Biniam Girmay, vainqueur de la 3e étape du Tour de France : « Cette victoire montre que tout est possible »

Biniam Girmay s'est imposé au sprint ce lundi sur la 3e étape du Tour. (E. Garnier/L'Équipe)

L'Érythréen Biniam Girmay (Intermarché-Wanty) a remporté la première étape de sa carrière sur le Tour de France, ce lundi à Turin. Un symbole fort, selon lui, pour le cyclisme dans son pays et sur le continent africain.

«Â Quels sont les coureurs qui vous ont inspiré pour devenir cycliste professionnel ?

D'abord, je veux remercier tout le monde. Tous les coureurs pros m'ont inspiré. Je ne peux pas sortir un nom en particulier parce que j'ai toujours trouvé qu'ils étaient tous très forts. En premier lieu mes compatriotes Daniel Teklehaimanot et Merhawi Kudus, les premiers à avoir fait le Tour. Ils viennent de la même ville que moi, on s'est souvent entraînés ensemble, c'est toujours le cas, ça m'a toujours motivé.

Que représente cette victoire ?

Cela représente beaucoup pour moi, pour le continent. Cela faisait longtemps qu'un coureur africain n'avait pas gagné sur le Tour ! Ça veut dire beaucoup. Spécifiquement pour l'Érythrée, on est passionné de cyclisme, on l'a dans le sang. Ce qu'il s'est passé aujourd'hui est formidable.

Lorsque vous repensez à tout votre parcours pour en arriver là... Qu'est-ce qui a été le plus difficile ?

C'est une question compliquée... Quand j'étais jeune, mon père regardait le Tour tous les étés après le repas, il nous appelait et nous expliquait comment ça fonctionnait. J'ai commencé à le regarder en 2011. J'ai demandé à mon père si je pourrais un jour courir le Tour de France, il m'a dit que oui, si je continuais à croire en mes chances. Tout a changé quand Teklehaimanot a porté le maillot à pois (en 2015), c'est ça qui m'a fait croire en mes chances. Mais il y a eu beaucoup d'obstacles. Le premier est qu'en Afrique, nous devons faire beaucoup de courses locales qui ne nous laissent pas vraiment l'opportunité de montrer tout notre potentiel. Cette victoire montre à tous les coureurs africains, surtout en Érythrée, que tout est possible.

Cela va-t-il inspirer beaucoup de jeunes coureurs chez vous ?

Le sprint, ce n'est pas le genre d'étape que beaucoup de coureurs de chez nous peuvent gagner ! Il y a beaucoup de montées, la plupart des gens sont assez fins physiquement. Mais j'ai grandi avec la mentalité d'un sprinteur, avec les images de Cavendish et Sagan comme idoles. À mes débuts, mes premiers entraînements étaient toujours des sprints, me voir parmi les plus rapides du monde, c'est incroyable. Il faut que les Africains viennent en Europe au plus tard en juniors. J'ai dû apprendre l'anglais, le langage du cyclisme. Arriver à 24 ans, ce serait perdre son temps. On voit que Richard Carapaz, Équatorien, est maillot jaune aujourd'hui. Le cyclisme est de plus en plus mondialisé, il faut que ça continue comme ça.

Comment votre ville et votre pays vont célébrer cette victoire ?

Je crois que les gens vont casser beaucoup de tables et de télévisions ! Après ma victoire au Giro, j'ai entendu que les gens avaient bien animé les bars, à cause du décalage horaire pour le Giro ils m'avaient dit qu'ils étaient au bar et avaient tous renversé leurs verres. Aujourd'hui, ça a dû être très fort. en tout cas je reçois beaucoup de soutien dans mon pays, les gens me motivent tout le temps, ils m'encouragent, me disent de gagner sur le Tour de France car ils vont célébrer fort. Je n'ai pas beaucoup de mots pour décrire ce qu'il doit se passer chez moi.

Pouvez-vous décrire, techniquement, ce sprint ?

Physiquement, je me sentais pas très bien. Techniquement, dans le dernier kilomètre, j'ai plutôt fermé les yeux qu'autre chose. J'ai perdu mon équipier et j'ai essayé de faire mon sprint du mieux possible. Il ne fallait pas aller sur la gauche de la route parce que le vent venait de là, donc j'ai fait le choix de passer près des barrières à droite, au risque d'être enfermé, mais j'ai réussi à me glisser à côté de Mads Pedersen, j'ai fermé les yeux, et je suis passé.

Vous avez mentionné Cavendish, que pensez-vous de sa tentative, à 39 ans, de gagner encore une étape ?

Je l'ai bien connu ces dernières années, on est devenus amis. Je lui ai dit : ''Tu es mon idole.'' Il m'a répondu : ''Je pourrais être ton père, tu ne dois pas me battre !'' (Rires) À 39 ans, c'est incroyable qu'il tente cela. Il est tombé l'année dernière... Mais je crois qu'il va gagner une étape cette année. »

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