Déflation à gogo et dépendance extérieure : les faux-semblants du fort rebond de la croissance chinoise

déflation à gogo et dépendance extérieure : les faux-semblants du fort rebond de la croissance chinoise

La chaîne d’assemblage de véhicules à énergie nouvelle dans une usine de la start-up chinoise Leapmotor, le 1er avril 2024 à Jinhua.

La Chine a enregistré sur le premier trimestre 2024 une croissance inespérée. Mais derrière la bonne nouvelle, des mécanismes déflationnistes craints par la concurrence à l’étranger, et un marché intérieur toujours fragile.

Un nouveau “choc” chinois ? À peine plus d’un an après la fin de la politique “Zero Covid”, qui a mis l’économie chinoise sur les rotules, les décisionnaires de Pékin ont annoncé début mars, les dents serrées, une croissance économique à 5% pour 2024.

Un objectif unanimement qualifié d'”ambitieux” par les observateurs internationaux. Ce bilan “ne sera pas facile à atteindre” a reconnu le Premier ministre chinois Li Qiang lui-même. Un mois plus tard, force est de constater que la Chine est en passe de relever le défi… En chiffres, tout du moins.

Comme expliqué par Les Échos, les autorités du pays ont ainsi fait état mardi 16 avril d’une progression inattendue du PIB de 5,3 % au premier trimestre, une croissance plus soutenue que prévue, et symboliquement située au-delà des 5,2 % de l’ensemble de 2023.

La production industrielle est centrale dans ce nouveau modèle. Elle progresse de 6,1 % sur trois mois comparé à la même période en 2023. Et l’industrie de haute technologie s’en est encore mieux sortie, avec une croissance de 7,5 %.

La Chine ne se contente plus d’exporter des produits bas de gamme à bas prix : désormais les usines chinoises produisent davantage de véhicules, de machines et d’appareils électroniques grand public que l’économie nationale n’est en mesure d’en absorber, détaillions-nous début mars.

En réaction, le volume des exportations chinoises a augmenté de 14 % au premier trimestre par rapport à l’année précédente, note pour The Economist, Zhiwei Zhang, de Pinpoint Asset Management.

Problème : cet excès de capacité pourrait bien être dommageable à la Chine elle-même.

Dépendance aux exportations

Ainsi, note le média économique, le système chinois, tout entier tourné vers une exportation alimentée par une baisse des prix et la compétitivité de la monnaie, nourrit une dépendance extrême à l’égard des acheteurs étrangers, qui peinent à absorber son énorme production. En témoignent les immenses parkings fantômes de voitures électriques chinoises aux portes de l’Europe.

Une situation qui pourrait entraîner dans un avenir proche un réflexe protectionniste de la part des partenaires commerciaux, qui craignent de voir leurs marchés inondés de produits chinois à bas prix, symptômes d’un nouveau “choc chinois” et de ses effets désinflationnistes, néfastes pour la concurrence nationale.

En 2016, plusieurs économistes estimaient que les États-Unis avaient perdu plus de deux millions d’emplois entre 1999 et 2011 à cause des importations chinoises. Et l’histoire tend à se répéter, estime The Wall Street Journal.

Prenons l’exemple des voitures électriques : durant les deux premiers mois de 2024, la Belgique, le Royaume-Uni, l’Allemagne et les Pays-Bas ont été les principales destinations des exportations chinoises de voitures à batterie, de véhicules hybrides rechargeables et de véhicules à hydrogène, rappelions-nous récemment. Le 16 janvier, c’est le chancelier allemand en personne, en déplacement à Pékin, qui a fait part de ses craintes concernant la “surcapacité” chinoise, alimentée par les investissements chinois massifs dans certains secteurs industriels.

La crainte de la surcapacité chinoise

Quelques jours plus tôt, la “surcapacité” chinoise avait été abordée par la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen, rappellent Les Echos. “La surcapacité n’est pas un problème, mais elle s’est accrue et nous voyons de nouveaux risques émerger”, a-t-elle précisé. Washington “n’acceptera pas” le déferlement de produits chinois vendus à perte sur le marché mondial, comme lors du premier “choc chinois”.

Si Janet Yellen n’a pas fait mention de taxes sur les importations chinoises aux États-Unis, elle a déclaré qu’elle n’excluait pas de prendre certaines mesures pour protéger les secteurs des véhicules électriques, des batteries et des panneaux solaires, entre autres, de la compétition chinoise.

La crainte de la “surcapacité” a été dans la foulée balayée comme “des accusations sans fondement” par le ministre Wang Wentao, en déplacement à Paris, selon l’agence d’État Chine Nouvelle. Selon lui, la croissance rapide du secteur vient de l’innovation et des chaînes d’approvisionnement.

Mais l’utilisation des capacités de productions chinoises s’en ressent : elle a chuté de 73,8 % au premier trimestre 2024, relève The Wall Street Journal, son niveau le plus bas, si l’on exclut le premier trimestre 2020 marqué par la pandémie, depuis au moins 2015.

La baisse est particulièrement marquée dans le secteur de l’industrie automobile, où les taux d’utilisation sont tombés sous la barre des 65 % au premier trimestre, bien en deçà de leur précédent plancher (hors premier trimestre 2020) de 69,1 % à la mi-2016. En examinant de plus près la production industrielle, on voit que la progression globale de 6,1% sur le premier trimestre 2024 cache en réalité une augmentation de 7% en janvier et février, et une autre, moins glorieuse, de 4,5% en mars.

Un marché intérieur fragilisé

De surcroît, note The Economist, la dépendance chinoise à l’égard des marchés étrangers est le reflet d’un marché intérieur encore fragile, marqué par une baisse des ventes et une confiance des consommateurs faible.

Ainsi le marché immobilier continue de chuter, inexorablement. Le prix des appartements neufs dans 70 des plus grandes villes chinoises a perdu 2,2 % en moyenne en mars par rapport à l’année précédente, la plus forte baisse depuis 2015, selon l’agence de presse Reuters. Cette économie déprimée entraîne avec elle les secteurs des matériaux de construction et des appareils ménagers.

La baisse des prix, synonyme de compétitivité à l’étranger, pourrait aussi signifier sur le marché intérieur une baisse des revenus, voire du taux d’emploi. Des risques qui ne semblent pas pour l’instant modérer l’appétit chinois pour la déflation et la déflagration des exportations.

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