Vertiges : comment sont-ils pris en charge ? Les réponses d'un ORL

Vertiges : comment sont-ils pris en charge ? Les réponses d’un ORL

Ponctuels ou chroniques, les vertiges sont fréquents et représentent la troisième cause de consultations médicales. On fait le point sur les nouvelles recommandations pour une meilleure prise en charge.

En France, 300.000 personnes, surtout après 50 ans, sont touchées par des vertiges. La plupart du temps, ces troubles sont causés par une atteinte du système vestibulaire, l’organe sensoriel de l’équilibre, situé dans l’oreille interne*. Dans 70% des cas en effet, on constate un “vertige positionnel paroxystique bénin” (VPPB), dû au déplacement de particules de calcium dans l’un des canaux du vestibule. Mais parfois aussi, il peut s’agir d’une névrite virale du nerf vestibulaire, de la maladie de Ménière caractérisée par une montée en pression des liquides internes à l’oreille interne, ou encore de manifestations violentes de la migraine. Enfin, derrière tout vertige ou trouble de l’équilibre, peut également se cacher un AVC ou un neurinome, tumeur bénigne du nerf vestibulaire. Selon qu’il s’agit ou non d’une urgence, que la cause vestibulaire peut être ou non traitée afin d’éliminer le vertige ou d’en minorer la perception, la prise en charge sera différente. Pour l’affiner, la Société française d’oto-rhino-laryngologie (SFORL) a pour la première fois émis des recommandations en 2023. On les détaille avec le Pr Vincent Darrouzet, médecin ORL au CHU de Bordeaux et Président de la SFORL.

* Journal du CNRS, 10/10/2023

Pratiquer un examen clinique systématique

Réalisé chez le généraliste puis au besoin chez l’ORL, il doit permettre d’interpréter les signes évocateurs :

Un VPPB : ce vertige rotatoire de moins d’une minute est associé à des mouvements anormaux des yeux (appelés nystagmus) et déclenché par un changement de position de la tête.

Une névrite vestibulaire : les vertiges persistent au-delà d’une journée et s’associent à des vomissements et un mal-être intense.

La maladie de Ménière : les vertiges s’étalent sur 2 à 8 h, se répètent régulièrement et surtout, les troubles auditifs s’observent d’un seul côté, avec une surdité qui peut s’aggraver dans le temps et des acouphènes tels que des bourdonnements.

La migraine vestibulaire : un fort mal de tête unilatéral et pulsatile précède ou accompagne les vertiges.

Un neurinome : en cas de vertiges chroniques et de sensations d’ébriété, parfois associés à un trouble rotatoire (quand ça tourne) et de l’audition s’aggravant progressivement, une IRM doit être prescrite pour rechercher un neurinome (petite tumeur bénigne de la gaine du nerf cochléo-vestibulaire, responsable de l’audition et l’équilibre). Selon la taille de la grosseur et l’âge du patient, le spécialiste optera pour une simple surveillance, une ablation, ou une irradiation.

Un AVC : dans 5 à 10% des cas, un vertige ou un déséquilibre aigu qui s’installe au fil des heures sans trouble auditif peut cacher un AVC. C’est surtout vrai en présence de facteurs de risque (âge avancé, hypertension artérielle, troubles du rythme cardiaque, diabète, surpoids) et de signes évocateurs associés (douleurs cervicales, palpitations, céphalées inhabituelles, somnolence, maladresse, vue double, mouvements oculaires anormaux). Il faut alors consulter immédiatement et faire une IRM d’urgence.

Bénéficier d’une rééducation ciblée

Elle suffit parfois à traiter le vertige ou complète un traitement médicamenteux. Les recommandations de la SFORL permettent de mieux encadrer l’usage des différentes techniques :

Pour le VPPB, un médecin ou un kinésithérapeute vestibulaire formé à cette technique va remettre les cristaux baladeurs à leur place par une manœuvre de bascule de la tête spécifique au canal atteint (à ne pas faire soi-même en suivant un tutoriel !)

Pour la névrite, et parfois la maladie de Ménière, en cas d’instabilité entre les crises, une rééducation vestibulaire est nécessaire. Prescrite par le médecin, elle est également pratiquée par des kinésithérapeutes vestibulaires, équipés d’outils spécifiques : fauteuil rotatoire (qui fait tourner le patient, lequel doit ensuite fixer une cible immobile quand le fauteuil s’arrête), stimulation optocinétique (qui apprend au patient à s’accoutumer à des repères lumineux mobiles dans le noir, en affermissant son ancrage au sol), travail sur plateforme mobile…

La réalité virtuelle au cas par cas

Nouveaux dans certains cabinets de kinésithérapie ou centres hospitaliers, des casques oniriques simulent une situation de déséquilibre, pour que le patient apprivoise les sensations qu’elle génère et se sente moins anxieux. Cette approche par la réalité virtuelle s’apparente à une désensibilisation. Elle peut être recommandée en complément d’une rééducation conventionnelle et pour le mal des transports, mais s’avère contre-indiquée chez les enfants, les personnes épileptiques et migraineuses.

Des traitements pour calmer les crises

La chimie est inutile dans le cas du VPPB. Dans celui de la maladie de Ménière en revanche, la prise de diurétiques, de même que des injections de corticoïdes ou de gentamicine à travers le tympan peuvent réduire la pression dans l’oreille. La névrite vestibulaire est également traitée avec des corticoïdes par voie orale pendant la crise. Enfin, le médicament antivertigineux le plus utilisé pour calmer les crises, toutes causes confondues, reste le Tanganil. Mais il ne traite que le symptôme, pas la cause. D’autres médicaments, comme la méclozine ou la flunarizine, peuvent également faire office de traitement antivertigineux, mais ils sont moins bien supportés.

Les bons réflexes à adopter lors de vertiges

Parce que les médicaments et la rééducation ne suffisent pas toujours à régler les problèmes de vertiges, quelques règles d’hygiène de vie sont à adopter au quotidien.

• Modérer sa consommation de sel et de café pour limiter la pression dans l’oreille interne en cas de maladie de Ménière.
• En cas de vertige rotatoire aigu prolongé, s’isoler, relever la tête, bien respirer et fixer un point pour bloquer le mouvement des yeux responsable de la rotation.
• Bien s’hydrater.
• Tenter de bien dormir et de gérer ses facteurs de stress, au besoin avec une aide extérieure.

Jamais de kiné vestibulaire sans avoir consulté un médecin

“Quand on est victime de vertiges, on ne va surtout pas voir un kinésithérapeute en accès direct. On consulte un médecin, avant tout pour prévenir une éventuelle urgence vitale liée à un AVC. Ensuite, dans un second temps et après avis médical, on peut se rendre chez un kiné spécialisé en rééducation vestibulaire.”

Merci au Pr Vincent Darrouzet, Président de la SFORL

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