Guerre à Gaza : la Turquie suspend toute relation commerciale avec Israël
Le président turc Recep Tayyip Erdogan est l’une des voix les plus critiques de la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza. Reuters/Ahmad al-Rubaye
Ankara franchit un nouveau cran dans son opposition aux opérations israéliennes à Gaza. La Turquie a suspendu jeudi ses relations commerciales avec Israël en réponse à la guerre dans l’enclave palestinienne, nouvelle étape dans la dégradation des relations entre les deux pays.
«Ã‚ Les exportations et importations en relation avec Israël ont été suspendues », a annoncé dans un communiqué le ministère turc du Commerce, qui avait déjàrestreint en avril les exportations des entreprises turques àdestination d’Israël. « La Turquie appliquera ces nouvelles mesures de manière stricte jusqu’àce que le gouvernement israélien autorise un flux ininterrompu d’aide humanitaire vers Gaza », ajoute le ministère.
Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz avait affirmé plus tôt jeudi que le président turc Recep Tayyip Erdogan avait « rompu les accords [entre Israël et la Turquie] en bloquant les importations et exportations israéliennes dans les ports ». Le chef de la diplomatie israélienne a dit vouloir « créer des alternatives au commerce avec la Turquie, en se concentrant sur la production locale et les importations en provenance d’autres pays ».
Colère croissante de la population turque
Le ministre turc du Commerce n’a pas précisé si les exportations de pétrole azerbaïdjanais vers Israël via le port turc de Ceyhan (Sud) étaient concernées par la décision d’Ankara. Selon des analystes, plus du tiers des besoins en pétrole d’Israël transitaient encore récemment par ce port turc de la Méditerranée.
Confronté à une colère croissante dans la population turque contre le maintien des relations commerciales avec Israël, le gouvernement turc a restreint début avril les exportations vers Israël de 54 catégories de marchandises, dont des produits composés d’acier, de fer et d’aluminium. Les exportations de la Turquie vers Israël ont représenté 5,43 milliards de dollars en 2023, contre 7,03 milliards de dollars en 2022 et 6,36 milliards de dollars en 2021, selon l’Union des exportateurs turcs et l’agence de statistiques Turkstat.
La Turquie assure vouloir « garantir que (se) s frères palestiniens contraints de vivre sous occupation ne soient pas affectés par ces restrictions ». « La République de Turquie continuera à soutenir la juste cause de (se) s frères palestiniens, comme elle l’a fait jusqu’à présent », écrit le ministère turc du Commerce.
La guerre entre Israël et le Hamas palestinien a fait voler en éclats la normalisation des relations turco israéliennes entamée en 2022 après une décennie de brouille. Le président Erdogan, l’une des voix les plus critiques de la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza, a qualifié à plusieurs reprises Israël « d’État terroriste », et a même estimé que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou avait « surpassé Hitler ».
Erdogan, qui a rappelé début novembre l’ambassadeur de Turquie à Tel-Aviv, avait à l’époque jugé impossible de « rompre complètement » les relations commerciales avec Israël. Mais les critiques se sont intensifiées en Turquie ces dernières semaines contre la poursuite des échanges commerciaux avec Israël. Selon des analystes, cette colère a contribué à la débâcle historique du Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) du président Erdogan aux élections locales organisées fin mars.
Le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan a annoncé mercredi que la Turquie allait se joindre à l’action en justice intentée par l’Afrique du Sud contre Israël devant la Cour internationale de Justice (CIJ).