Une maquette géante du porte-avions Gérald Ford découverte dans le désert chinois
Comparatif de la silhouette photographiée dans le désert chinois avec le véritable porte-avion américain.
Une installation bien mystérieuse découverte dans l’extrême Nord-Ouest de la Chine. Une série de clichés montrant une représentation à l’échelle 1 du plus gros porte-avions américain vient d’être publiée par la société Planet Labs. Depuis 2021 de faux navires américain sortent de terre, en plein désert chinois. Ces silhouettes sont installées sur un site secret d’essais de missiles. L’armée chinoise s’entrainerait-elle à viser les bâtiments de guerre américains ? Pas si simple.
Le désert de Taklamakan, dans la province chinoise du Xinjiang, n’est pas aussi vide qu’on pourrait le croire. Quand on agrandit les photos satellites, on distingue d’étranges constructions, des routes qui semblent mener nulle part et même une voie de chemin de fer. Il faut passer du temps à observer cette immense étendue de sable pour voir apparaître au détour d’une dune des silhouettes de navires. Au début, il n’y a que des tas des pierres, puis des plaques de béton rectangulaires, et enfin une représentation assez fidèle des principaux navires de guerre américains.
Le 1er janvier 2024, il n’y a plus de doute, les Chinois ont bien reproduit à l’échelle 1 le pont du Gérald Ford, ses quatre catapultes, ses superstructures et son « château » caractéristique, placé plus à l’arrière que les autres porte-aéronefs américains. Tout autour, un océan de sable. Le chantier détecté au plus tard, en 2023, mesure 330 mètres de long, exactement la longueur du navire amiral de la Navy. Pourtant, les ingénieurs chinois n’en sont pas à leur coup d’essai, sur les photos fournies par Planet Labs, d’autres silhouettes blanches, de taille plus réduites, orientées exactement de la même manière, sont visibles. Ces installations d’essais ne sont pas très discrètes, puisqu’on les voit depuis l’espace. C’est l’objectif, laisse entendre un expert français.
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Mise au point de missiles balistiques antinavires
«Ã‚ Avec ces installations, ils ont ce qu’il faut pour tester et calibrer la chaine d’acquisition – ISR renseignement, surveillance et reconnaissance – et le guidage de leurs missiles balistiques anti-navires » estime un ingénieur français du secteur de la défense. « Cela fait des années que les Chinois travaillent sur un tel projet, techniquement, ils font de qu’ils disent, ils publient même, mais la barrière de la langue joue contre nous » ajoute-t-il. L’idée des stratèges chinois est de tenir à distance la flotte américaine, en l’empêchant de se rapprocher des côtes chinoises. Sanctuariser la mer de Chine, selon une stratégie dite de déni d’accès. L’arme destinée à cela serait le missile de portée intermédiaire DF-21D en mesure de parcourir 1 500 km et de frapper depuis l’ « espace ». À l’origine, le DF-21 est un missile nucléaire. Pour détruire un porte-avions, il faut qu’il gagne en précision. Pour schématiser, il faut donc mettre au point une « tête chercheuse » appelée aussi autodirecteur capable de « reconnaître » la forme de la cible et s’y diriger. Les silhouettes dans le désert serviraient donc à affuter « l’œil du missile » ou expérimenter les systèmes de renseignements chargés d’aider à l’identification de la cible.
Fausse piste ?
D’une manière générale, les marines occidentales estiment que les chinois auront beaucoup de mal à mettre point ce missile « casseur de porte-avion ». Aucun engin balistique à charge conventionnelle n’a jamais été employé contre un navire se déplaçant en pleine mer, même contre un bâtiment de grande taille. Cependant, plusieurs pistes techniques existent. Vu du ciel, la mer est un très bon « fond de scène » précisent les spécialistes. Cela veut dire que comme dans le désert, les contours des navires visés se détachent nettement à condition toutefois qu’il n’y ait pas de nuages. Néanmoins, quand on « zoome » sur les photos du mystérieux site d’essais situé près de Ruoqiang, on aperçoit des alignements de petites sphères à l’arrière des superstructures. De l’avis des experts, il s’agit probablement de réflecteurs radar destinés à simuler l’écho renvoyé par le porte-avions.
Les ingénieurs chinois chercheraient donc à mettre en place un système de guidage utilisant la technologie radar (utilisable même si la cible est cachée par les nuages). « Ils pourraient combiner plusieurs technologies, ou tester différentes solutions, de l’optronique, du laser, voire effectivement du radar ». Le problème est que la « tête » d’un missile plongeant depuis l’espace va subir des contraintes très importantes en termes de températures : « le missile en descente est hypersonique, et il est entouré de plasma, on peut essayer de protéger un autodirecteur contre la chaleur, mais les lois de la physique font qu’un système radar fonctionnement très mal dans ces conditions […] Pour le laser, les missiles sont tellement rapides, je ne sais pas si ça peut marcher », explique l’ingénieur consulté par RFI.
Reste une dernière hypothèse : la Chine cherche peut-être simplement à mettre sous pression les États-Unis, car finalement, en utilisant un dispositif d’essais aussi peu discret, l’important est-il vraiment de mettre au point une nouvelle arme, ou simplement de faire croire que Pékin en disposera un jour ?
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