C’est quoi cette histoire de « devoir de visite » des pères que veut Macron ?
Le président veut un débat sur la possibilité pour les mères seules « d’exiger » l’implication et des visites régulières de leurs ex-conjoints
Le président français Emmanuel Macron (au centre) applaudit, à Marseille dans le sud de la France, le 8 mai 2024.
pères-quisitionnés – Le président veut un débat sur la possibilité pour les mères seules « d’exiger » l’implication et des visites régulières de leurs ex-conjoints
Un « devoir de visite ». C’est la proposition qu’a lancée le président de la République mercredi, lors d’un entretien à Elle. Emmanuel Macron a expliqué vouloir ouvrir un débat sur l’instauration d’un « devoir d’accompagnement, jusqu’à l’âge adulte, des enfants », qui permettrait aux mères seules « d’exiger » l’implication et des visites régulières de leurs ex-conjoints. Mais de quoi parle-t-il exactement ? Pourquoi ça provoque des débats ? Comment se défend le gouvernement ? 20 Minutes fait le point pour vous.
Qu’a dit Emmanuel Macron ?
Emmanuel Macron a estimé dans les colonnes de Elle qu’il « doit y avoir non plus seulement un droit mais un devoir de visite, un devoir de suivi, d’éducation, de poursuite du projet parental au-delà du couple ».
Dans une vidéo diffusée mardi soir par le magazine, le président veut « qu’on puisse ouvrir ce débat, qui est au fond à la fois un débat sur la parentalité et un débat sur l’égalité entre les femmes et les hommes, qui est celui d’instaurer un devoir de visite, un devoir d’accompagnement jusqu’à l’âge adulte, des enfants ».
«Ã‚ Quand il y a un père, il faut qu’il exerce tous ses devoirs et que la maman, quand elle est dans cette situation-là, puisse exiger des visites régulières », ajoute-t-il, considérant que, « y compris pour l’enfant, c’est mieux ». Cette proposition intervient alors qu’en France, une famille sur quatre est monoparentale (soit deux millions de familles et 3,1 millions d’enfants mineurs) et compte àsa tête une femme dans 82 % des cas, a rappelé un récent rapport sénatorial.
Pourquoi ça fait débat ?
Cette proposition a soulevé des interrogations chez des associations, inquiètes que ces visites obligatoires n’aillent pas toujours dans l’intérêt des familles, notamment en cas de séparations conflictuelles ou de violences intrafamiliales.
«Ã‚ Devoir de visite = idée dangereuse : un homme violent, abusif, défaillant n’est pas un bon père. Le bon objectif : l’intérêt supérieur de l’enfant. Avec ou sans père », a écrit sur X l’association Osez le féminisme. « Il faut que ce soit vraiment dans l’intérêt de l’enfant et de la maman, on ne peut pas décréter ça sans mesure de protection », a de son côté réagit Véronique Obé, représentante de la Fédération syndicale des familles monoparentales, qui regroupe une quinzaine d’associations.
Pour la sénatrice socialiste Colombe Brossel, coauteur du rapport sénatorial paru en mars, « responsabiliser le conjoint non gardien, ce n’est pas seulement de la symbolique » avec un devoir de visite, « mais aussi augmenter le montant des pensions alimentaires » et abaisser le « taux ahurissant de 25 % de pensions alimentaires non versées ». « Comme souvent avec le président, il prend un bout de mesure et fait semblant de ne pas voir que la lutte contre les inégalités est systémique », a-t-elle tancé.
Comment argumente le gouvernement ?
Interrogée sur CNews et Europe 1 ce jeudi, la ministre chargée de l’égalité femmes-hommes a assuré que ce n’était « pas un débat réac » mais « nécessaire ». « Évidemment, la question n’est pas de forcer une relation quand il y a un risque de violence », a assuré Aurore Bergé.
La société s’est trop « accommodée à l’idée que des femmes pouvaient tout assumer toutes seules et que ce n’était pas bien grave » si les pères « se limitaient à une pension alimentaire que, parfois, ils ne payaient pas », selon la ministre.
A l’inverse, des mères qui « refusent la présentation d’un enfant parce qu’il y aura un risque de violence, elles, par contre, immédiatement on leur rappelle la loi », a-t-elle observé, dénonçant un « déséquilibre de responsabilité ». Ce « devoir de visite » pourrait se concrétiser de diverses manières, a-t-elle dit, comme des « sanctions pour les pères qui devaient déjà assumer leur droit de visite et ne l’assument pas ».
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