Edito | Justice pour l’Ukraine
Le 24 février approche, et avec lui un anniversaire qui fait froid dans le dos. Il y a deux ans, déjà, Vladimir Poutine lançait sur l’Ukraine son « opération spéciale » à coups de chars, d’obus et d’exactions contre des gens comme vous et moi : une guerre sale, sinistre, sanglante, qui prolongeait à l’échelle de tout un pays l’annexion de la Crimée et l’agression du Donbass opérées en 2014. Une guerre de prédation massive que les Ukrainiens, après les épisodes antérieurs, appellent « invasion de grande ampleur », et qui, à travers eux, vise clairement les modes de vie des démocraties occidentales.
Robert Badinter, qui nous a quittés à 95 ans, ne se méprenait pas sur cette effroyable entreprise. Il est significatif que l’un des derniers combats de ce grand homme épris de justice, à qui nous devons l’abolition de la peine de mort et la dépénalisation de l’homosexualité en France, ait été de démontrer, dans « Vladimir Poutine, l’accusation » (avec Bruno Cotte et Alain Pellet, Fayard, 2023), pourquoi et comment il devrait être « juridiquement possible » de poursuivre le maître du Kremlin devant un tribunal international, pour « crime d’agression »,« crimes de guerre » et « crimes contre l’humanité ».
La mort de Robert Badinter
Las, deux ans après le 24 février 2022, ce procès est loin de s’ouvrir. Les livraisons d’armes occidentales promises à Kiev ont souvent pris du retard. La contre-offensive ukrainienne a en partie échoué. Les combats, qui auraient tué à ce jour 190 000 soldats des deux côtés et environ 10 000 civils – ukrainiens dans leur immense majorité – font toujours rage. Et les troupes du président Zelensky, qui vient de changer de chef d’état-major, sont épuisées. Pourtant le peuple ukrainien résiste, admirablement. Comment fait-il, après plus de sept cents jours de guerre ? C’est ce que « l’Obs » a voulu raconter en ouvrant ses pages à ceux qui, parce qu’ils savent les mots pour dire ce qu’ils éprouvent dans leur chair, sont les plus à même d’exprimer les réalités crues du combat, les misères du quotidien, l’amour et l’amitié sous les bombes, l’espoir malgré tout : les écrivains d’Ukraine.
Ces écrivains, il faut les lire, pour comprendre ce que nos contemporains vivent à l’autre bout de notre continent. Pour ne pas les oublier. Pour continuer à les soutenir. Car tandis que le conflit israélo-palestinien détourne l’attention vers d’autres horreurs, Poutine pousse ses pions : sur le front, où il envoie sans état d’âme des dizaines de milliers de Russes au casse-pipe ; mais aussi partout où il peut déployer sa propagande, jusque dans un entretien extrêmement complaisant recueilli par le journaliste star de l’extrême droite américaine Tucker Carlson. En lui affirmant qu’une défaite de son armée est « impossible », Poutine sait ce qu’il fait : sa guerre se mène aussi dans des opinions publiques occidentales de plus en plus poreuses aux nationaux-populismes traditionnellement favorables à Moscou.
Robert Badinter l’avait bien compris aussi
Le Kremlin trouve ainsi des alliés au cœur même du Sénat américain, où des républicains bloquent depuis des semaines le plan d’aide à l’Ukraine présenté par Joe Biden. C’est sur ordre de Donald Trump, qui menace par ailleurs, s’il est élu à la Maison-Blanche en novembre, d’« encourager la Russie à faire ce qu’elle veut » contre les pays qui, selon lui, ne paient pas leurs « dettes » à l’Otan. L’Europe se retrouvera-t-elle seule, dans quelques mois, face à un impérialisme russe devenu fou ? Le rêve d’une défense commune, né dans les cendres de 1945, peut-il encore se réaliser ? Dans un moment où les mouvements d’extrême droite pourraient venir renforcer les positions prorusses du leader hongrois Viktor Orbán, c’est l’un des enjeux existentiels de l’élection européenne qui vient, le 9 juin.
Il ne faut pas se tromper. Il ne s’agit pas seulement ici de défendre des personnes en danger, la souveraineté d’un pays, ou même le droit international sans lequel la loi du plus fort ferait constamment peser sur l’humanité le risque d’une explosion de violence. C’est, plus profondément encore, pour un socle de valeurs promettant la liberté et la paix à chacun de nous que les Ukrainiens luttent dans le sang, le froid et les larmes. Robert Badinter l’avait bien compris aussi. Et deux ans après le 24 février 2022, leur courage nous oblige plus que jamais.
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