RENCONTRE - "C'était une vague, une force, une pulsion désirante inimaginable", Madeleine Melquiond se livre sur son coup de foudre à 71 ans
RENCONTRE – “C’était une vague, une force, une pulsion désirante inimaginable”, Madeleine Melquiond se livre sur son coup de foudre à 71 ans
À travers son livre À ceux qui nous parlent comme à des enfants, Madeleine Melquiond narre son “voyage en septuagénie”. Une odyssée probe et touchante, qui sert d’appui à l’écrivaine pour dénoncer l’âgisme que subissent les femmes au quotidien.
“Avant qu’elle ne fonde sur nous, la vieillesse est une chose qui ne concerne que les autres”, a écrit Simone de Beauvoir. La fonte de sa vieillesse, Madeleine Melquiond l’a couchée sur papier dans un livre intitulé À ceux qui nous parlent comme à des enfants (Éd. : Max Milo Editions). L’ancienne journaliste devenue écrivaine raconte comment elle a vécu sa “septuagénie”, comprenez, sa septième décennie. Entre bribes du quotidien et anecdotes touchantes, elle retrace son atterrissage dans ce nouvel âge, narre l’évolution non analogue de son corps et de son cerveau, mais surtout, raconte comment les regards environnants ont pris une toute autre dimension, loin d’être agréable. L’occasion pour Femme Actuelle d’aller à la rencontre de cette femme de 79 ans et de recueillir son témoignage, comme un coup d’œil dans la lucarne de ce qui attend tout femme.
“Ma p’tite dame“, un surnom affectueux ou infantilisant ?
Avec le titre de son ouvrage plus qu’évocateur, Madeleine Melquiond s’adresse ainsi à ceux qui ont pour habitude – consciente ou non – de comparer les personnes âgées aux enfants. À titre d’exemple, vous avez déjà très certainement entendu un boulanger prendre un ton qu’il pense être tendre mais en réalité infantilisant en s’adressant à une femme âgée. “C’est comme si en entrant dans ce nouvel âge, on n’était plus relié à notre passé, il n’est pas valorisé. On rentre dans une catégorie à part, un enclos”, nous confie Madeleine Melquiond . Selon l’écrivaine, ces contournements de la vieillesse serviraient à “rassurer” les personnes qui les emploient, les rassurer sur le reflet qui les attend.
Dans son livre, Madeleine Melquiond soulève l’absence de pronom, souvent réitérée dans ce genre de discussions, à l’exemple de “elle a bien dormi ?” ou “elle va bien ce matin ?”. Pour l’autrice, cette rupture vient scinder le passé et le vécu de la personne âgée. Cette forme de déshumanisation est d’autant plus dommage car “on aurait tant de choses à dire”. “Ça se fait beaucoup dans les hôpitaux, et dans les EHPAD, mais aussi au sein des familles”, déplore-t-elle. “Quand on a plus de prénom, plus de pronom, on n’est plus grand-chose. C’est une question de valeur, nous n’avons alors plus de valeur. On est en attente de la mort”, ajoute-t-elle. Si ces comportements typiques n’atteignent pas certaines personnes, Madeleine Melquiond, elle, a compris qu’elle y était “très sensible”.
Les femmes héritent souvent du surnom “ma p’tite dame”, un sobriquet qui n’a pourtant rien d’affectueux selon Madeleine Melquiond. Cette périphrase ramènerait à une notion de fragilité et de vulnérabilité, mais aussi à l’environnement de l’enfance. Néanmoins, l’écrivaine souligne que, la plupart du temps, les personnes qui utilisent ce genre de surnoms cherchent à faire preuve de bienveillance avant tout. Elles le font “pour faire plaisir, sans se rendre compte qu’elle font du mal”. “Nous aussi, il faut qu’on apprenne à s’acclimater à des situations qui ne nous plaisent pas forcément, et au bout d’un certain temps, ça ne nous fait plus rien”, poursuit-elle. S’ajoute à cela aussi le patriarcat, ancré dans les mœurs, suppute l’autrice : “Je ne sais pas trop d’où vient cette habitude prise par la société. On a moins tendance à parler aux hommes comme à des petits vieux.”
Découvrir le coup de foudre une fois le pied dans la septuagénie
C’est à 71 ans que Madeleine Melquiond a connu le coup de foudre. Abstinente depuis plusieurs années, l’amour lui est tombé dessus alors qu’elle promenait son chien dans les rues parisiennes, rive droite, un jour d’octobre. “C’est inexplicable, un coup de foudre”, glisse-t-elle, avant de nous livrer des fragments de cette rencontre inopinée. “Bang ! On se rentre dedans ! On se recule un peu et on se regarde dans les yeux. Je n’avais jamais eu de coup de foudre de ma vie. J’ai eu des amours, des amoureux, des amants. Coup de foudre, jamais. C’était une vague, une force, une pulsion désirante inimaginable et inconnue qui me traversait tout l’esprit et le corps”, se souvient-elle. Un “instant magique et hors du temps” qui s’est métamorphosé en relation.
L’amour, l’abstinence, la sexualité chez les personnes âgées… Dans son ouvrage, Madeleine Melquiond aborde de nombreux sujets et tord le cou à de multiples clichés. “Les personnes âgées sont souvent discrètes pour ne pas encourir des réflexions outrageantes, mais je sais de sources sûres, à savoir grâce aux confidences de mes amies, qu’une femme peut avoir du désir pratiquement jusqu’à la fin de sa vie”, écrit-elle. “On s’en rend compte quand on discute entre femmes. Ça n’éclate pas dans la société, ça ne se sait pas vraiment, c’est comme si ça n’existait pas”, nous explique-t-elle. D’autant plus qu’il y a toute une notion de “dégoût” qui plane autour de la sexualité des aînés. À tort, car la sexualité n’en est que plus belle, souligne l’écrivaine. “Les orgasmes sont fantastiques, je n’en ai jamais eu de pareil. Ils sont tellement forts, épanouissants, animaux. C’est indicible”, termine-t-elle. Une confession qui vient confirmer les résultats d’un récent sondage, comme quoi les femmes préfèreraient leur sexualité à soixante qu’à cinquante ans, et auraient de meilleurs orgasmes à l’âge d’or. Preuve supplémentaire que le voyage en septuagénie s’annonce étincelant.
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