Top 14. Recrutement, mental, style de jeu… Pourquoi Montpellier est de retour au premier plan

Après un exercice 2020-2021 galère qui l’a vu lutter pour le maintien, Montpellier a fait son retour sur le devant de la scène depuis le mois de septembre. Les Héraultais, après 15 journées, pointent à la 4e place du Top 14 et ont validé leur ticket pour les 8es de finale de la Coupe d’Europe dimanche dernier. Ce très bon début de saison s’explique par plusieurs facteurs. Analyse.

Pour se rendre compte du chemin parcouru par Montpellier, un coup d’œil dans le rétro s’impose. Il y a un an pile, les Héraultais végétaient à l’avant-dernière place du Top 14, après 15 journées. Avant leur déplacement périlleux à La Rochelle ce samedi 29 janvier (17 h), ils pointent à la 4e place, avec deux matches en retard à cause du Covid-19, et restent sur six succès de rang.

Sur la scène européenne, le constat est identique. Éliminé dès la phase de poules lors du dernier exercice, le MHR a validé son billet pour les 8es de finale de la Champions Cup, dimanche dernier, après un succès probant face à Exeter (37-26).

Philippe Saint-André, qui a repris l’équipe en main en janvier 2021, a su fédérer son groupe et, surtout, lui redonner confiance. Les coéquipiers de Guilhem Guirado, sûrs de leur force, peuvent attaquer la deuxième partie de championnat avec ambition.

Montpellier a retrouvé du mental et de l’appétit

Après une première partie de saison cauchemardesque l’an passé, le MHR avait fini en trombe pour assurer son maintien en Top 14 et remporter le Challenge européen face aux Anglais de Leicester (18-17). « C’était un peu le début de quelque chose avec ce groupe », avance Anthony Bouthier (29 ans), qui vit sa troisième saison au club. Pour repartir du bon pied, le staff et les joueurs ont puisé dans ce succès lors de l’intersaison.

C’est fini au GGL Stadium !

Les Cistes s’imposent face aux Exeter Chiefs, avec le point de bonus offensif ! #TeamMHR #MHREXE pic.twitter.com/jAEm1NAfPT

— Montpellier Rugby (@MHR_officiel) January 23, 2022

Philippe Saint-André (54 ans) avoue avoir retrouvé un groupe revanchard lors de la reprise de l’entraînement, l’été dernier. « Sur l’état d’esprit, l’investissement et la solidarité, on est sur le même ressort que la saison passée, précise l’ancien sélectionneur du XV de France (2011-2015). Les joueurs ont tellement vécu de moments difficiles et galères l’an dernier, qu’ils ont envie de vivre des moments plus simples. Ce sont des mecs qui ont faim et qui veulent chatouiller les plus grosses cylindrées du Top 14. Ils ont comme objectif de faire les phases finales en fin de saison. »

Un recrutement ciblé et de qualité

Longtemps étiqueté comme une équipe de mercenaires avec sa pléiade d’internationaux étrangers, notamment sud-africains, le MHR a changé son fusil d’épaule depuis deux ans. Arrivé en tant que directeur de rugby en mars 2020, PSA s’était vu confier la mission d’établir une nouvelle feuille de route pour le recrutement par le président Mohed Altrad.

Depuis, les Héraultais ont misé sur des joueurs JIFF (joueurs issus des filières de formation), parfois en panne de confiance dans leur club (Florian Verhaeghe, Jérémie Maurouard, Marco Tauleigne, Malik Hamadache) sur des espoirs de Pro D2 (Alexandre Becognée, Enzo Forletta, Pierre Lucas, Julien Tisseron) et laissent les jeunes pousses du centre de formation s’exprimer (Louis Foursens, Yannick Arroyo).

« Cette année, on a fait un recrutement cohérent, se félicite Philippe Saint-André. On n’a pas forcément pris des supers stars, mais on a choisi des joueurs qui amènent de la concurrence et des solutions lors des doublons qui étaient le tendon d’Achille de Montpellier les années d’avant. Ce qui dénote avec notre ancienne image, avec des recrutements flamboyants. On a su enrichir l’effectif en quantité et en qualité. »

Pour preuve, sur ses douze renforts lors de l’intersaison, cinq sont étrangers : Paolo Garbisi (Italie), Brandon Paenga-Amosa (Australie), Josua Vici (Fidji), Masivesi Dakuwaqa (Fidji) et Zach Mercer (Angleterre). Ce dernier est l’une des révélations du début de saison en Top 14. « Toutes les recrues apportent beaucoup, enchérit Anthony Bouthier. Ce sont des joueurs qui jouent beaucoup et qui ont une certaine expérience. Cette année, il y a eu un bon recrutement, et on l’a ressenti dès les premiers matches. »

Une alchimie au sein de l’effectif

Force est de constater que ces nouvelles têtes se sont parfaitement acclimatées. La mayonnaise a rapidement pris avec les joueurs déjà présents. Désormais, un esprit de corps se dégage de ce groupe. Un exemple ? Lors de la 3e journée de la Coupe d’Europe, Montpellier est contraint de se déplacer au Leinster avec un groupe amoindri par les blessures et de nombreux cas de Covid-19. L’équipe sombre chez l’ogre irlandais : 89-7. Au lieu de s’écrouler la semaine d’après, les coéquipiers de Yacouba Camara rebondissent, à domicile, face à Exeter, lauréat en 2020.

« C’est vraiment tout un groupe qui a pris conscience qu’on pouvait faire quelque chose de bien cette saison, appuie l’arrière international (8 sélections). C’est sûrement le déclic par rapport à l’année dernière, où tout le monde ne se rendait peut-être pas compte qu’on avait un super groupe. Faire des choses en dehors (du rugby), entre joueurs, a été hyper important pour garder cette osmose et trouver ce liant qu’on peut avoir sur le terrain. »

« On a essayé de revenir sur l’essentiel : le rugby, c’est déjà de bien vivre ensemble, corrobore l’ancien entraîneur de Toulon (2009-2011). Ça a été la première chose. Ensuite, on a essayé d’identifier nos points forts et de dégager une vraie ADN, une vraie identité dans notre équipe. Pour ça, tu dois avoir l’adhésion des joueurs comme du staff. » Au vu des résultats, Philippe Saint-André a semble-t-il trouvé une oreille attentive auprès de son effectif et de ses adjoints.

Une équipe ultra-réaliste

Tous ces éléments font aujourd’hui du MHR une formation très difficile à manier. Depuis le début de la saison (quatre défaites), elle a toujours récolté des points après chaque rencontre. « ’est ce qui nous aide à être quatrièmes, appuie Anthony Bouthier. Même quand on perd à Bordeaux (27-23)​, on a réussi à aller chercher le point de bonus défensif, et ça fait toute la différence au classement. C’est quelque chose qui nous aide mentalement à ne rien lâcher à chaque match. »

En panne d’efficacité offensive l’an passé, Montpellier est aujourd’hui la quatrième équipe la plus prolifique du Top 14 (339 points), avec deux matches en moins. Pas forcément spectaculaire, le MHR est diablement réaliste. Il a aussi fait des fins de match sa spécialité. Physiquement, les Montpelliérains finissent généralement mieux que leur adversaire, et en profitent pour porter le coup fatal. Le staff – renforcé depuis cet été par l’ancien arbitre international Alexandre Ruiz (discipline et attitudes au contact) et Bruce Reihanna (skills et jeu au pied) – avait précisément axé sur ce point lors de l’intersaison.

LIRE AUSSI. XV de France. Anthony Bouthier forfait et remplacé par Louis Carbonel pour préparer le Tournoi

« On a un groupe de joueurs qui est plus que réceptif, qui est partie prenante dans le projet sportif, se réjouit Philippe Saint-André. On sait d’où on vient donc on n’a pas envie d’y retourner. » La lutte pour le maintien semble désormais bien loin. Le MHR aspire à d’autres ambitions. « Le Top 14 est un marathon, on est à mi-chemin, tempère le technicien. Après, si on termine dans les six premiers, on sait ce qu’il reste à faire si on veut voir le Stade de France. »

Changement d’ère