Législatives 2024 : l’omniprésence de Jean-Luc Mélenchon embarrasse le Nouveau Front populaire
Le leader de la France Insoumise, le 30 juin 2024 lors du premier tour des législatives 2024.
Jean-Luc Mélenchon n’est ni candidat ni chef de parti et pourtant, il reste omniprésent dans une campagne cruciale au terme de laquelle l’extrême droite pourrait remporter la majorité des sièges à l’Assemblée nationale. Repoussoir pour ses opposants politiques, leader reconnu et légitime pour d’autres, le leader de la France insoumise est-il un boulet pour le bloc de gauche ?
Il est apparu une vingtaine de minutes après l’annonce des résultats, dimanche 9 juin. En direct sur toutes les chaînes de télévision, Jean-Luc Mélenchon a pris la parole au soir du premier tour au nom du Nouveau Front populaire (NFP).
Il a annoncé dans un court discours que les candidats du bloc de gauche arrivés en troisième position se retireraient en cas de ballottage favorable au RN. Pourtant, le leader des Insoumis n’est ni président de parti ni candidat à la députation. Chez ses alliés de gauche, la présence indéboulonnable de Jean-Luc Mélenchon agace.
Législatives 2024 : suivez notre direct au lendemain du premier tour ce lundi 1er juillet
Au lendemain du premier tour, dans les matinales, la question était la même sur toutes les lèvres : au nom de quoi Jean-Luc Mélenchon a-t-il pris la parole ? Quelle place occupe-t-il désormais dans l’alliance de gauche ? « On s’en fout de Jean-Luc Mélenchon », a répondu la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier sur France inter. « Est-ce que vous demandez à Jean-Luc Mélenchon de se faire discret dans cette campagne de l’entre-deux tours ? », l’a quand même questionnée Nicolas Demorand. « Ceux qui le connaissent savent que ça ne sert à rien de lui demander. Par contre, nous, on peut faire tous un truc, c’est arrêter d’en parler. »
À l’origine de ces tiraillements internes, une alliance de gauche qui s’est fait « très vite », rappelle le politologue Rémi Lefebvre : « La question du leadership n’a pas pu être traitée car elle est trop clivante. Jean-Luc Mélenchon joue de cette ambiguïté », estime-t-il. Au risque de devenir « un handicap » pour son propre camp.
Face à Bardella
Tout du long de cette campagne express, les cadres du NFP n’ont eu de cesse de battre en brèche la nomination d’un Jean-Luc Mélenchon à Matignon. Sandrine Rousseau a dénoncé ce lundi matin une instrumentalisation. « Tout le monde sait que Jean-Luc Mélenchon n’est pas suffisamment consensuel pour réussir à être la personne qui sorte lors de ce troisième tour », a réagi la députée écologiste NFP, élue dès dimanche dans la 9e circonscription de Paris. Dimanche soir, Olivier Faure a réagi sur Franceinfo : « Jean-Luc Mélenchon ne peut pas s’autoproclamer Premier ministre. » Il avait lui même déclaré le 24 juin n’être « candidat à rien ».
Las, son nom s’est imposé dans l’argumentation de la droite, de l’extrême droite et d’une partie de l’ex-majorité présidentielle, qui en font un chiffon rouge dans leur campagne. Ce lundi, la une du Figaro présente Jean-Luc Mélenchon comme le leader du Nouveau Front populaire et l’affiche en photo face à Jordan Bardella, sous le titre : « La bataille s’engage entre Bardella et Mélenchon. » Ce lundi, Jordan Bardella a dit vouloir l’affronter lors d’un débat. Objectif : faire de Mélenchon son adversaire direct et profiter de son statut de « repoussoir ».
«Ã‚ Abimé mais très puissant »
L’ex-député a encore des atouts dans sa manche. Il est toujours soutenu par des figures insoumises : Manuel Bompard, Clémence Guetté, Mathilde Panot… « Il a une base électorale très stable, autour de 10 % », ajoute Rémi Lefebvre. Et une grande notoriété par rapport aux autres figures de la gauche, acquise notamment lors des deux dernières campagnes présidentielles : en 2022, il a obtenu 22 % des voix, juste derrière Marine Le Pen. « Il est à la fois abîmé et très puissant », confirme le politologue.
Quel poids pèsera LFI dans cette nouvelle législature, alors que le parti présente 71 candidats de moins qu’en 2022 ? En 2022, la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), le bloc de gauche formé à l’époque, avait obtenu 151 députés, dont 75 pour LFI. Sandrine Rousseau a confirmé ce lundi qu’il aurait « sa place » si un gouvernement de gauche était appelé au pouvoir, en cas de victoire du NFP. Mais l’esprit du leader insoumis est ailleurs pour Rémi Lefebvre : « Il est dans le coup d’après. Son agenda, son obsession, c’est la présidentielle. »