En Afrique du Sud, le président réélu Cyril Ramaphosa prépare un gouvernement de coalition
En Afrique du Sud, le président réélu Cyril Ramaphosa prépare un gouvernement de coalition
Malgré le revers subi par son camp aux législatives, Cyril Ramaphosa a été réélu président de l’Afrique du Sud ce vendredi 15 juin. Il travaille à présent à constituer un nouveau gouvernement de coalition, après que son parti, le Congrès national africain (ANC), a trouvé un accord inédit avec la principale formation d’opposition, l’Alliance démocratique (DA), plus libérale.
Les Etats-Unis, la Chine, l’Ukraine, la Russie, le Zimbabwe voisin et la Commission européenne ont félicité samedi Cyril Ramaphosa, qui a obtenu la veille 283 voix, loin devant l’autre candidat Julius Malema du parti radical de gauche EFF, qui n’a recueilli que 44 voix.
L’investiture du chef de l’Etat, 71 ans, devrait se dérouler mercredi à Pretoria, selon une source gouvernementale. « C’est un jour historique » et « le début d’un nouveau chapitre de construction, de coopération », a commenté vendredi le dirigeant de la DA, John Steenhuisen.
« En Afrique du Sud, l’ANC n’est plus un parti tout-puissant »
Cyril Ramaphosa, ancien syndicaliste ayant fait fortune dans les affaires avant de revenir à la politique, a affiché la semaine dernière une franche décontraction, alors qu’il menait des négociations serrées en coulisses.
L’ANC s’essaye à la coalition gouvernementale
Les élections législatives fin mai ont marqué un tournant historique pour l’Afrique du Sud, mettant fin à trente ans d’hégémonie de l’ANC, parti de Nelson Mandela et qui a défait le régime honni de l’apartheid. Il a perdu pour la première fois sa majorité absolue au Parlement.
Selon l’ANC, le président Ramaphosa devrait annoncer un « gouvernement d’union nationale inclusif » comprenant plusieurs formations politiques. Le parti s’est dit « prêt à mettre de côté [les] divergences politiques, à trouver des moyens innovants pour travailler ensemble dans l’intérêt de notre nation ».
Le futur gouvernement va graviter « autour du centre », entre l’ANC, qui reste majoritaire avec 159 des 400 députés, la DA (87 sièges) et le parti nationaliste zoulou Inkhata (IFP, 17 sièges). D’autres plus petites formations devraient aussi être impliquées.
John Steenhuisen de la DA a estimé que ce gouvernement multipartis est « la meilleure opportunité » pour le pays « d’obtenir la stabilité et une bonne gouvernance propre », loin de la corruption qui a entaché l’ANC ces dernières années. Il a précisé que l’attribution de postes de ministres n’était pas encore tranchée. « Nous parlons valeurs et principes d’abord, postes ensuite », a-t-il ajouté.
Un gouvernement sans la gauche
Depuis plusieurs jours, une troïka ANC-DA-IFP s’était dessinée, en dépit de tiraillements sur la gauche de l’ANC, qui voyait d’un mauvais œil une alliance avec le parti DA, apprécié par le monde des affaires mais qui reste largement perçu comme le parti des Blancs et opposé au poids des aides sociales sur le budget notamment.
En Afrique du Sud, l’héritage gâché de Mandela
Le dirigeant de l’IFP, le parti nationaliste zoulou, avait justifié mercredi sa participation au futur gouvernement par le besoin de « stabilité » pour répondre aux difficultés des Sud-Africains, plombés par un chômage endémique, de fortes inégalités et des coupures de courant récurrentes.
Plus tôt, le président Ramaphosa avait invité tous les partis à « travailler ensemble » pour former un « gouvernement d’union nationale », référence à la formule trouvée à la sortie de l’apartheid unissant le premier président noir Nelson Mandela au dernier président blanc, Frederik de Klerk.
Le MK, nouveau parti de l’ex-président accusé de corruption Jacob Zuma, devenu la troisième force politique avec 58 sièges, a refusé toute discussion avec l’ANC. Son parti continue de contester les résultats des législatives et ses députés étaient largement absents vendredi de cette première session parlementaire.
Les Combattants pour la liberté économique (EFF, 39 sièges), qui prônent la confiscation de terres aux Blancs ou la privatisation des mines, ont refusé de rejoindre le gouvernement de coalition.
Une victoire saluée par Washington, Pékin et Moscou
Le président américain Joe Biden a félicité le président Ramaphosa pour sa réélection. Saluant le travail collectif réalisé par les partis pour former un gouvernement d’union nationale, le locataire de la Maison Blanche s’est réjoui « que les États-Unis et l’Afrique du Sud poursuivent leur collaboration afin d’élargir les perspectives économiques, investir dans des solutions énergétiques propres et démontrer que la démocratie tient parole », selon un communiqué de la Maison Blanche.
L’Afrique du Sud, cheffe de file de l’offensive diplomatique du « Sud global »
La Chine, partenaire clef de l’Afrique du Sud, a félicité Cyril Ramaphosa par un « message » de son président Xi Jinping, a indiqué l’agence de presse officielle Chine Nouvelle. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a de son côté félicité le président réélu en saluant « les efforts conjoints de l’Afrique du Sud pour restaurer une paix juste en Ukraine » tandis que le président russe Vladimir Poutine a dit apprécier en Ramaphosa sa « contribution personnelle au développement d’un partenariat stratégique » entre leurs deux pays.
«Â Avec vos qualités de dirigeant et votre expérience, l’Afrique du Sud est entre de bonnes mains », a pour sa part écrit sur X (ex-Twitter) la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
Twitter - Ursula von der Leyen on Twitter / X
Le président du Zimbabwe voisin, Emmerson Mnangagwa, a vu lui dans la réélection de M. Ramaphosa « un large témoignage de la grande confiance » du peuple à son égard.