«L'affaissement de la morale religieuse sur les modèles familiaux explique en partie l'opinion des Français sur la GPA»

FIGAROVOX/ENTRETIEN – L’Ifop vient de publier une enquête sur la perception des Français sur la légalisation de la Gestation pour autrui (GPA). François Kraus, directeur du pôle Politique/Actualité de l’Institut, analyse les résultats de cette enquête.

«l'affaissement de la morale religieuse sur les modèles familiaux explique en partie l'opinion des français sur la gpa»

«En une dГ©cennie, l’opinion publique a Г©voluГ© trГЁs largement en faveur d’une lГ©galisation de la GPAР’В».

François Kraus est directeur du Pôle Politique/Actualité de l’Ifop. L’Ifop vient de publier une enquête en partenariat avec l’Association des familles homoparentales (ADFH) sur «la position de l’opinion publique sur la GPA et les questions LGBT dans la campagne des élections européennes».

LE FIGARO. – L’Ifop publie une enquête sur la perception des Français sur la légalisation de la Gestation pour autrui (GPA). Quelles leçons en tirer ?

François KRAUS. – La principale leçon de cette enquête est de montrer que la GPA ne peut plus être ce «chiffon rouge» qui fut longtemps agité par les opposants à la loi Taubira (2013) ou à la loi élargissant l’accès à la Procréation médicalement assistée (PMA, 2021). Ces derniers avaient tendance à présenter toute avancée en matière d’homoparentalité comme une étape qui mènerait forcément à la légalisation de la Gestation pour autrui.

Or, force est de constater que ces critiques issues des rangs de la droite conservatrice – mais aussi d’une partie des rangs féministes – n’ont pas porté leurs fruits… Au contraire, les indicateurs de l’observatoire Ifop-ADFH mis en place il y a dix ans nous montrent bien à quel point, depuis l’adoption de la loi Taubira, l’homoparentalité suscite de moins en moins de résistance dans la société française. En une décennie, l’opinion publique a évolué très largement en faveur d’une légalisation de la GPA, le soutien des Français au recours aux mères porteuses étant désormais nettement majoritaire aussi bien pour les couples hétérosexuels (71%, contre 60% en 2014) que pour les couples homosexuels (56%, contre 41% en 2014).

Et cette décrispation rapide de l’opinion publique sur un sujet autrefois clivant est loin d’être un phénomène isolé: on observait exactement la même tendance lors du débat autour de la loi «bioéthique» ouvrant la PMA à toutes les femmes. Les données de notre observatoire Ifop-ADFH montraient alors qu’en à peine huit ans, le niveau d’adhésion à l’ouverture de la procréation médicalement assistée avait progressé de 20 points pour les couples homosexuels (67% en 2021, contre 47% en 2013) et de 10 points pour les femmes célibataires (67% en 2021, contre 57% en 2014). Quant à l’adoption par les couples gays, qui était un sujet des plus clivants lors des débats autour de la loi Taubira (49% d’adhésion en janvier 2013), elle fait aujourd’hui l’objet d’un quasi-consensus: 71% des sondés trouvent que la loi Taubira qui a ouvert ce droit est «plutôt une bonne réforme» dans notre enquête du mois d’avril 2024.

» LIRE AUSSI – CГ©line Revel-Dumas: В«La GPA, une “traite d’êtres humains” pour le Parlement europГ©en, un progrГЁs pour nombre d’élus franГ§aisВ»

Difficile donc de ne pas voir dans ce consentement croissant à ces différentes formes d’assistance médicale à la procréation le fait que «l’homoparentalité est désormais ancrée dans notre société» pour reprendre Alexandre Urwicz. Et c’est évidemment un signe parmi d’autres de la perte d’influence de la morale religieuse sur les modèles familiaux, perte qui s’inscrit dans un contexte plus large de «dislocation de la matrice catholique» de notre société très bien analysée par Jérôme Fourquet dans L’Archipel Français.

Il persiste néanmoins une différence d’acceptation de l’adhésion à l’autorisation de la GPA entre les couples hétérosexuels et les couples homosexuels, signe que le recours aux mères porteuses ne choque pas sur le principe mais surtout quand il est activé par des couples homosexuels. Par ailleurs, le tassement du taux d’adhésion observé depuis 2022 est le signe que la position sur le sujet reste mouvante et peut encore fluctuer en fonction du contexte, du degré de mobilisation sociale ou de l’ampleur du débat public sur le sujet.

Comment expliquez-vous une banalisation aussi rapide de l’idée d’homoparentalité depuis les grands débats autour la loi Taubira, débats où la question de la GPA était pourtant quasi absente?

À l’époque, l’opposition à la GPA faisait tellement consensus dans le personnel politique et intellectuel qu’aucune enquête d’opinion n’en avait mesuré le soutien auprès des Français. On ne trouve aucune trace d’enquête publiée sur le sujet avant 2014. C’est dire à quel point la légalisation de la GPA était encore un non-sujet il y a une dizaine d’années…

Pour tenter de comprendre une telle évolution, il faut prendre en compte plusieurs temporalités. Sur le long terme, elle tient tout d’abord à une plus grande acceptation sociale de l’homosexualité, inhérente aux sociétés industrielles avancées affectées par la progression des valeurs «post-matérialistes» – que décrit Ronald Inglehart – à la faveur du renouvellement générationnel, de l’amélioration du niveau de vie et de la hausse du degré d’instruction. Amorcée à partir des années 1970, cette profonde transformation des attitudes à l’égard des homosexuels s’illustre notamment à travers la proportion croissante de Français estimant que l’homosexualité est «une manière acceptable/comme une autre de vivre sa sexualité»: de 24% en 1973, celle-ci est passée à 54% en 1986 puis à 67% en 1996 pour finir à 87% en 2019. Et cette tendance n’a rien de spécifique à l’Hexagone: on la retrouve dans toute l’Europe de l’Ouest.

Sur le moyen terme, elle tient aussi au fait que les deux dernières décennies ont été le théâtre d’une reconnaissance accrue des modèles parentaux sortant de la norme hétérosexuelle. En cela, l’officialisation des couples homosexuels par les lois de 1999 et de 2013 a fait évoluer les représentations à l’égard d’homosexuels jusque-là souvent réduits à leur sexualité. Tout comme pour le pacs où, une fois la loi votée, l’adhésion des Français avait ainsi spectaculairement progressé, l’acceptation de l’homoparentalité s’étant rapidement banalisée. Et ces évolutions législatives sont allées de pair avec une représentation croissante des familles homoparentales dans les médias.

Enfin, à plus court terme, au moins trois tendances relativement récentes peuvent jouer en faveur de cette évolution rapide des positions des Français sur le sujet. La première tient à l’éviction au sein du champ politique de la plupart des personnalités qui, avec plus ou moins d’intensité ou de régularité, avaient pu se faire les porte-drapeaux des associations opposées à la loi Taubira. On pense notamment au retrait de François Fillon, d’Hervé Mariton, de Nicolas Sarkozy, de Christine Boutin et, plus récemment de Nicolas Dupont-Aignan. Quant au Mouvement Conservateur (ex-Sens Commun), si présent aux primaires LR de 2017, il a acté son échec à obtenir des relais dans un grand parti de gouvernement comme Les Républicains. Désormais, sa présidente Laurence Trochu a rejoint Reconquête…

La seconde tendance tient à l’évolution, au cours des dix dernières années, du cadre juridique et législatif relatif au droit des couples gay à avoir des enfants via une forme d’assistance médicale à la procréation. Depuis les arrêts de la CEDH sur la filiation des enfants nés de mères porteuses à l’étranger (juin 2014), la jurisprudence (CEDH, Conseil d’État, Cour de cassation…) a beaucoup évolué sur la question de la reconnaissance dans le droit français des enfants nés à l’étranger par une GPA. Certes, la loi bioéthique de 2021 a limité la transcription d’un acte d’état civil d’un enfant né de GPA au seul parent biologique. Mais pour l’opinion, le fait qu’elle ouvre la PMA aux couples homosexuels n’en a pas moins joué en faveur de la cause GPA en contribuant à faire du «couple homo» un cadre légitime à l’établissement d’une famille. Car nous l’avions déjà observé avec le pacs puis la loi Taubira: toute reconnaissance juridique des droits des homosexuels s’est traduite ultérieurement par une plus grande adhésion de l’opinion à ces modèles parentaux alternatifs et donc aux revendications supplémentaires. Jérôme Fourquet parle à juste titre d’effet «domino» pour qualifier cet effet d’accélération de l’opinion et de regain de son soutien à la «cause d’après».

Enfin, la nouvelle dynamique féministe portée depuis 2017 par le mouvement #MeToo peut également être un élément qui joue en faveur de la GPA tant l’adhésion au féminisme va souvent de pair avec celui de la cause LGBT. On observe notamment chez les jeunes et les femmes une prise de conscience inédite de ces enjeux qui, a minima, déconstruit leur rapport au modèle traditionnel de la famille hétérosexuelle. Pour beaucoup de jeunes féministes ignorant les critiques de la veille garde sur le sujet (Sylviane Agacinski, Marie-Jo Bonnet, Osez le féminisme…), l’accès à la GPA est un objet de lutte légitime du camp progressiste auquel il faut apporter un soutien de principe.

Comment expliquer le décalage entre le milieu politique réservé sur le sujet et une opinion publique désormais favorable à une évolution législative?

Il est vrai que cette étude confirme le hiatus entre l’opinion des Français sur la GPA, qui y est structurellement de plus en plus ouverte, et le mutisme d’une classe politique qui, à quelques exceptions, s’oppose à sa légalisation. Il faut rappeler que ce type d’assistance médicale à la procréation suscite toujours l’opposition de la quasi-totalité des grandes figures politiques: Jean-Luc Mélenchon, François Rufin, Emmanuel Macron, François Bayrou, Valérie Pécresse, Marine Le Pen, Éric Zemmour, Marion Maréchal se sont tous prononcés clairement contre la légalisation de la GPA. En 2022, seul Yannick Jadot s’était prononcé en faveur d’un débat autour d’une «GPA éthique» mais sans aller toutefois jusqu’à l’inscrire dans son programme.

» LIRE AUSSI – Contrairement Г  ce qu’affirme ClГ©ment Beaune, la GPA ne sera jamais «éthiqueВ»

Aujourd’hui, les choses changent néanmoins quelque peu avec les prises de position d’une partie de l’aile gauche de la majorité: plusieurs anciens membres du gouvernement – tels que Élisabeth Borne ou Clément Beaune – se disent ouvertement favorables à cette légalisation. La ministre déléguée chargée de l’enfance, de la jeunesse et des familles, Sarah El Haïry, a même appelé à «sortir de l’hypocrisie» sur la GPA et à «ouvrir un débat» sur cette question. Sur ce point, la ministre serait d’ailleurs plutôt soutenue par l’opinion publique: une enquête YouGov pour Le HuffPost a montré que la majorité des Français (56%) aimerait bien voir ce sujet mis à l’ordre du jour avant la prochaine élection présidentielle. Ainsi, les lignes évoluent lentement mais le décalage entre un milieu politique très réservé sur le sujet et une opinion publique désormais très largement favorable à une évolution législative risque de durer longtemps.

Si l’opinion est plutôt favorable à la GPA, est-elle hostile à la rémunération des mères porteuses?

Oui, et cette hostilité est de plus en plus prononcée. Car il est bon de rappeler que depuis quelques années, la ligne de fracture se situe moins sur le principe même de la GPA que sur ses modalités d’application. En effet, le principe d’une rémunération des mères porteuses s’avère de plus en plus rejeté si l’on en juge par la proportion croissante de personnes qui estiment qu’une mère porteuse ne doit pas être rémunérée pour une GPA: 61% aujourd’hui, contre 52% en 2022. Et les plus hostiles sont les fractions de la population traditionnellement les plus sensibles aux avancées sociétales: cadres et professions intellectuelles supérieures, diplômés du supérieur, salariés du secteur public, électeurs de gauche et du centre…

On notera juste l’avis très partagé des sympathisants EELV sur le sujet, qui sont parmi les plus sensibles à la cause LGBT: 51% sont opposés à toute rémunération, 49% favorables à l’idée que la mère porteuse puisse être rémunérée. L’impact du discours sur la «marchandisation des corps» qu’induirait la GPA n’est sans doute pas étranger à cette évolution, qu’il soit porté par la sphère féministe abolitionniste ou les courants conservateurs. À gauche, la rémunération de la grossesse est en tout cas le sujet de clivage et de division par excellence.

«29% seulement des FranГ§ais(es) sont d’accord avec les propos de Marion MarГ©chal sur la GPAВ» rГ©vГЁle le sondage Ifop. Parmi les 29%, peut-on Г©tablir un profil type?

Avec ses propos dénonçant l’absence de mère des enfants d’un designer français nés via GPA, Marion Maréchal a en effet relancé le débat, suscitant une indignation dans les rangs de la gauche et du centre qui nous a poussé à poser la question du soutien dont la candidate dispose dans la bataille d’opinion qui se joue sur ce sujet.

Or, notre enquête montre que la candidate Reconquête! est loin d’être soutenue dans l’opinion sur le sujet: 29% des Français approuvent ses propos selon lesquels la GPA serait une pratique «monstrueuse et honteuse», contre 55% qui ne partagent pas son point de vue et 16% qui n’ont pas d’avis sur le sujet. Et dans le détail, aucune catégorie de la population ne partage majoritairement son point de vue, exception faite des catholiques pratiquants (64%), de ses électeurs et des ex-électeurs Pécresse à la présidentielle (56%).

Par ailleurs, la sortie de Marion Maréchal n’a pas eu un grand écho cette semaine: seuls 20% des Français en ont parlé cette semaine selon le rolling Ifop. Et les enquêtes sur les déterminants du vote montrent que la lutte contre la haine envers les homosexuels est un sujet qui joue peu sur le vote des Français, notamment pour des électeurs lepénistes plutôt progressistes sur les questions liées à la cause des femmes et des LGBT. Dès lors, la position de Marion Maréchal peut peut-être lui rallier la frange la plus conservatrice de son concurrent LR à l’élection européenne, mais elle reste nettement minoritaire dans l’ensemble de la population en général.

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