Sandrine Bonnaire : «Il me semble essentiel de faire le distinguo entre un viol, un abus de pouvoir et un mec lourd»

sandrine bonnaire : «il me semble essentiel de faire le distinguo entre un viol, un abus de pouvoir et un mec lourd»

Sandrine Bonnaire à l’avant-première du film

Indissociables au cinéma, dans les jeux vidéo, la publicité, les séries, l'animation…, musique et image le sont aussi dans la vie personnelle et artistique de Sandrine Bonnaire, qui était toute désignée pour participer au Festival Sœurs jumelles consacré au lien indéfectible entre ces deux langages universels. Invitée de la quatrième édition qui se tiendra du 25 au 30 juin, à Rochefort (Charente-Maritime), l'actrice et réalisatrice sera le fil rouge d'une rencontre artistique où interviendront Emmanuelle Laborit et Erik Truffaz (le 29 juin) ; elle présentera également au public ses documentaires musicaux sur Jacques Higelin (2015) et Marianne Faithfull (2018). À quelques jours de l'événement créé et présidé par Julie Gayet, elle nous raconte ses passions musicales, ses projets de réalisatrice, et revient sur les enjeux qui agitent l'industrie du cinéma.

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Madame Figaro. – Quelle place la musique tient-elle dans votre vie ?

Sandrine Bonnaire. – Immense ! Petite, j'adorais danser. J'ai fait du classique et du moderne, on s'imaginait en Claudette avec ma sœur, on inventait des chorégraphies sur la chanson Funkytown, de Lipps Inc, dont il nous arrive encore de reproduire les mouvements. Adulte, j'ai aussi fait beaucoup de danse orientale avec mes amies algériennes, et, quand je voyageais, je m'inscrivais dans des cours : danse traditionnelle en Indonésie, tango en Argentine, danse africaine… Gamine, je ne rêvais pas d'être actrice mais danseuse ou chanteuse. Ma voix n'est, hélas, pas à la hauteur.

Vous portez pourtant des spectacles musicaux avec Erik Truffaz, votre compagnon ?

Je n'y chante pas vraiment. Erik et moi nous sommes connus sur scène : il jouait, je disais du Duras. Depuis, il y a eu La Clameur des lucioles et, actuellement, Ensemble, dans lequel je lis Rimbaud et Patti Smith. Nous préparons aussi un album : il compose, j'écris. J'ai déjà trois textes : un sur ma sœur autiste, que je vais chanter avec mon ami et voisin autiste Charles Alazard, un autre sur l'agression que j'ai subie ; et j'espère aussi convaincre mon ami Jacques Dutronc de faire un duo sur un titre que j'ai appelé Ne rien faire. Du sur-mesure.

La musique est-elle un outil pour l'actrice ?

Elle m'accompagne en loge pour me galvaniser, mais elle est surtout ma compagne d'écriture. Cependant, je n'écoute que du non-français ou de l'instrumental pour ne pas parasiter ma pensée. Par exemple, quand je travaillais sur Elle s'appelle Sabine, le documentaire que j'ai réalisé sur ma sœur autiste, j'écoutais du piano, notamment Chopin et le Prélude de Bach que Sabine joue dans le film.

Quelle importance accordez-vous à la bande-son de vos films ?

Énorme. Comme Sabine avance au ralenti, j'imaginais, par exemple, une ambiance sonore en accord avec son rythme. Pendant le montage, nous avions utilisé le thème de Journal intime, de Nanni Moretti, comme musique témoin, et je m'en étais tant entichée que je n'arrivais plus à imaginer autre chose. J'ai eu la chance que le compositeur, Nicola Piovani, me cède les droits gratuitement et m'autorise à ralentir sa partition. Quant à J'enrage de son absence, mon premier film de fiction, j'ai utilisé beaucoup de musiques additionnelles des compositeurs Arvo Pärt et Henryk Górecki.

Quelles émotions vous procure la musique que ne vous donne pas le cinéma ?

Elle me donne toutes les libertés, me désinhibe. Sur les projets musicaux, je n'ai pas le trac, car on ne m'attend pas à cet endroit. Quand je chantais sur scène avec Jacques Higelin, je me jetais simplement dans l'arène, sans réfléchir. Je n'en avais pas le temps de toute façon, car je tournais en parallèle un documentaire sur lui.

Êtes-vous plus timide sur un plateau de cinéma ?

De plus en plus. Comme je suis connue, j'ai l'impression qu'on me jugera plus durement, qu'on se dira « Je croyais Bonnaire meilleure que ça… ». Sans doute suis-je paranoïaque, mais, à cet endroit, la notoriété est pour moi un frein. Pourtant, je m'en accommode, car elle m'offre aussi une tribune : grâce à elle, j'ai été entendue sur l'autisme, les violences faites aux femmes ou la maltraitance des seniors, puisque j'ai récemment porté plainte contre l'Ehpad où est morte ma mère. La célébrité me permet par ailleurs de porter des projets.

Êtes-vous devenue réalisatrice par nécessité ?

D'une certaine façon. Réaliser a d'abord été le moyen de rendre compte du dysfonctionnement sur la prise en charge de l'autisme, dont personne ne parlait. J'avais aussi des motivations personnelles : ma mère était très protectrice avec ma sœur Sabine, embarrassée parfois par certains de ses comportements. Avec mes images, je voulais lui montrer ce dont elle était capable quand on lui faisait confiance.

Avez-vous d'autres projets de mise en scène ?

Je vais réaliser un film de fiction sur Slow Joe, un chanteur-poète indien qui, à la manière du bluesman John Lee Hooker, écrivait de façon instinctive sur la difficulté de la vie, la rue… Le guitariste Cédric de La Chapelle l'a découvert en Inde, ramené en France, et a enregistré trois albums avec lui. J'ai aussi écrit quatre épisodes d'une série sur Valérie Hervo, la fondatrice du club libertin Les Chandelles. Elle a été victime d'inceste, a été sous emprise d'un homme pendant des années, a souffert après des chirurgies esthétiques ratées… Mais, en créant ce club où la femme était considérée et respectée, elle a fini par se réparer et se réapproprier son corps. Ma fille jouerait le personnage jeune, et moi celui dans sa seconde partie de vie. Je cherche encore des partenaires, mais je tiens à ce projet qui, à l'heure de la libération de la parole, est un témoignage édifiant de ce que les femmes s'infligent parfois pour répondre aux injonctions.

Injonctions que subissent les actrices. Le passage du temps vous angoisse-t-il ?

Les femmes clament qu'elles veulent se libérer et, paradoxalement, refusent de vieillir. En n'acceptant pas son âge, en figeant son image, on cautionne d'une certaine façon le statut d'objet auquel on nous assigne. Faire des petites choses pour avoir bonne mine, je le comprends, mais je trouve pathétique et contreproductif le basculement dans la transformation.

Qu'en est-il de la raréfaction des rôles ?

C'est pour moi le même sujet : il faut accepter de jouer des personnages de son âge pour que les regards changent en profondeur. D'autant qu'il y a aujourd'hui des points de vue pertinents qui montrent que la vie ne s'arrête pas après 50 ans. Quand on me propose de jouer une grand-mère, je ne tique pas, à condition que ce ne soit pas juste une mamie qui fait des crêpes et marche avec une canne. Dans la série Les Combattantes, j'interprétais même la mère de Grégoire Colin, un acteur qui a sept ans de moins que moi. Je l'ai jouée sur l'attitude, sans aucun artifice de vieillissement, et je suis fière de l'avoir rendue crédible.

Le Festival Sœurs Jumelles s'engage dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Êtes-vous optimiste sur la tournure que prend ce combat ?

Oui, car dorénavant tout le monde va devoir se tenir à carreau sur un plateau, et c'est tant mieux. Cependant, il ne faut pas semer la terreur. Le combat à mener est contre les agresseurs, pas contre les hommes. Il me semble aussi essentiel de faire le distinguo entre un viol, un abus de pouvoir et un mec lourd. Les sanctions doivent être proportionnelles et adaptées au cas par cas. Le spectre des agressions et des abus est vaste, et il ne faut pas tout mélanger.

Festival Sœurs jumelles, du 25 au 30 juin, à Rochefort.

soeursjumelles.com

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