Pourquoi la compagnie Ryanair s'en prend aux cyclistes irlandais ?
Un avion de la compagnie aérienne Ryanair sur le tarmac de l'aéroport de Dublin en 2020.
Hashtag provocateur, déclarations agressives, cyclistes pris pour cible : Ryanair multiplie les attaques pour protester contre une limite de passagers imposée à l'aéroport de Dublin.
On aurait presque du mal à le croire : Ryanair, élu en 2023 et pour la troisième année consécutive transporteur le plus polluant d'Europe (selon une étude sur les émissions de l'aviation publiée en avril), a décidé de s'attaquer aux… cyclistes. La compagnie aérienne low-cost a en effet diffusé une série de messages sur X sous le hashtag #flightsnotbikes ("des vols plutôt que des vélos").
Avec ce hashtag, Ryanair entend répondre à une limite du nombre de passagers imposé à l'aéroport de Dublin. "Un maximum de 32 millions de déplacements de passagers est autorisé, explique le quotidien allemand Der Spiegel qui consacre un article à cette désolante campagne de communication. La limite a presque été atteinte l'année dernière avec 31,9 millions. Les compagnies aériennes préviennent donc qu'elles ne pourront pas répondre entièrement à la demande de billets cette année, ce qui entraînera une hausse du prix des billets."
Un "plafond de passagers" imposé
Les conséquences sur la fréquentation touristique se font ressentir, déplore à son tour le quotidien irlandais The Irish Times. "Selon un rapport commandé par Aer Lingus, les restrictions actuelles à l'aéroport de Dublin pourraient coûter à l'économie irlandaise 1,4 milliard d'euros et 37 000 emplois pour chaque million de passagers qui ne sont pas autorisés à arriver à l'aéroport."
En vigueur depuis 2007, ce "plafond de passagers" a été imposé par l'office de planification local dans le cadre d'un projet d'extension de terminal. Il provoque aujourd'hui la colère des compagnies aériennes Ryanair et Aer Lingus qui, explique Air Journal, ont demandé au ministre des Transports irlandais Eamon Ryan de relever le quota. Mais celui-ci n’a pas donné de suite favorable à la requête.
La compagnie aérienne s'en prend donc désormais aux cyclistes, symboles de la politique environnementale du ministre, par ailleurs chef du parti écologiste irlandais. Et moque au passage la décision récente d'Eamon Ryan de quitter son poste de chef du Parti Vert après sa défaite aux élections européennes. Sur son compte X, Ryanair lui a ainsi adressé un message lui implorant de "ne pas recycler les déchets verts" en nommant son adjointe Catherine Martin.
"Ne recyclez pas les déchets vertes et épargnez-nous Catherine Martin" implore ce message posté sur X par la compagnie Ryanair sous le hashtag #flightsnotbikes.
"Abattre les écologistes"
Ce post provocateur, tout comme la formule #flightsnotbikes, en dit long quant au positionnement de Ryanair sur les enjeux environnementaux. Depuis des décennies, poursuit Der Spiegel, le patron de Ryanair Michael O'Leary, se met en scène comme un anticonformiste, maître dans l'art de de la provocation. L'homme a par exemple déclaré que "la meilleure chose que nous pouvons faire avec les écologistes, c'est de les abattre". Ou encore qualifié les recherches sur le réchauffement climatique de "tas de conneries".
Entarté par des militantes écologistes lors d'une venue à Bruxelles, O'Leary avait choisi, toujours, de répondre en soignant sa communication. "À l'avenir, j'encourage les écologistes à utiliser de la vraie crème laitière irlandaise, bien plus savoureuse et bien plus efficace que la crème artificielle de ce matin." De quoi inspirer au Guardian une compilation de ses citations les plus stupides.
Décidément peu portée sur les mobilités douces, la compagnie Ryanair reproche également au ministre d'avoir fait de Dublin la deuxième ville la plus embouteillée au monde pour les automobilistes. Visé, le ministre Eamon Ryan, conclut Der Spiegel, préfère éviter de commenter ces attaques, y voyant des invitations cachées à promouvoir l'entreprise. "Chaque fois que nous parlons de Ryanair, c'est une publicité gratuite de plus pour la compagnie."