Débat catastrophique pour Biden face à Trump, les démocrates en panique
Débat catastrophique pour Biden face à Trump, les démocrates en panique
Jamais un débat présidentiel n'avait eu lieu aussi tôt, un peu plus de quatre mois avant le scrutin du 5 novembre. Joe Biden voulait, selon son entourage, établir un contraste avec Donald Trump et rappeler aux électeurs la réalité de la présidence de son prédécesseur. Le démocrate s'est préparé pendant une semaine, à Camp David, et devait non seulement défendre son bilan, mais surtout rassurer les Américains sur son âge, son énergie et ses capacités cognitives, alors que trois quarts des électeurs le jugent trop vieux, à 81 ans, pour un second mandat. Et en trente secondes, le président américain leur a peut-être donné raison.
Ce n'était même pas une question piège. Le débat a commencé depuis moins de dix minutes, et le modérateur de CNN, Jake Tapper, laisse une minute à Biden pour répondre sur la dette, qui s'est creusée avec les baisses d'impôts de Donald Trump. Le démocrate commence bien. Il attaque « la plus forte augmentation de la dette sur 4 ans » et dénonce des baisses d'impôts « pour les plus riches ». Il explique ensuite qu'il veut un système de taxation plus juste, dans lequel les ultrariches paient davantage, et liste tout ce qu'il pourrait accomplir avec cette manne financière pour la petite enfance, les séniors et le système de santé.
C'est là qu'il se prend les pieds dans le tapis. Biden, qui bégaie depuis qu'il est petit, cherche ses mots pendant 30 secondes interminables, le regard parfois dans le vide : « ? s'assurer que chaque personne solidaire éligible pour ce que j'ai été capable de faire avec, euh, Covid, excusez-moi, s'occuper de tout ce qu'on doit faire? » S'ensuit une pause pendant laquelle il regarde ses notes, puis lance soudain : « on a enfin battu Medicare ! » (l'assurance santé des séniors). Personne n'a rien compris.
Les journalistes et leurs sources commencent aussitôt à échanger des SMS. « C'est un début terrible », répond au Point Aaron Kall, directeur des débats à l'université du Michigan. « Biden est horrible », abonde à chaud l'ancien porte-parole du Comité national républicain, Doug Heye.
Trump discipliné
En face, Donald Trump récite avec assurance ses discours de meeting MAGA par petites tirades claires de 60 ou 90 secondes : « L'inflation tue notre pays, elle était presque à zéro quand j'étais président, on avait la plus grande économie du monde », « La frontière est ouverte, des tueurs viennent dans notre pays et violent et tuent des femmes ». Il mélange les raccourcis et les inexactitudes, mais ça va trop vite pour que les modérateurs tentent de le fact-checker en temps réel.
Même sur l'avortement, qui est son point faible, Trump arrondit les angles. Il se dit favorable aux exceptions « en cas de viol et d'inceste ou de danger pour la vie de la mère », et assure qu'il ne bloquera pas la pilule abortive. Joe Biden l'attaque : « C'est terrible ce que vous avez fait », en parlant des juges que le républicain a nommés à la Cour suprême, et qui sont revenus sur l'arrêt Roe v. Wade, mettant fin à la légalité fédérale de l'avortement. Donald Trump ne se démonte pas. « On a renvoyé la décision à chaque État, c'est le vote du peuple. »
La baguette magique de Trump sur l'Ukraine et Gaza
Si on espérait des précisions sur la politique de Donald Trump pour l'Ukraine et le Proche-Orient, c'est raté. Le républicain agite sa baguette magique, assurant que la guerre en Ukraine « n'aurait jamais commencé » s'il avait été à la Maison Blanche car « Poutine n'aurait jamais osé attaquer ». Il l'assure sans fournir aucun détail : « Je mettrai fin à cette guerre avant même de prendre mes fonctions ». Idem au Proche-Orient. Selon Donald Trump, le Hamas n'aurait « jamais attaqué Israël » car « l'Iran était fauché et ne pouvait pas (financer le terrorisme) ». Il accuse Biden de ne pas assez soutenir Israël, ironisant : « Il est devenu comme un Palestinien. »
Joe Biden semble enfin trouver son rythme mais la fin du débat tourne à la cacophonie. Les deux candidats s'accusent d'être « le pire président » de l'histoire. Biden qualifie Trump, condamné au pénal, de « criminel ». « Combien de milliards tu dois pour avoir agressé sexuellement une femme (la chroniqueuse E. Jean Carroll) ? Pour avoir eu des relations sexuelles avec une star du porno pendant que ta femme était enceinte ? » « Je n'ai pas eu de relations sexuelles avec une star du porno », répond Trump, qui dénonce « l'instrumentalisation de la justice ». Il réplique que le fils de Joe Biden, Hunter, a également été reconnu coupable au pénal. Personne ne sort grandi de ce combat dans la boue.
Les démocrates en panique
Le débat terminé, les analyses tombent. Et la panique s'installe chez les démocrates. « Il y a un sentiment, un choc sur le début (de Biden), sa voix, il avait l'air désorienté. Vous allez entendre des discussions pour savoir s'il doit continuer », lâche sur CNN David Axelrod, le stratège de la campagne d'Obama. « Ça m'a fait mal, j'ai de la peine », ajoute l'analyste et ancien conseiller d'Obama, Van Jones. « Je souhaite que Biden réfléchisse à sa performance lors de ce débat, puis annonce sa décision de se retirer de la course, laissant le choix du candidat démocrate à la convention », écrit l'éditorialiste du New York Times Nicholas Kristof. Techniquement, il est possible de remplacer Joe Biden lors d'une convention démocrate ouverte, encore faut-il qu'il décide de passer la main.
Kamala Harris a tenté une opération de damage-control, reconnaissant « un début laborieux » mais assurant que Joe Biden a « fini en force ». Selon les médias américains, le président américain souffrait d'un rhume. Cela n'explique pas tout. « Je ne vois pas comment il s'en remet », conclut Doug Heye.