Ce ver marin aux yeux énormes pourrait-il un jour permettre à l'Homme de voir les rayons UV ?

Le vanadis, ver marin polychète, détient-il le secret d’une vue parfaite ?

Des chercheurs danois et suédois ont étudié en détail le ver marin vanadis. Intrigués par ses yeux énormes, ils ont cherché à savoir ce qu’ils lui apportaient. Il serait en fait capable de voir les lumières UV et donc de communiquer à travers elles.

Il en est presque ridicule. Le vanadis, une espèce de ver marin polychète (dont les côtés sont couverts de soies, qui lui permettent de nager), est tout petit et transparent. Mais ses yeux, deux fois plus gros que sa tête, sont rouges et massifs. Aussi risible qu’il puisse paraître, ce ver pourrait nous donner des informations précieuses sur la manière dont l’évolution fonctionne.

Des chercheurs des universités de Copenhague et de Lund ont analysé avec grande attention les caractéristiques du vanadis. Ils pensent avoir découvert que ces vers nocturnes, qui vivent au large de l’île italienne de Ponza, parviennent à communiquer entre eux en utilisant des rayons UV visibles uniquement par leur propre espèce. Les scientifiques ont fait part de leurs recherches dans la revue Current Biology.

Des yeux immenses qui ne correspondent pas au système neuronal basique du ver marin

Ce qui a d’abord intrigué les chercheurs, c’est le caractère nocturne du ver marin. Pourquoi avoir besoin d’yeux aussi exorbités pour vivre dans les eaux plongées dans le noir ? Les scientifiques suédois et danois ont donc cherché à savoir si le vanadis avait une excellente vision. Et c’est le cas, mais bien plus encore.

Le ver marin utilise ses immenses globes oculaires pour suivre les mouvements de tout petits objets ou animaux. “C’est intéressant car cette capacité est généralement réservée à nous, les Vertébrés, aux Arthropodes (araignées, insectes, etc.) et aux Céphalopodes (pieuvres). C’est la première fois qu’une vision aussi nette est démontrée chez un autre groupe, note Anders Garm, l’un des co-auteurs de l’étude, à phys.org. La vision de ce ver est semblable à celles des souris ou des rats, alors qu’il s’agit d’un organisme au cerveau minuscule.” Les chercheurs ont donc tenté de comprendre comment un système neuronal à l’apparence simple pouvait donner naissance à des fonctions très complexes.

Les vanadis pourraient voir et être vus dans le noir

Le fait que le vanadis soit transparent sur l’ensemble du corps sauf au niveau des yeux est particulièrement intéressant. Pour les chercheurs, cela signifie qu’au cours de l’évolution de l’espèce, les yeux du ver, qui fonctionnent grâce à la lumière, ont dû devenir opaques. Mais cela le rend plus visible et donc plus vulnérable face aux prédateurs. Selon toute vraisemblance, ont pensé les chercheurs, le vanadis a dû tirer des bénéfices de cette évolution.

L’un de ces profits est le fait d’avoir développé un langage unique en utilisant ses yeux. “Notre théorie, c’est que les vers sont bioluminescents et communiquent à travers la lumière. Si leur bioluminescence était bleue ou verte, ils seraient facilement visibles par les prédateurs. Alors que s’ils utilisent de la lumière UV, ils restent invisibles pour les autres animaux. Nous pensons donc qu’ils ont développé une vision très précise des UV pour avoir un langage secret, notamment dans un but reproductif”, souligne Anders Garm.

Si cette hypothèse est avérée, elle pourrait intéresser les industriels en vue de créer une technologie qui permettrait à l’homme de voir les rayons UV. Les vanadis renferment encore certainement de nombreux secrets. Ils pourraient même permettre de répondre à une question primordiale : les yeux tels que nous les connaissons ont-ils évolué en une seule fois ou en plusieurs étapes ? La réponse doit peut-être être analysée indépendamment pour chaque espèce qui peuple la planète.