Jordan Jegat, 77e de Liège-Bastogne-Liège, raconte sa première Doyenne : « J'étais vidé, mort »

Jordan Jegat a disputé son premier Liège-Bastogne-Liège dimanche. (L’Équipe)

Jordan Jegat a découvert la Doyenne, dimanche à Liège, qu’il a terminée à la 77e place, ralenti par une chute et épuisé par sa tentative de retour. Mais le Breton de TotalEnergies n’a jamais pensé à arrêter pour son premier Monument.

Pour sa première saison chez TotalEnergies après quatre années chez U Nantes Atlantique, Jordan Jegat (24 ans) découvre les courses de niveau World Tour. Et dimanche, c’est son premier Monument qu’il a couru, lors de Liège-Bastogne-Liège. Parce qu’il enchaînait les bons résultats, 2e du Tour du Jura et surtout 14e d’une Flèche Wallonne glaciale mercredi dernier (« Je regardais tellement cette course à la télé, je croyais que le mur de Huy était encore plus dur ! Mais au final, ce n’était pas insurmontable »), le Breton arrivait avec l’espoir de bien figurer sur la Doyenne, bien que conscient que les 250 kilomètres feraient mal. Il les a terminés à plat, physiquement mais surtout mentalement (77e).

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Avant Liège-Bastogne-Liège

«Ã‚ Je sors de la Flèche Wallonne et pour moi, l’objectif est de me reposer, de récupérer. On a eu des conditions difficiles, ça laisse des traces pour l’organisme, j’ai eu besoin de couper jeudi pendant que les autres sont partis rouler. J’ai effectué la reconnaissance en voiture jeudi seulement et je n’ai fait que du home trainer ces derniers jours.

Je n’ai pas d’appréhension particulière. J’ai déjà couru les Championnats de France de Cholet (en 2022) où on avait fait 240 kilomètres, si tu te caches dans les roues, ça passe bien. Même si là, sur une course comme Liège avec beaucoup de dénivelé et de tension, ce ne sera pas pareil. Je m’attends à ce que ça passe, je ne me dis pas “c’est mort, ça va pas le faire”, ça ne me fait pas peur.

Comme j’ai fait top 15 à la Flèche, l’équipe aimerait que je fasse aussi bien sur Liège, où c’est un peu le même peloton au départ hormis Pogacar et Van der Poel. Mais sans me mettre la pression, car ils savent que je suis fatigué, que c’est la première fois que je vais faire autant de vélo, on part quand même pour 6h30… Mais il y a de l’ambition. L’objectif est d’essayer de bien me placer et, au moment de la Haute-Levée (à 75 km de l’arrivée) de regarder s’il y a moyen d’anticiper ou s’il vaut mieux rester dans le peloton. »

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Après Liège-Bastogne-Liège

«Ã‚ Je ne me suis pas trompé sur la nervosité de la course… On est partis dans des conditions difficiles, froides, puis il a fait un peu meilleur à la fin. Il y avait 80 premiers kilomètres pas hyper nerveux mais dès qu’on arrive vers Bastogne, c’est de plus en plus nerveux jusqu’à l’approche de la côte de Saint-Roch (117e kilomètre) où c’est vraiment tendu.

Ensuite, il y a cette chute (à 98 kilomètres de l’arrivée), j’étais vers la 60e place et c’est tombé autour de la 40e ou 50e. Mon vélo était bloqué, j’ai mis beaucoup de temps à repartir après avoir tout contourné, je me suis retrouvé dans un groupe encore derrière Van der Poel. Avec Kévin Vauquelin (Arkéa-B & B Hotels, qui abandonnera ensuite), on a chassé longtemps pour se battre, ça roulait tellement vite à l’avant qu’on a dû produire un gros effort pour revenir et boucher environ 1’30”, mais à peine rentré dans les roues du peloton, j’ai lâché… Un (Thomas) Pidcock peut le faire mais moi, pour ma première fois, je n’ai pas le droit à l’erreur. Et j’ai lâché dans la côte de Desnié (à 50 km de l’arrivée), puis j’ai fait seul La Redoute.

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Je n’ai pas pensé une fois à arrêter. C’est mon premier Monument donc ça se respecte. Mais j’étais vidé, mort. C’est très nerveux tout du long et il y a une fatigue psychologique plus importante que sur les autres courses, c’est épuisant mentalement. J’étais dans un petit groupe dans la Roche-aux-Faucons (la dernière bosse, à 14 kilomètres de l’arrivée), je voyais d’autres coureurs lâcher, je me suis dit que tout le monde était vraiment mort. Liège n’est pas la course qui me fait rêver le plus, je préfère les épreuves par étapes montagneuses, mais ça reste mythique. Le public au pied de Stockeu ou de La Redoute, ce sont de très, très bons souvenirs. Et quand j’arrêterai le vélo, je pourrai toujours dire que j’ai fini Liège.

Mon classement ne veut rien dire. J’aurais aimé vivre la course sans cette chute, je suis un peu frustré, j’en aurais tiré plus d’expérience, mais c’est de ma faute aussi de ne pas avoir été placé. Le problème c’est qu’en ce moment, avec toutes les chutes et les débats autour, il y a encore plus de nervosité et tout le monde ne peut pas être parmi les vingt premiers. Quand on voit quelqu’un comme Mathieu Van der Poel, leader et avec tous ses équipiers à son service, qui est piégé aussi, c’est que des gens se feront toujours avoir. Je le voyais rouler dans le bas-côté puis revenir dans le peloton pour remonter, je me dis qu’on ne fait pas le même vélo : moi, si je fais ça, je ne suis pas sûr de pouvoir revenir sur la route (sourire). »

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