Dans sa maison de Grèges, près de Dieppe (Seine-Maritime), Jean-Paul Villain a enfilé sa veste de survêtement des années 1970 pour présenter sa médaille de champion d’Europe à Helsinki (à droite) et sa médaille d’or des Jeux méditerranéens d’Izmir, deux titres remportés en 1971, son année la plus faste. LP/ Laurent Derouet
Le 5 juillet prochain, la flamme olympique fera escale dans le port de Dieppe (Seine-Maritime). Vingt-quatre coureurs, parmi les 150 à l’échelle du département, se relaieront pour lui faire traverser la ville. Mais parmi eux, pas de trace d’une figure majeure du sport local et national, l’athlète Jean-Paul Villain, spécialiste du 3000 mètres steeple, une discipline pour laquelle il a défendu les couleurs françaises aux Jeux olympiques à trois reprises (Mexico 1968, Munich 1972 et Montréal 1976).
Dans la cité Ango, ils sont nombreux à se demander pourquoi le champion d’Europe à Helsinky en 1971, quatre fois champion de France, n’a pas été retenu. « C’est bizarre. Il n’y a pas plus Dieppois que lui. Et quand même trois JO, ce n’est pas rien. On manque de mémoire ici », remarque un habitant à la terrasse du « Tout va bien » en refermant le quotidien régional Paris-Normandie qui a fait sa Une il y a quelques jours sur cette absence remarquée.
Dans la longère qu’il a lui même retapée à Bresles (Seine-Maritime), tout à côté de Dieppe, Jean-Paul Villain, 77 ans, lui, ne veut pas en rajouter, même s’il assure qu’il ne se passe pas une journée sans qu’on lui en parle : « Ça m’aurait fait plaisir, c’est sûr. Mais tous ceux qui ont été choisis le méritent aussi ». Assis à côté de « sa » Janine avec qui il a eu cinq enfants, il préfère revenir sur cette décennie durant laquelle ce gamin né au Pollet, le quartier des pêcheurs, s’est fait une place dans le demi-fond français, sans jamais renier ni ses origines modestes, ni son caractère bien trempé. « Quand j’arrivais sur la piste, je donnais tout pour être le meilleur, avec hargne mais honnêteté. C’est vrai que je ne me suis jamais laissé faire. Et si je ne suis pas rancunier, je n’ai pas la mémoire courte… », prévient celui qui, au fil de sa carrière, s’est forgé de solides amitiés, mais aussi quelques inimitiés. Ce qui explique peut-être que son nom n’ait pas été retenu. « Je ne sais pas. Je n’espère pas… », élude-t-il.
Là où tout s’est accéléré pour lui, ce sont les JO de Mexico. Ceux du record à la longueur de Beamon, du 400 mètres de Colette Besson et des poings levés des Américains Smith et Carlos. « J’avais 22 ans. J’en ai pris plein les yeux ». A l’évocation de ces souvenirs, parfois ses yeux s’embuent, mais ses mains s’animent toujours au rythme de ses foulées. C’est là-bas, dans ce pays si exotique pour lui à l’époque, que le talent de Jean-Paul Villain éclate à la face du monde. Il remporte sa série devant de sacrés clients et bat même la meilleure performance mondiale en altitude à cette occasion.
L’homme au maillot noir était redevenu marin-pêcheur
« J’avais décidé de partir devant et de voir ce que ça donnait. Le temps que les autres comprennent ce que je faisais, j’avais gagné et j’étais qualifié pour la finale. » Il la terminera 9e, encore déçu aujourd’hui de ne pas avoir eu l’audace de rééditer la tactique qui l’avait conduit jusque-là. « J’ai sans doute eu le tort d’écouter les conseils de l’entraîneur national qui m’avait dit de me caler dans les pas d’un des favoris, le Russe Kudynskyy. Seulement, au bout de 400 mètres, il a abandonné et moi je me suis retrouvé au milieu de tout le monde sans trop savoir ce que je devais faire… » Qu’àcela ne tienne. A son retour àDieppe, ils sont des centaines àvenir l’accueillir àla gare, lui et son grand sombrero, heureux de pouvoir célébrer l’enfant du pays.
Contemporain de deux futurs ministres des sports, Roger Bambuck et Guy Drut, l’homme au maillot noir n’a jamais vraiment raccroché les pointes, mais s’est éloigné du milieu, devenant même marin-pêcheur avant de marcher sur les traces de son père ferrailleur. Aujourd’hui, il « trottine » encore un peu lorsque son physique le lui permet. Encore en forme, il n’hésite d’ailleurs pas à enfiler la veste de survêtement de l’équipe de France qui date des années 1970, à l’heure de poser pour la photo. Un témoignage vintage qui n’aurait pas dépareillé avec la flamme olympique à la main. Mais qui n’a que peu de chance de ressortir du placard.
Du côté du département de Seine-Maritime, qui a oeuvré à ce passage de la flamme (en finançant notamment le ticket d’entrée à hauteur de 150 000 €), on dément toute volonté d’éviction. « Pour notre part, nous n’avions que six candidats à proposer, explique la collectivité. Evidemment, la liste de ceux qui auraient mérité de la porter était bien plus longue. » Quant aux autres relayeurs, ils sont choisis par des sponsors (Caisse d’épargne, Coca-cola, etc…) et le Comité d’organisation. « Mais il y aura d’autres moyens d’honorer des personnalités comme Jean-Paul Villain en lien avec les municipalités traversées », indique le Département. Pas sûr que le principal intéressé soit partant. « On m’a proposé de venir voir l’arrivée de la flamme au Havre, en tribune, avec les officiels, reconnaît le Dieppois. Mais je n’irai pas. Je n’ai pas l’âme d’un figurant. Les Jeux Olympiques, j’ai toujours préféré y participer. »
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