Restos du cœur : la grosse inquiétude face à la poussée de l’inflation
Les Restos du c?ur ont commencé à dire non. Leur appel à 35 millions d’euros de dons a beau avoir été entendu en septembre ? 10 millions ont été donnés respectivement par l’État et par la famille de Bernard Arnault, le reste par des particuliers et des entreprises ?, face à l’inflation et à la pauvreté, le compte n’y est pas.
Ce mardi 21 novembre, pour le lancement de sa 39? campagne d’hiver, l’association fondée par Coluche en 1985 a dû durcir pour la première fois son barème, refusant notamment son aide alimentaire à des personnes qu’elle accueillait l’an dernier. « Il y a aujourd’hui une vraie vague de précarité qui continue d’augmenter », a déclaré son président, Patrice Douret, exprimant sa « forte inquiétude pour les prochaines semaines et prochains mois », à la ministre des Solidarités, Aurore Bergé, et à celui de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, tous les deux venus visiter un centre de distribution à Asnières, en Île-de-France.
Les Restos ont appelé le gouvernement à porter de 150 à 200 millions d’euros l’aide versée à l’ensemble des banques alimentaires. « Nous ne pesons pas lourd en termes d’argent public, a souligné Patrice Douret. Un euro d’argent public qui nous est versé génère quatre euros d’actions et de moyens déployés. Il s’agit d’un investissement social efficace, avec un effet multiplicateur très puissant. »
Restos du c?ur : « C’est très douloureux »
Alors que 200 000 personnes supplémentaires ont été accueillies l’hiver dernier et que les demandes pourraient continuer d’augmenter, impossible pour les Restos de continuer à faire face, d’un point de vue logistique comme financier. En raison de l’inflation sur les prix de l’alimentation, à 7,8 % en octobre, le budget dédié par l’association a doublé en trois ans. Acculés, pris dans un effet ciseaux, entre baisse des dons, augmentation des prix et explosion du nombre de demandes, les 73 000 bénévoles vont devoir se résoudre à apprendre à dire non.
Une démarche très difficile, explique Éliane, qui aide aux Restos depuis qu’elle a pris sa retraite en 2016. Depuis l’ouverture des inscriptions, il y a deux semaines, vingt familles se sont ainsi vu refuser une aide à Asnières, soit environ 10 % des nouveaux inscrits. Cet hiver, ils pourraient être 150 000 à l’échelon national.
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«Ã‚ C’est très délicat de dire àdes gens ?vous gagnez trop d’argent?, alors qu’ils n’ont pas grand-chose, confie la bénévole. Ils ne le disent pas, mais c’est dur pour eux. Je pense que certains viennent ici avec la peur au ventre? On le voit dans leur regard, dans leurs expressions. C’est très douloureux, mais ils comprennent la situation. Et c’est très dur aussi pour nous. »
Restos du c?ur : enfants, bébés, jeunes et retraités
Le centre d’Asnières accompagne beaucoup de familles monoparentales avec des enfants de moins de 18 mois ? un espace dédié est prévu pour les 150 bébés pris en charge chaque année. Une situation qui rejoint les derniers chiffres de l’Insee : en France, 20,6 % des enfants sont en situation de pauvreté.
Le coin bébés du centre d’Asnières, le 21 novembre 2023. © Lou Roméo, Le Point
Le coin bébés du centre d’Asnières, le 21 novembre 2023. © Lou Roméo, Le Point
À Asnières comme ailleurs, les Restos font aussi face à un afflux de retraités, de jeunes et d’étudiants. Des personnes sans emploi, mais aussi d’autres qui travaillent. 60 % des personnes accueillies par les Restos vivent avec moins de 551 euros par mois, la moitié du seuil de pauvreté. En tout, dans le pays, « plus de 7 millions de personnes sont dépendantes de l’aide alimentaire », a indiqué Marc Fesneau.
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«Ã‚ Une grande précarité s’installe en France, elle est de plus en plus importante, observe Françoise, bénévole àAsnières depuis 2019. On a des retraités avec des pensions de 600 euros, des mères seules qui travaillent vingt ou vingt-cinq heures par semaine parce qu’elles doivent garder leurs enfants le reste du temps et que les modes de garde coûtent trop cher? Une fois les charges et le loyer payés, il ne leur reste pratiquement rien. »
Baisse des quantités et manque de produits
Alors qu’ils font visiter le centre aux ministres et au président de l’association, tous les bénévoles présents espèrent que la « situation va s’améliorer » et qu’ils pourront bientôt répondre à « un petit peu plus de demandes ». Surtout, ajoute Marika, « on espère qu’on ne va pas manquer de réserves cet hiver et pouvoir donner tout le temps ».
En effet, même si le nombre de bénéficiaires sera plus limité, les quantités distribuées, elles aussi, vont baisser. L’an dernier, et jusqu’à cet été, une personne seule pouvait en effet espérer repartir des Restos du c?ur avec de quoi composer neuf repas pour une semaine. Cet hiver, elle n’en aura que sept. Les familles plus nombreuses sont encore moins bien loties : un couple sans enfant devra se contenter de huit rations par semaine, soit quatre repas par personne.
Les Restos du c?ur sont prêts pour le lancement de leur campagne d’hiver, mais les quantités ont diminué, à Asnières, le 21 novembre 2023. © Lou Roméo, Le Point
Les Restos du c?ur sont prêts pour le lancement de leur campagne d’hiver, mais les quantités ont diminué, à Asnières, le 21 novembre 2023. © Lou Roméo, Le Point
Les Restos donnaient par exemple jusque-là un litre de lait par personne et par semaine et ont dû diviser les quantités par deux. Manquent aussi légumes frais, produits de puériculture ou encore d’hygiène. Signe que l’inflation touche de nouvelles catégories de population, et que les retraités s’appauvrissent, « les couches pour personnes âgées contre les fuites urinaires nous sont de plus en plus souvent demandées, expose Marika. Mais nous n’en avons pratiquement pas ».
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