Le Point : Que pensez-vous aujourd’hui de cette inscription dans la Constitution de la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse ?

Agnès Canayer : Aujourd’hui, je ne suis plus opposée à l’inscription de la liberté de recourir à l’IVG dans la Constitution. De fait, la donne a changé par rapport aux premiers débats que nous avions eus au Sénat en octobre 2022 et en février 2023.

Or, je pense que, à quelques bémols près, la formulation proposée aujourd’hui par le gouvernement, qui reprend celle adoptée au Sénat, n’engendre pas de réelles difficultés. C’est pour cette raison que nous pouvons considérer aujourd’hui que l’inscription ne modifiera pas fondamentalement l’équilibre des choses.

Je pense d’ailleurs que cette révision constitutionnelle n’apporte rien de nouveau. Elle inscrit de manière symbolique l’IVG dans la Constitution. C’est un combat louable que portent certaines féministes, certains hommes et certaines femmes, mais cette inscription dans la Constitution ne modifiera pas fondamentalement la garantie offerte à cette liberté, qui est par ailleurs une liberté fondamentale que le Conseil constitutionnel a toujours défendue en tant que telle.

Personnellement, je ne suis pas convaincue par la formulation proposée par le gouvernement et que le concept de liberté « garantie » soit utile. Nous ne voyons pas très bien en droit quels sont les contours de la garantie. Dès lors que les contours sont incertains, je pense qu’il est de notre responsabilité de ne pas prendre ce risque en modifiant la Constitution en ce sens. Donc nous la modifions, mais je proposerai de retirer le concept de « garantie » parce qu’aujourd’hui nous ne savons pas s’il crée ou non un droit opposable.

Vous avez voté par le passé contre l’inscription de l’IVG dans la Constitution. Pourquoi aujourd’hui avez-vous changé d’avis ?

Je pense toujours que la constitutionnalisation de la liberté de recourir à l’IVG n’est pas utile. Ce n’est pas elle qui va garantir véritablement l’accès à l’interruption volontaire de grossesse pour l’ensemble des femmes sur le territoire. Aujourd’hui, nous avons encore un certain nombre de difficultés. Des femmes ne peuvent pas avoir accès à un médecin, ne sont pas suffisamment sensibilisées, ne sont pas suffisamment informées ou n’ont pas reçu suffisamment d’éducation sexuelle, et donc l’IVG subit encore aujourd’hui un certain nombre de freins, et c’est là-dessus qu’il faut se battre. L’inscription à la Constitution ne changera pas et ne modifiera pas la donne.

À LIRE AUSSI Droit à l’IVG dans la Constitution : un compromis en vue ? Néanmoins, aujourd’hui, le sujet ne revient pas au Sénat dans le même contexte. C’est un projet de loi d’initiative gouvernementale et non une proposition parlementaire. En conséquence, dans le cadre de la procédure de révision de la Constitution à l’article 89, nous ne sommes pas obligés de recourir au référendum, mais à un Congrès [le Congrès du Parlement est la réunion de l’Assemblée nationale et du Sénat, NDLR]. J’étais particulièrement opposé à ce qu’un référendum soit organisé sur ce sujet clivant. D’autre part, le gouvernement a globalement repris la proposition du Sénat de l’inscrire à l’article 34 de la Constitution, qui détermine le domaine de la loi. Or, ce 7e alinéa proposé ne modifie rien, puisque d’ores et déjà le Parlement peut déterminer les garanties relatives aux libertés fondamentales dont fait partie l’IVG. Donc, c’est une constitutionnalisation qui sera avant tout symbolique. Et, j’entends aujourd’hui la demande forte de la société, des personnes avec qui j’échange, ainsi je pense qu’à condition que la formule soit telle que proposée par le gouvernement, au bémol près de la notion de liberté « garantie », je ne vois pas d’obstacle aujourd’hui à ce que cette liberté soit inscrite dans la Constitution.

Pourquoi êtes-vous opposé à un référendum pour l’inscription dans la Constitution de l’avortement ?

C’est un sujet très clivant et je pense que notre société est aujourd’hui suffisamment fracturée et qu’il n’y a pas besoin de rajouter de fracture à la fracture. Nous sommes plutôt dans la nécessité de créer la cohésion, de créer le sentiment d’appartenance commun et pas véritablement de s’opposer les uns contre les autres.

Ce sont des échanges avec vos proches qui vous ont aussi fait avancer sur la question ?

Oui, mais il n’y a pas que moi. Mes collègues parlementaires racontent souvent qu’ils vivent des pressions amicales ou familiales. Nous subissons tous, c’est vrai, cette forme de pression.

Néanmoins, nous sommes des parlementaires. L’important, c’est de légiférer en ayant à la fois conscience de notre rôle, mais aussi d’entendre ce qui se dit autour de nous. Nous ne sommes pas des élus hors sol, déconnectés, loin des territoires, loin de nos électeurs. C’est la raison pour laquelle il est important d’avoir des échanges, que ce soit dans l’environnement familial ou amical, mais aussi avec mes électeurs.

Mais voter en faveur de l’inscription de l’IVG dans la Constitution, c’est mon choix. En tant que législateur, nous ne sommes pas là pour légiférer sous le coup de la pression, nous ne sommes pas là pour légiférer en fonction des préférences de notre entourage.

Mais tous ces échanges sont là pour éclairer notre réflexion et nous devons, et surtout a fortiori à partir du moment où nous modifions la Constitution, le faire en responsabilité en tant que représentant de la nation.

Appelez-vous vos collègues Républicains à voter en faveur de l’inscription de l’avortement à la Constitution ?

C’est un débat de société. Chacun votera en fonction de sa conscience et libre de ses choix. Moi j’entends ceux qui considèrent qu’il n’est pas utile de l’inscrire dans la Constitution et qui continueront à s’y opposer. C’est un choix qui est respectable. Cette inscription à la Constitution est avant tout symbolique.

À LIRE AUSSI IVG dans la Constitution : l’avortement en France en chiffresAlors comme tout symbole, nous pouvons prendre cette constitutionnalisation dans un sens ou dans l’autre. Soit, considérant que c’est symbolique, elle est inutile, soit que comme elle n’a pas d’enjeu direct, autant l’accepter.

Dimanche, une infographie partagée par la chaîne CNews a assimilé l’IVG à la première cause de mortalité dans le monde. Considérez-vous que l’IVG est en danger en France ?

Je ne considère pas que l’IVG est en danger aujourd’hui. Il y a toujours eu des groupuscules opposés, qui se sont toujours battus contre l’avortement et continuent à le faire via les réseaux sociaux, etc. Mais aujourd’hui, aucun parti politique, aucun groupe parlementaire ne remet en cause la liberté fondamentale de recours à l’IVG, qui est une vraie liberté fondamentale à laquelle nous sommes très attachés depuis que Simone Veil l’a inscrite dans le patrimoine juridique français.

Mais s’il y a une vraie remise en question, effectivement, il faut se battre contre ces opposants. Mais l’inscription à la Constitution n’est pas une solution qui inscrit l’IVG dans le marbre. Une Constitution est toujours révisable, ce n’est pas une garantie absolue et définitive. Tout régime peut renverser une Constitution et cela s’est déjà produit. Donc il faut plutôt combattre pied à pied ses opposants et défendre chèrement cette liberté, mais cette constitutionnalisation ne sera pas une garantie absolue.

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