Attentats de Trèbes et de Carcassonne en 2018: ouverture du procès pour la mort de quatre personnes dont Arnaud Beltrame

attentats de trèbes et de carcassonne en 2018: ouverture du procès pour la mort de quatre personnes dont arnaud beltrame

Le 26 mars 2018, un gendarme monte la garde devant le Super U de Trèbes, où plusieurs personnes, dont le gendarme Arnaud Beltrame, furent assassinées trois jours plus tôt par le terroriste Radouane Lakdim.

C’était il y a six ans déjà, à l’ombre des splendeurs de la cité médiévale de Carcassonne.

Six hommes et une femme, âgés de 24 à 35 ans, sont jugés à partir de lundi et jusqu’au 23 février à Paris par la cour d’assises spécialement composée. Tous étaient liés à Radouane Lakdim, qui, le 23 mars 2018, a assassiné quatre personnes, dont le gendarme Arnaud Beltrame, et en a blessé seize autres à Carcassonne et à Trèbes (Aude). Le terroriste, connu des services spécialisés et qui se proclamait soldat de l’État islamique, a été tué le jour de l’attentat. L’attaque a été revendiquée par l’État islamique, mais l’enquête n’a pas permis d’identifier de liens opérationnels entre le tueur et l’organisation terroriste.

En l’absence du terroriste, le procès donnera bien sûr l’occasion de revenir sur les conditions de ces attentats au cours duquel Radouane Lakdim, délinquant âgé de 36 ans et issu d’une famille d’origine marocaine, a frappé des cibles qu’il connaissait bien, proches de son lieu d’habitation. Ce 23 mars 2018, en début de matinée, le terroriste quitte son domicile de la cité Ozanam, quartier de HLM de Carcassonne connu pour son trafic de stupéfiants et des affrontements avec les forces de l’ordre. Il se rend sur un parking voisin pour y dérober un véhicule. Armé d’un 7,65 mm, il tire dans la tête des deux occupants d’une Opel Corsa. Jean-Michel Mazières, 61 ans, est tué sur le coup et José Renato Gomes de Sousa e Silva, 26 ans, est très grièvement blessé. Au volant de la voiture volée, le tueur aurait alors hésité à attaquer une caserne avant de se diriger vers les bâtiments de la CRS locale, non loin de la cité Ozanam. Il tire sur quatre policiers d’une autre compagnie républicaine de sécurité qui faisaient du footing. L’un d’eux, âgé de 43 ans et originaire de Marseille, est blessé au thorax.

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Il est environ 10 h 30 quand Radouane Lakdim emprunte ensuite la voie rapide qui conduit, à quelques kilomètres de là, à la commune voisine de Trèbes. Il se gare sur le parking du supermarché Super U et se dirige vers le magasin. Il abat immédiatement d’une balle dans la tête le chef boucher, Christian Medves, 45 ans, et un client, Hervé Sosna, 60 ans. Le terroriste circule dans le supermarché, insulte clients et salariés avant de revenir près des caisses au niveau de l’accueil. Il prend en otage une caissière âgée de 40 ans et s’enferme avec elle dans un local jouxtant la zone d’accueil servant de réserve, de bureau et de salle des coffres. Le terroriste appelle le commissariat local pour revendiquer les tueries au nom de l’État islamique. Le GIGN de Toulouse est alerté et envoie une équipe sur place. Peu après 11 heures, un groupe de gendarmes du peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie de Carcassonne pénètre dans le Super U. Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, 44 ans, engage le dialogue avec Radouane Lakdim et parvient à le convaincre de libérer l’otage en se substituant à elle. À 14 h 30, le terroriste égorge l’officier de gendarmerie et lui tire dessus. Le GIGN abat le tueur. Arnaud Beltrame meurt de ses blessures.

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Un microcosme local propice à la radicalisation

Aucun des sept accusés, parmi lesquels la compagne de Radouane Lakdim, ne se voit juridiquement reprocher une complicité dans ces assassinats. Deux d’entre eux sont concernés par des délits connexes: Baghdad Haddaoui, 35 ans, est accusé de non-dénonciation de crime terroriste et Sofiane Manaa, 32 ans, est poursuivi pour détention d’armes. Les cinq autres sont essentiellement poursuivis pour association de malfaiteurs terroriste criminelle. Présenté comme un «caïd» dirigeant les trafics d’Ozanam, Reda El Yaakoubi, 34 ans, est accusé d’avoir eu connaissance du «caractère radicalisé de Radouane Lakdim et de sa proximité avec les idées de l’État islamique prônant la commission d’attentats sur le territoire national». Il aurait pourtant accepté et maintenu le terroriste «au sein du groupe criminel qu’il dirigeait, centré sur le trafic d’armes et de stupéfiants, en lui donnant ainsi accès à des moyens financiers ayant permis le financement et la réalisation du projet d’attentat», «enfournissant un moyen de transport pour l’acquisition d’un poignard» et «en mettant (à la disposition de Lakdim) des armes dont certaines ont été reprises par le groupe criminel après l’attentat».

Pour sa part, Ahmed Arfaoui, 29 ans, beau-frère de Lakdim, aurait dissimulé des armes après l’attentat. Sofian Boudebbouza, 25 ans, aurait renforcé la radicalisation de son ami et partagé ses convictions djihadistes. Samir Manaa, 28 ans, le frère de Sofian, a accompagné son ami Radouane Lakdim pour aller acheter un couteau de chasse quelques jours avant l’attentat. Enfin, Marine Pequignot, 24 ans, convertie à l’âge de 17 ans, partageait l’idéologie de son compagnon et aurait approuvé son passage à l’acte. Seuls Arfaoui et Samir Manaa sont en détention provisoire.

«Forme d’omerta»

Au-delà de l’attentat, ce procès sera aussi celui d’un microcosme local propice à la délinquance et à la radicalisation. L’ordonnance de mise en accusation souligne que l’enquête a établi que «la ville de Carcassonne était le théâtre de trafics en tous genres, du trafic de stupéfiants à celui des armes en passant par la contrebande de cigarettes, en particulier dans la cité Ozanam», Radouane Lakdim étant «l’un des acteurs de ces trafics». L’homme ne masquait pas ses convictions à ses proches. Il s’était confié «à des filles sur son engagement idéologique, religieux et djihadiste», avait «diffusé des images de lui armé sur les réseaux sociaux, transmis par les mêmes canaux des messages religieux à ses contacts, peint sur un mur extérieur chez lui les initiales de l’État islamique». Mais, notent les juges, «ses amis masculins, avec lesquels il passait beaucoup plus de temps et avec lesquels il se livrait à des activités illégales» sont restés silencieux, «respectant une forme d’omerta liée à la culture des cités concernées». Surnommé le «maire d’Ozanam», un témoin, voisin et ami de la famille Lakdim, notera pourtant que, «depuis environ quatre ans avant les faits», Radouane Lakdim était surnommé «Kalash» et qu’il «voulait prendre les armes pour défendre ses frères au Levant»… Si elle avait été rompue, l’omerta d’Ozanam aurait sauvé des vies.

L’étonnante relation entre un caïd et la préfecture

Mais la situation locale était encore plus étonnante. À moins qu’elle ne soit d’une triste banalité dans la France des banlieues. Les juges notent en effet que, au cours de l’enquête, il est apparu que le caïd El Yaakoubi était en contact avec le délégué à la politique de la ville du préfet de l’Aude. Relation normale entre un fonctionnaire et un leader local très engagé et fondateur d’un club de foot? «Leurs conversations, soulignent les juges, révèlent une relation étroite, basée sur l’échange de “services”, le premier obtenant ainsi des mises hors de cause ou des reports d’audition par la police dans des affaires où il paraît impliqué, et le second obtenant des informations relatives aux incidents dans le quartier et un retour au calme, dès lors que Reda El Yaakoubi a l’autorité suffisante pour se faire obéir dans la cité».

Et d’enfoncer le clou: «Sa capacité (celle de l’accusé) à garantir au moins temporairement une forme de paix sociale à Ozanam a fait de lui un interlocuteur de la préfecture.» Un interlocuteur «qui a bénéficié en retour non seulement d’informations couvertes par le secret professionnel, mais aussi de traitements de faveur et d’une forme d’impunité» grâce à des «indications sur le positionnement du procureur de la République de Carcassonne», en l’assurant «que ses auditions ne seraient pas trop longues», voire en «lui soufflant même une version à fournir à la police».

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