États-Unis : un parlementaire et sa femme inculpés pour avoir reçu des pots-de-vin d’« entités étrangères »
Henry Cuellar parlant à des journalistes au Capitole (Washington) le 27 juin 2019. AFP/Getty Images/Alex Wong
Le lobbying a certes été inventé aux États-Unis, mais la corruption ? Le représentant démocrate du Texas Henry Cuellar et son épouse Imelda ont été inculpés vendredi de complot et d’acceptation de pots-de-vin de la part d’entités étrangères. Selon le ministère de la Justice, les Cuellar auraient, dès décembre 2014 et au moins jusqu’à novembre 2021, touché de l’argent de la part d’une société pétrolière et gazière appartenant au gouvernement azerbaïdjanais ainsi que d’une banque mexicaine. Le montant de la corruption s’élève à 600 000 dollars (557 000 euros).
Selon l’acte d’accusation fédéral, rendu mardi par un grand jury au Texas mardi, et publié vendredi, le représentant du Texas s’engageait à mettre en avant la politique étrangère de l’Azerbaïdjan et influencer des responsables américains « de haut rang » au profit de la banque de Mexico en échange de cette rétribution, blanchie grâce à de faux contrats de consultante signés auprès de sociétés écrans appartenant à Imelda Cuellar. Celle-ci « a effectué peu ou pas de travail légitime dans le cadre des contrats » de consultante, servant à donner une légalité aux sommes perçues par son époux, accusent les procureurs.
Elu dans un district frontalier du Mexique depuis 2005
Cuellar aurait influencé une série de mesures législatives concernant le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie voisine, en proie à un conflit sans fin, inséré un langage favorisé par l’Azerbaïdjan dans la législation et les rapports parlementaires régissant certains programmes de sécurité et d’aide économique, en lien avec des représentants de l’Azerbaïdjan qui multipliaient les efforts de lobbying auprès du gouvernement fédéral, y compris l’ambassadeur d’Azerbaïdjan, Elin Suleymanov.
Quant à la banque de Mexico, Cuellar aurait accepté des pots-de-vin en échange d’une influence sur la réglementation fédérale du secteur financier au profit de la banque et de ses filiales, selon l’acte d’accusation. Dans l’acte d’accusation de 54 pages, la banque est anonymisée sous le nom de « Foreign Bank-1 », « Banque étrangère 1 », et décrite comme basée à Mexico, accordant des prêts sur salaire aux États-Unis et possédant aussi une société de médias mexicaine. Selon l’agence Reuters, cette description semble correspondre au Grupo Salinas, un conglomérat tentaculaire contrôlé par le milliardaire mexicain Ricardo Salinas, 170e fortune mondiale, que les autorités mexicaines ont récemment accusé de ne plus payer ses impôts. Son empire commercial comprend notamment Banco Azteca et TV Azteca. L’acte d’accusation fournit également des détails permettant d’identifier un dirigeant de banque qui semble correspondre à un dirigeant de Banco Azteca récemment retraité.
Henry Cuellar est l’un des démocrates les plus conservateurs de la Chambre des représentants, contre l’avortement, ayant voté contre la couverture maladie universelle et favorable au droit de chacun à porter des armes à feu. Élu depuis 2005, il brigue en novembre son 11e mandat de deux ans dans un district du Texas limitrophe du Mexique et comprenant Laredo et certaines parties de San Antonio. Il est chaque fois réélu avec un score plus important que la fois précédente.
Les époux Cuellar ont comparu vendredi devant un juge d’instance à Houston. Ils encourent, chacun, une longue peine de prison se chiffrant en décennies, les sanctions pouvant se cumuler pour les 14 chefs d’accusation qui les visent, notamment corruption, complot, blanchiment et recel de blanchiment. Plus tôt vendredi, Cuellar a clamé son innocence. Ils ont clamé leur innocence. « Je veux être clair sur le fait que ma femme et moi sommes innocents de ces allégations », a déclaré Cuellar dans un communiqué. « Tout ce que j’ai fait au Congrès a été de servir la population du sud du Texas. » Ils ont été libérés sous caution.
Le leader des démocrates à la Chambre des représentants, Hakeem Jeffries, a fait savoir que Cuellar, le temps de l’enquête, se retirait d’une commission sur les crédits pour la sécurité intérieure, mais qu’il avait droit à « la présomption d’innocence tout au long du processus judiciaire ».