Les agriculteurs bloquent plusieurs points de passage entre la Pologne et l’Ukraine, via la route et le rail. Reuters/Patryk Ogorzalek/Agencja Wyborcza.pl
En Pologne, la boussole de la colère des agriculteurs pointe vers le Sud-Est. Ce mardi, au poste-frontière de Medyka, les paysans polonais ont déversé du blé ukrainien extrait de deux wagons de marchandises sur les rails. Cette action s’ajoute au blocus de la frontière instauré par les agriculteurs, ce qui alimente la crise entre les deux voisins.
Quelles actions ont entrepris les paysans polonais ?
Le 9 février dernier, les agriculteurs polonais ont commencé à bloquer différents points de passage de la frontière entre l’Ukraine et la Pologne. Les manifestations ont grimpé en intensité deux jours plus tard, lorsque les paysans ont déversé sur les routes des céréales ukrainiennes destinées à l’Union européenne après avoir arrêté un camion qui traversait la frontière.
La situation s’est compliquée de nouveau ce mardi : les paysans polonais ont cette fois ciblé un train. Selon un porte-parole de la police Przemysl, un groupe de manifestants s’est engagé sur la voie ferrée pour « quelques minutes ». Temps exploité pour déverser « une petite quantité de céréales sur les voies » de deux wagons de marchandises ukrainiens.
Pourquoi les agriculteurs polonais s’en prennent-ils à l’Ukraine ?
S’ils ont bloqué une centaine de routes tout en empêchant les camions ukrainiens de pénétrer en Pologne, c’est pour protester contre la « concurrence déloyale » qu’exerceraient leurs homologues ukrainiens, non-soumis aux réglementations européennes. Les paysans polonais, comme l’ont manifesté les agriculteurs français, dénoncent les importations agroalimentaires ukrainiennes qu’ils jugent « incontrôlées ». Ils réclament aussi une révision des règles européennes.
Exemple à Ryki, à 100 km au sud-est de Varsovie. Parmi les dizaines de tracteurs conduits pour bloquer la voie rapide S17 menant à Lublin et la frontière ukrainienne, celui de Tomasz Golak. « Je suis là pour qu’on abandonne les restrictions introduites par l’Union européenne sur la mise en jachère, et le Pacte vert, et surtout pour que ces produits ukrainiens cessent d’affluer », a lancé à l’AFP ce propriétaire d’une quinzaine d’hectares.
Des conséquences sur la guerre ?
Volodymyr Zelenksy a relié ces blocus à l’invasion russe. Le contexte à « la frontière avec la Pologne ne peut être considéré comme normal ou ordinaire », a tonné lundi le président ukrainien. Selon lui, cela illustre « l’érosion de la solidarité au quotidien ». Si la Pologne a compté parmi les plus fidèles soutiens à Kiev depuis le début de la guerre, « ce n’est pas une question de céréales, mais plutôt de politique », a considéré Zelensky, assurant que seules 5 % des exportations agricoles de son pays traversaient la frontière polonaise.
Le ministre ukrainien des Infrastructures a recensé lundi six postes-frontières bloqués du côté polonais. Une « menace directe pour la sécurité d’un pays contraint de se défendre », a sifflé Oleksandr Kubrakov sur Facebook. « Ils bloquent tout. Certains camions transportent du carburant. Il y a quelques jours, des manifestants ont empêché le passage de plusieurs camions chargés d’armes », a-t-il encore assuré à la télévision publique. Selon un responsable polonais, 600 camions attendaient de passer en Ukraine au poste-frontière de Dorohusk lundi.
Le secteur agricole ukrainien a été bouleversé par l’invasion russe : la guerre a bloqué de nombreux sites d’exportation par la mer Noire tout en rendant inutilisable des terres. Le trafic routier avec la Pologne a donc été crucial pour que les entreprises ukrainiennes continuent à exporter. Mais cette situation a provoqué la colère des agriculteurs et des transporteurs polonais, qui se plaignent des tarifs ukrainiens, avec lesquels ils ne peuvent rivaliser.
Quelles réactions des autorités ?
Le ministre polonais de l’Agriculture avait fait profil bas à la suite du premier déversement de grains. « Au nom des agriculteurs polonais, je m’excuse pour un tel acte de désespoir et demande de la compréhension pour leur situation extrêmement difficile », avait déclaré Czeslaw Siekierski via un communiqué publié le 12 février. Le parquet polonais avait annoncé avoir « ouvert une enquête » sur la violation de la sécurité douanière et la destruction de biens, des délits passibles d’une peine maximale de cinq ans de prison.
L’incident avait provoqué une vague d’indignation en Ukraine. Un nouveau flot de mécontentement a afflué cette semaine. Le ministre ukrainien des Infrastructures, Oleksandr Koubrakov, a qualifié l’incident céréalier de « provocation politique visant à diviser nos nations ». « Depuis deux ans, les agriculteurs ukrainiens récoltent des céréales vêtues de gilets pare-balles, sous les tirs de roquettes et la menace des mines », a-t-il écrit sur X.
Mais les tensions datent déjà de plusieurs mois. Des routiers polonais avaient installé un blocus similaire de novembre à début 2024. Surtout, la Pologne avait interdit les importations de céréales ukrainiennes sous le précédent gouvernement nationaliste du PiS, mais a maintenu cette interdiction après l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle coalition pro-UE en octobre 2023.
À la mi-février, Volodymyr Zelensky avait demandé à son gouvernement de « négocier en urgence » une sortie de crise sur les produits agricoles avec le nouveau gouvernement libéral de la Pologne, afin de « préserver des relations de bon voisinage » car les deux nations possèdent un « ennemi commun à Moscou ». Donald Tusk, Premier ministre polonais, avait appelé à trouver un compromis.
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