Quand deux amis se demandent pourquoi on fait des enfants

quand deux amis se demandent pourquoi on fait des enfants

Quand deux amis se demandent pourquoi on fait des enfants

Lors d’une séance chez son psy, Marie Cahu s’effondre en larmes. Elle vient de réaliser une chose terrible : elle a 35 ans, elle est célibataire et n’a pas d’enfant. « Pas de Judith. Pas d’Abraham. Pire, je n’ai jamais eu l’occasion d’y penser », se désole-t-elle. La panique l’envahit. Puis, un questionnement surgit : veut-elle vraiment des enfants ? Elle ne sait pas. Alors, elle décide de congeler ses ovocytes et de se laisser du temps pour savoir si, quelque part en elle, il y a un désir d’être mère. Et si oui, pourquoi ? Car, après tout, pourquoi les gens font-ils des enfants ?

Voilà le point de départ du podcast « Marie et les œufs en neige », produit par Paradiso Media et réalisé par Marie Cahu. Dans cette série audio rafraîchissante et drôle composée de six épisodes, un passage nous a particulièrement plu. C’est celui au cours duquel Marie Cahu est en grande discussion avec l’un de ses amis, le journaliste Matthieu Noël. En voilà, la retranscription.

«Ã‚ J’ai croisé Matthieu. Matthieu, c’est mon ami que je vois le moins au monde – faut dire aussi pour sa défense qu’il commence ses journées à 4 heures du mat parce qu’il travaille à la radio, qu’il a toujours un milliard de trucs à faire et deux enfants… Mais c’est aussi mon ami dont je sais qu’il peut tout comprendre, et tout commenter avec recul, finesse et humour. Le croiser, là maintenant, dans la rue, par hasard, c’était une véritable aubaine.

Marie : T’as du temps ?

Matthieu : Pas vraiment

− Je marche avec toi ? Je me suis mise à me demander pourquoi on fait des enfants ? Et du coup, je suis en train de demander à la terre entière. Et plus je demande, plus c’est confus dans ma tête et ça me désespère.

− Et tu penses que je suis l’homme de la situation pour t’expliquer pourquoi faire des enfants, c’est formidable.

− Oui

− Tu mises tout sur moi ?

− Je mise tout sur toi.

− Vraiment ? Tu veux qu’on prenne un café ?

− Oui, je veux bien. Oui, s’il te plaît.

− Allez, viens, on s’assoit là.

Je l’avais sous la main, j’en ai profité, ça a duré plusieurs heures. J’avais besoin de ranger les choses dans ma tête, alors je me suis dit que j’allais tenter de lui livrer un condensé de toutes les réponses que j’avais pu entendre.

Marie : Un truc que j’ai beaucoup entendu, c’est le projet à deux, genre l’enfant comme l’ultime projet une fois que t’es en couple… Mais moi, je me demande pourquoi c’est ce projet-là et pas un autre projet, comme cultiver son jardin ? Tu vois ce que je veux dire ?

Matthieu : En fait, il y a un mimétisme social. A un moment dans ta vie, avoir un enfant, c’est un signe extérieur de réussite comme un autre finalement. Et donc, tout le monde autour de toi ayant des enfants, tu te vivrais comme anormal si tu n’en avais pas. Et c’est-à-dire qu’une fois que tu t’engouffres dans la voie du couple, tu acceptes les normes sociales, tu acceptes tout ce que la société dit que tu dois être. Une fois que tu as mis le pied dans le couple, le deuxième engrenage, c’est le chat. Et une fois que le chat n’est pas mort, pas décédé rapidement par manque de croquettes, une fois que t’es lancé sur ces rails, c’est logiquement que tu décides de songer à un enfant. Voilà.

Bon, on aurait donc une première catégorie « mimétique ». Je peux entendre, mais dans mon panel de raisons il y en a qui ne rentrent pas trop là-dedans, notamment l’idée de laisser une trace, comme pour continuer à exister. L’enfant qui serait comme une réponse à l’angoisse existentielle, au vertige de : bah un jour, c’est fini.

Matthieu : Même si en fait, c’est une autre personne. Il ne faut pas l’oublier, hein ? Nous, on sera bien mort. Marie, malheureusement, ce sera vraiment… On éteindra la lumière.

(Rires)

Matthieu : Je suis ravi que ça te fasse rire parce que tu restes optimiste et joviale face à la cruauté de la vie.

Marie : Non mais en fait, comme je ne me projette pas loin, je n’y pense pas à « ça va être fini ».

− Tu ne te projettes pas si loin ?

− Moi, je ne me projette jamais.

C’est vrai, je ne me projette pas, du coup laisser une trace, ou même l’idée – assez fréquente pourtant – de faire des enfants pour transmettre des valeurs, ça ne me parle pas. D’ailleurs, je me dis : est-ce qu’on ne pourrait pas les ranger ensemble ces raisons ?

Matthieu : Ah moi, je ne suis pas d’accord

Marie : Ah non ? C’est pas pareil ?

− Je n’en sais rien en fait. Moi, j’ai aucune certitude mais, dans ce que tu dis, je n’entends pas la même chose. C’est biologique, ce sont tes gènes, c’est un peu de toi, une fraction de toi qui va… qui va continuer d’exister, c’est plus minimaliste comme projet.

Pour lui, les gens qui veulent transmettre des valeurs, ils appartiennent plutôt à une autre case : la case « dynastique ».

Matthieu : On ne parle pas que de gens réac qui habitent dans un château. Ce sont des gens qui ont des convictions en fait, et ils se disent qu’en créant un petit être qui leur ressemble, qui vient d’eux et sur lequel ils vont avoir la mainmise pendant dix-huit ans – enfin, plutôt pendant quatorze ans on va dire –, ils vont pouvoir changer le monde en fait à travers leur enfant.

Marie : Oui, c’est ça en fait.

En creusant cette idée de la transmission, on a réalisé qu’on pouvait aussi vouloir des enfants pour leur transmettre une culture, une passion, et même des souvenirs. J’ai eu beaucoup de réponses nostalgiques d’ailleurs, l’envie de revivre son enfance à travers sa progéniture. Ça non plus je ne savais pas quoi en faire…

Matthieu : Pas du tout ?

Marie : Ouais, toutes ces magies-là, les revivre avec ton enfant…

− Ça ne te parle pas ?

− Non. En revanche, voir un enfant s’émerveiller… L’émerveillement de l’enfant, ça me bouleverse.

− Oui, mais ça ne te renvoie pas à toi ?

− Non, pas du tout.

− A toi, tes petites mains potelées sur la grille de d’une cage d’un lion au zoo…

− Au zoo de Thoiry…

− Alors, il n’y a pas de cage au zoo Thoiry, hein ? C’est en plein air. (Rires) Mais on voit vraiment que tu n’as pas eu d’enfance, Marie. C’est vraiment désespérant. Je commence à comprendre beaucoup de choses…

(Rires)

Marie : Il y a ça. Il y a aussi des gens qui sont dans un truc de « c’est de l’amour à donner ». « Au bout d’un moment, je me suis dit qu’il fallait que j’arrête de ne penser qu’à moi »… Ça, c’est vraiment un truc que je ne peux pas entendre. Après, j’imagine que ça me vexe aussi. Quand on me dit ça, je me dis que dans ma réaction, qui est un peu forte, que ça m’énerve, qu’on sous-entende que je suis égoïste.

Mathieu : Je pense que – enfin, je juge personne mais d’après ma modeste expérience de la vie – c’est faux. Je pense que si on fait des enfants, c’est parce que ça nous fait plaisir.

− Mais c’est pas grave. Enfin, ce que je veux dire, c’est que ce n’est pas grave d’être égoïste. On l’est tous en fait, d’une manière ou d’une autre. C’est ça, ce que je te disais ? Non ?

− Bah j’ai deux enfants, je ne vais pas m’accabler. Non, mais oui, oui…

On a convenu qu’en fait y avait de l’amour à donner, et à recevoir, et que oui, ça devait aussi être un bon moteur.

Matthieu : Ce petit être va t’aimer toute sa vie d’une manière ou d’une autre, il va y avoir un lien entre vous qu’on ne pourra pas briser en fait. Ça, c’est s’offrir une sécurité affective. On ne peut pas l’écarter comme un des arguments principaux pour lesquels les gens font des enfants. Un amour garanti.

Marie : Oui, on dirait un slogan.

− Garanti cinq ans !

(Rires)

Après cette page de pub, on s’est demandé si concevoir l’enfant comme un réservoir d’amour, ça ne pouvait pas se rapprocher de l’enfant comme le fruit de l’amour, cette envie de créer un « mini moi », ou un « mini nous » pour les plus romantiques.

Matthieu : C’est présent chez chacun d’entre nous. Ne nous voilons pas la face, ce sont les gens qui se trouvent tellement – pas forcément beaux – mais soit ils se trouvent beaux eux-mêmes, soit ils trouvent beau leur couple en fait, l’union de ses deux personnes. Ils s’aiment et ils estiment que ça, ça mérite qu’on scelle dans le marbre cet amour. Et le marbre, ce n’est pas un marbre, c’est un petit être.

Si on voulait créer une catégorie avec tout ça, ça pourrait être « narcissiques ». Ça ferait donc mimétiques, dynastiques, narcissiques. Mais on met où ceux qui ne veulent pas vieillir seuls alors ? Parce qu’on m’a dit ça aussi.

Matthieu : On pourrait créer une autre catégorie, Marie. Parce qu’on est fou, on est dingue, on se permet tout, on bouleverse la sociologie. Ça pourrait être les parents « pragmatiques ». Ils ne pensent pas au petit bébé mignon – évidemment qu’ils y pensent, on l’a dit tout à l’heure, toutes les catégories se mélangent – mais ils se disent aussi ce petit bébé mignon, un jour, ça sera un grand monsieur costaud qui pourra m’aider à me déplacer quand je serai sur la fin…

Après tout, c’est vrai qu’avant, les gens faisaient des enfants pour ça, pour la force vive que ça représentait. Enfin, je dis avant mais…

Marie : Ce qui justifiait le fait d’avoir des enfants, c’était qu’ils allaient aider à la ferme. La meuf qui a une image trop bizarre des temps anciens. (Rires)

Matthieu : Tout le monde était fermier à l’époque. C’est vrai, hein ? Ils étaient tous fermiers.

− Oui, ça doit rester quelque part en nous.

Au bout d’un moment, on a commencé à s’y perdre…

Matthieu : Le vertige existentiel, dans quoi on l’a mis ? Je ne me souviens plus.

Marie : Pas narcissique. Et c’est pas dynastique du tout…

− Non, pas du tout. Et c’est pas mimétique non plus.

− Non.

On touchait aux limites de l’exercice. On s’est arrêtés là. Et sur l’idée qu’on avait tous un paquet de motivations différentes et toutes un peu intriquées…

Matthieu : Mais moi j’espère bien qu’on va obtenir notre agrég à la fin de cet entretien, puisque vraiment j’ai rarement autant réfléchi qu’avec toi, Marie.

Et puis, je n’ai pas pu m’empêcher de lui demander à lui, Matthieu, pourquoi il avait eu des enfants. Enfin en l’occurrence le premier… l’acte décisif. Il a toujours aimé les enfants, et toujours su qu’il serait père un jour.

Matthieu : En revanche, bon l’engagement, je me disais : « bon, c’est pas pour tout de suite ». J’avais 28 ans quand mon père est tombé malade et là, ça a été un déclic, c’est vraiment un facteur exogène. J’ai vu mon père qui a eu un cancer fulgurant. Il est mort en six mois à peu près. Quand je l’ai appris, en fait, ça a tout chamboulé en moi. C’est-à-dire que cette envie diffuse d’avoir un enfant mais « un jour peut-être », tout ça s’est accéléré. Je me suis dit : « il faut que je fasse un enfant parce que ça va sauver mon père, en fait. Il va vouloir vivre, pour voir cet enfant. » Tout s’est effacé d’un coup. Je n’avais plus aucun doute, plus d’obstacles. Ça s’est imposé à moi et j’étais sûr que c’était ça qu’il fallait faire.

Et alors, c’est drôle – enfin c’est pas drôle, non –, mais ça m’a fait penser à ce truc que j’ai ressenti une fois, une seule, quand ma grand-mère est morte. J’étais à la mer, j’étais allée me baigner dans un délire un peu new age de communion avec les éléments parce que je ne savais pas quoi faire de ce chagrin et je m’étais dit : il faut faire continuer la vie, il faut faire des enfants, elle a vécu, nous, on est là, et voilà.

Matthieu : Mais il y a peut-être aussi un peu de ça chez moi. T’as raison, c’est vrai, il y a un peu le côté – au-delà du fait que c’est mon père qui meurt –, c’est ce déclic pur de vie.

Marie : Oui, c’est ça.

OK, on n’aura peut-être pas obtenu d’agrég, mais une idée à creuser. Ce déclic de vie. Est-ce qu’il ne se cacherait pas, derrière toutes ces petites et grandes raisons d’avoir des enfants, un élan plus instinctif, un truc biologique, qu’on fleurirait de nos petites histoires à nous. »

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