Législatives en France: les gagnants et les perdants de la clarification
Le président français Emmanuel Macron, lors d'une conférence de presse à Paris, le 12 juin 2024.
La campagne officielle pour les élections législatives est lancée. Après une folle semaine où dans chaque camp, l'objectif a été de tirer son épingle du jeu dans la foulée d'une dissolution totalement imprévue. La clarification attendue dans les urnes le 7 juillet par le président de la République a commencé dans les états-majors.
Le premier perdant est incontestablement Emmanuel Macron. Le président de la République a lâché une bombe à fragmentation en annonçant la dissolution de l'Assemblée nationale. Une « grenade dégoupillée », aurait dit en privé le chef de l'État, selon Le Monde. Des propos démentis par l'Élysée, mais une expression qui montre l'intention de mettre ses adversaires dans l'embarras. D'abord en décidant de convoquer les élections le plus vite possible dès le 30 juin, ensuite en espérant former une coalition autour de lui contre le Rassemblement national (RN) grâce notamment aux divisions à gauche et à la faiblesse des Républicains (LR).
Mais rien ne s'est passé comme prévu. Les partis de gauche ont bon gré mal gré trouvé un chemin pour s'unir et Éric Ciotti a fait exploser les LR, rendant encore plus difficile des alliances. Pire, le chef de l'État a déstabilisé son camp et provoqué de nombreuses critiques chez les députés mais aussi des ministres. Même Gabriel Attal a désapprouvé la décision du président et n'a endossé le costume de chef de campagne que contraint et forcé. Emmanuel Macron est devenu un repoussoir dans la campagne. La preuve, la plupart des candidats de la majorité ne veulent pas de sa photo sur leurs tracts et espèrent que le président restera à distance.
Qui d'autre figure dans la catégorie des perdants ?
Les Républicains ont été entrainés sur la voix de la dislocation par leur président Éric Ciotti qui a annoncé son ralliement au Rassemblement national. Un choc pour le parti de droite déjà gangréné par les divisions depuis la présidentielle catastrophique de Valérie Pécresse et qui aborde les législatives dans une configuration ubuesque. Éric Ciotti est toujours président du parti mais tous les cadres LR se sont désolidarisés de lui. Ils ont investi près de 400 candidats qui vont se trouver en concurrence avec la soixantaine de candidats ciottistes. Un casse-tête pour les électeurs de droite.
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Jean-Luc Mélenchon est lui aussi plutôt perdant, après avoir été un instant du côté des gagnants quand les partis de gauche ont lancé le nouveau Front populaire avec La France insoumise (LFI) réintégrée dans l'union, ce que nul n'aurait pu espérer après l'explosion de la Nupes et des Européennes où chacun avait fait campagne de son côté.
Mais très vite, les ambitions du chef des Insoumis qui se serait bien vu Premier ministre ont ravivé les plaies et Jean-Luc Mélenchon a refait l'unanimité contre lui. Surtout après la décision de ne pas réinvestir pour les législatives les députés sortants contestataires internes à LFI - Alexis Corbière notamment - avec des accusations de purge à la clef.
Est-ce qu'il y a un vrai gagnant ?
Il y a une gagnante : Marine Le Pen, dont toute la stratégie est validée. Certes, c'est Jordan Bardella le vainqueur des européennes, le chef de la campagne des législatives, qui ira à Matignon si le RN gagne les élections. Mais derrière Bardella, produit d'appel du RN, c'est Marine Le Pen qui dirige les opérations, peaufine son image de présidentiable et organise la machine à gagner. C'est elle qui a annoncé que le RN formerait un gouvernement d'union nationale.
Elle a aussi déclaré qu'elle ne demanderait pas la démission d'Emmanuel Macron après le 7 juillet, se plaçant au-dessus de la mêlée mais à la manœuvre. La dissolution accélère une mécanique qu'elle organise depuis longtemps et dont l'objectif est la présidentielle de 2027.