Avec les soutiens de Julian Assange lors de son audience « de la dernière chance »

Avec les soutiens de Julian Assange lors de son audience « de la dernière chance »

Du matin au soir, mardi, plusieurs centaines de manifestants font du bruit devant la Haute Cour de Justice, en plein c?ur de Londres. Certains sont des habitués du cas Assange et viennent, depuis son arrestation il y a cinq ans, à toutes les audiences pour soutenir leur héros avec pancartes, sifflets et masques de Guy Fawkes.

Les slogans sont toujours les mêmes : « Il n’y a qu’une décision : Pas d’extradition ! », « Free, Free Julian Assange ! ». Un mini-van dédié au lanceur d’alertes tourne en boucle autour du tribunal : « Personne ne devrait être en prison pour avoir publié la vérité », lit-on sur le véhicule. Comme toujours, des médias du monde entier sont présents. Tout comme les organisations pour les droits de l’homme et la liberté de la presse.

À LIRE AUSSI « Le combat de Julian Assange n’est ni de gauche ni de droite » Cette fois-ci, l’atmosphère est pourtant différente. Les soutiens sont plus nombreux que d’habitude et viennent souvent de loin. La police peine à faire tenir tout le monde sur les trottoirs. Le moment est crucial. L’extradition du fondateur de WikiLeaks vers les États-Unis ? dont il est question depuis plus de dix ans ? pourrait avoir lieu dans quelques jours. C’est l’audience « de la dernière chance », répète-t-on ici. Le « Day X » qui, selon une formule de Reporters sans frontières, « marque le début de la fin de la procédure judiciaire britannique » plaçant Julian Assange face au gouvernement américain.

« S’il est extradé, il mourra »

Ces 20 et 21 février, deux juges britanniques examinent la demande de l’équipe d’Assange de faire appel d’un verdict rendu en mars 2022 par la Cour suprême. Elle avait alors refusé d’autoriser le lanceur d’alerte à faire appel de son extradition, approuvée par le gouvernement de Boris Johnson trois mois plus tard.

À LIRE AUSSI « Il ne survivra pas » : la femme de Julian Assange alerte sur les risques de son extradition vers les États-UnisSi la justice accepte la demande, un appel aura lieu. Si elle la rejette, les États-Unis pourront récupérer Assange. L’Australien de 52 ans y risque jusqu’à 175 ans de prison pour la publication en 2010 de centaines de milliers de documents classifiés, notamment sur les activités de l’armée américaine en Irak et en Afghanistan. Son équipe a indiqué qu’elle saisirait alors la CEDH.

Maggie et Steve Denis sont arrivés dans la nuit du Pas-de-Calais pour soutenir Julian Assange. © LVR

Maggie et Steve Denis sont arrivés dans la nuit du Pas-de-Calais pour soutenir Julian Assange. © LVR« S’il est extradé, cela veut dire qu’il mourra, s’indigne Karl, venu de Hanovre en Allemagne avec son épouse. Il est déjà en train d’être lentement torturé à mort en prison ici. » Assange est incarcéré depuis avril 2019 dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, dans la banlieue est de Londres, en attendant que son sort se scelle. « Pourquoi est-il enfermé comme ça ? s’indigne Maggie Denis, qui a fait le trajet avec son mari Steve dans la nuit depuis le Pas-de-Calais. C’est inacceptable, nous sommes censés être des démocraties, nous donnons des leçons aux autres. Même les animaux, on n’accepterait pas de les enfermer comme cela. » Assange ne viendra pas mardi pour des « raisons de santé », selon son avocat.

Symbole de « vérité »

L’état de santé physique et mental d’Assange s’est nettement dégradé depuis 2012, l’année où il a trouvé l’asile à l’ambassade d’Équateur et qu’il n’a pas quittée pendant sept ans. Sa santé inquiète surtout Stella Assange, l’avocate qui le défend corps et âme, devenue son épouse en prison il y a deux ans. Aucune photo des mariés n’avait d’ailleurs été tolérée.

Julian est un prisonnier politique et sa vie est en danger. Ce qui est arrivé à Navalny peut arriver à Julian. (Pause). Il doit être libéré. Cette farce doit cesser !Stella Assange

Devant la Haute Cour, Stella est une star, poursuivie par les caméras et interpellée de tous les côtés par ses fans. Avant d’entrer dans le tribunal, elle emploie des mots forts devant la presse : « Julian est un prisonnier politique et sa vie est en danger. Ce qui est arrivé à Navalny peut arriver à Julian. (Pause) Il doit être libéré. Cette farce doit cesser ! »

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La comparaison avec l’opposant russe ne convainc pas les manifestants. « Nous avons nos favoris en Occident, comme Navalny, les gens l’aiment alors qu’il servait les intérêts impérialistes, assure Karl. Mais on ne parle pas de Julian Assange, notre propre prisonnier politique. Comme d’habitude : doubles standards et hypocrisie. » Il formule la même accusation à l’égard de Gaza. Devant la cour, les keffiehs et drapeaux palestiniens se comptent par dizaines dans la foule. Les députés les plus engagés pour la cause palestinienne, comme Jeremy Corbyn, Zarah Sultana ou encore la députée européenne Clare Daly, ont pris la parole sous les applaudissements.

Pour ses soutiens, Julian Assange est surtout un symbole de « vérité ». « Pour moi, ce qui est en jeu est de savoir ce qui est vrai ou pas, explique Levy, un Norvégien habitant Londres qui s’est intéressé au cas Assange depuis son arrestation. La presse est le quatrième pouvoir, s’ils ne peuvent tenir responsables ceux qui nous gouvernent, comment savoir la vérité ? » « C’est la liberté de tout le monde qui est en jeu », complète Steve Denis, enveloppé dans un drapeau tricolore. Pour Clara Campos, une activiste de la première heure, « il a publié ce qu’il devait publier, car c’est un journaliste. L’abus de la liberté de la presse et des droits de l’homme de cet homme dépasse l’entendement. » Elle revient ce mercredi devant la Haute Cour pour faire du bruit.