«Mobilisés jusqu'à ce que nous soyons entendus» : à Sciences Po, les militants propalestiniens maintiennent la pression

Les actions de blocage se poursuivent à Sciences Po. Ce vendredi, une centaine d’étudiants pro-palestiniens ont occupé le bâtiment du 27 rue Saint-Guillaume. Les militants, qui avaient dormi sur place, ne comptaient pas sortir tant que l’IEP refusait «d’investiguer» les partenariats qui le lient à des universités israéliennes. Mais sur les coups de 11h45, la police a reçu l’ordre d’évacuer le campus.

La situation a commencé à se tendre alors que le Comité Palestine, à l’origine de la mobilisation, avait prévu une conférence de presse à 9h30 devant l’IEP. Pour contrecarrer ses plans, la gendarmerie a demandé aux journalistes d’évacuer les abords de l’école. Rapidement, plusieurs fourgons ont bloqué les deux accès de la rue Saint-Guillaume, qui est restée fermée au public.

Des militantes masquées

Quelques minutes plus tard, deux militantes, keffiehs sur les épaules et masques chirurgicaux sur le nez, ont gagné la rue de Grenelle, où les journalistes attendaient massés sur le trottoir. «Comme vous le savez, nous avons été contraints d’annuler notre conférence de presse en raison de 8 camions de gendarmerie présents dans la rue Saint-Guillaume. Cette réponse est disproportionnée et sécuritaire, elle marque encore une fois la répression des voix propalestiniennes au sein de notre établissement», s’est insurgée l’une d’entre elles.

Les deux jeunes femmes, qui refusaient de donner leurs prénoms, se sont exprimées à tour de rôle. «Au moment même où nous parlons, il y a une délégation qui est en négociation, donc on vous tiendra informés», a poursuivi l’autre militante. Et sa camarade de reprendre la parole : «Notre demande vis-à-vis de l’institution reste la même : nous souhaitons la création d’un groupe de travail et d’une commission d’enquête pour remettre en question les partenariats universitaires et économiques vis-à-vis des violations du droit international et des droits de l’Homme en Palestine d’ici le prochain conseil de l’institut.»

Une grève de la faim a débuté hier

Pour appuyer leurs revendications, les militants de Sciences Po ne misent plus seulement sur les blocages. «Il y a une grève de la faim qui a débuté hier (jeudi) par 10 étudiants de Sciences Po Paris dont trois sur le campus de Reims», a expliqué une des étudiantes.

Jeudi, un «town hall», un débat sur le modèle de ceux pratiqués sur les campus aux Etats-Unis, s’était tenu à Sciences Po Paris entre les étudiants et l’administration. Lors de ces échanges, la direction s’était refusée à réviser ses partenariats et n’a cédé à aucune des revendications du Comité Palestine. À l’issue, les militants déçus avaient immédiatement annoncé que leur mobilisation continuerait. «Alors que la communauté étudiante attendait des engagements lors de ce débat, la seule fois ou l’administrateur de l’IEP Jean Bassères a prononcé ce mot, c’est pour nous indiquer qu’il ne s’engageait pas à ne pas appeler à nouveau les forces de l’ordre malgré un consensus au sein de la communauté académique d’un refus de leur intervention dans l’enceinte de l’université», déplore ainsi l’une des militantes.

En raison du blocage, l’administration avait décidé de fermer ses locaux parisiens ce vendredi 3 mai. Dans un mail envoyé aux étudiants jeudi à 23 heures, elle avait indiqué que les cours seraient «basculés sur Zoom et qu’elle tiendr[ait] [les étudiants] au courant de l’évolution dans la journée».

L’évacuation a commencé peu avant midi

Au fil de la matinée, la pression des forces de l’ordre a grandi. À mesure que les gendarmes se faisaient plus nombreux devant l’IEP, les slogans repris par les manifestants ont commencé à raisonner dans les rues adjacentes. Les députés de la France insoumise, Thomas Portes et Aymeric Caron, venus sur place, ont tenté sans succès d’apercevoir la mobilisation derrière le barrage des gendarmes depuis le rue de Grenelle.

L’évacuation a finalement été décidée vers 12 heures. Les forcent de l’ordre ont investi l’IEP, et très vite, les militants ont été contraint de sortir. Bien encadrés par les gendarmes et recouverts de leurs keffiehs, ils ont quitté la rue Saint-Guillaume par groupe de quatre. Certains partaient en chantant. «Même si Sciences Po ne veut pas, nous, on est là», scandaient les uns. «Tahia tahia Falestine», reprenaient les autres. Les visages recouverts de masques chirurgicaux, tous levaient les mains en l’air en faisant le V de la victoire. Selon la préfecture de police contactée, 91 personnes avaient «été évacuées sans incident».