Selon l’Insee, en France, le taux de chômage a augmenté de 0,2 point au troisième trimestre 2023, à 7,4 %. Photo d’illustration.
En économie, les prévisions sont importantes. Elles aident, voire influencent, les dirigeants politiques ou les chefs d’entreprise dans leurs prises de décisions. Mais aussi les ménages. En 2024, faudra-t-il investir ? Embaucher ? Épargner ? Un expert en prévision macro-économique livre son analyse.
Alors que 2024 démarre, Ouest-France a interrogé Cyril Blesson, macro-économiste des cahiers de la consommation (en partenariat avec le Credoc). Enseignant à Paris-Dauphine en Epargne et finances de l’économie. Il est aussi co-fondateur de PAIR Conseil, un pôle d’expertises en prévision, modélisation, simulation, conseil économique et financier.
Comment s’est comporté le pouvoir d’achat en 2023 ?
Beaucoup pensent qu’il a baissé l’an dernier avec une inflation qui est restée élevée en moyenne annuelle (4,9 % en 2023 quand elle s’élevait à 5,2 % un an plus tôt) mais au sens macroéconomique, c’est-à-dire pour le secteur ménages au global, il a progressé de 0,7 % contre 0,2 % en 2022. Les revenus de l’épargne ont augmenté, les retraites ont été revalorisées, et il a été protégé avec des soutiens budgétaires de l’État comme le chèque-énergie, la suppression de la taxe d’habitation, etc. La bonne tenue de l’emploi en 2023 a aussi participé à une augmentation des revenus d’activité.
À quoi faut-il s’attendre en 2024 ?
D’abord les points positifs : les revenus liés à l’épargne (livret A, assurance-vie..) sont orientés à la hausse, l’annonce de la revalorisation de 5,3 % des retraites va protéger le pouvoir d’achat de tous les retraités moyennant 14 milliards d’euros pour les finances publiques ! La hausse des salaires devrait atteindre 3 à 3,5 % en moyenne, tous secteurs confondus. Nous prévoyons une moindre progression des prix à la consommation, avec une inflation en recul à 2,4 % en 2024. Mais un pouvoir d’achat en progression de seulement 0,1 % par rapport à 2023. Nous ne faisons pas partie des prévisionnistes, les plus optimistes.
Cyril Blesson, co-fondateur de Pair Conseil, cahiers de l’épargne et de la consommation (avec le Credoc). Expert en prévisions macro-économiques, son cabinet a été lauréat des prévisions économiques en 2022 par la publication internationale Consensus Economics.
Lire aussi : Les prix flambent moins vite que début 2023… mais ils continuent d’augmenter : voici de combien
Et les points négatifs ?
Nous anticipons deux mauvaises nouvelles. D’abord, les soutiens de l’État pour le pouvoir des ménages diminuent voire s’arrêtent. Ensuite, et c’est ce qui nous inquiète le plus, l’emploi ralentit fortement en France. Selon les enquêtes des entreprises, leurs perspectives d’embauches plongent. Les cabinets de recrutement confirment qu’il y a moins de tension. D’ailleurs, l’intérim baisse, c’est un indicateur avancé.
Quel est impact du ralentissement de l’emploi sur le pouvoir d’achat ?
Si l’emploi se corrige, il y aura moins de revenus d’activité et les salariés perdront en pouvoir de négociation salariale. Et la mobilité sera moins importante. Comme nous parlons de l’ensemble des ménages, si l’emploi diminue, le pouvoir d’achat aussi. Contrairement à ce que l’on pense souvent, le pouvoir d’achat a bien deux composantes : l’évolution des prix et celle des revenus.
Comment expliquez-vous ce ralentissement des embauches ?
Les entreprises sont prudentes. Elles font face à une situation économique « bizarre ». D’un côté, elles doivent composer avec une demande atone, la consommation ne progresse plus. De l’autre, elles ont vu leurs coûts salariaux et d’emprunt augmenter. Comme elles ont moins de demandes, elles ne peuvent plus augmenter leur prix. Pour garder des parts de marché, elles cherchent à rétablir leur productivité pour préserver leurs marges et pourraient rogner sur l’emploi.
Le niveau d’épargne resterait-il élevé en 2024 ?
C’est une des variables les plus difficiles à prévoir en macro-économie. Quand le pouvoir d’achat ralentit, les ménages ont tendance à désépargner. Pour 2024, nous prévoyons une légère baisse du taux d’épargne (les revenus non consommés par les ménages). Avant le covid, le taux d’épargne s’élevait en moyenne à 14 %. Nous sommes l’un des pays qui se normalise le moins rapidement de ce point de vue. En effet, en 2023, il est resté bien plus élevé que son niveau pré-Covid à 17,6 %. En 2024, nous tablons sur 17 %. La confiance des ménages est très déprimée. Je pense qu’ils vont rester en mode « fourmi » en 2024.
Comment l’expliquez-vous ?
L’environnement anxiogène ne pousse pas à la consommation. Nous sommes un pays vieillissant et nous avons eu beaucoup de soutiens aux revenus par les pouvoirs publics. La revalorisation des retraites participe à maintenir un taux élevé d’épargne car, avec les 20 % des Français aux revenus les plus élevés, les retraités sont la catégorie qui épargne le plus.
Quelles sont les principales menaces pour l’économie en 2024 ?
Une hausse du prix du pétrole en raison des conflits au Moyen-Orient. Une nouvelle hausse des prix du fret en raison des attaques en mer Rouge. Il y a aussi le risque que plusieurs pays européens se mettent à faire de l’austérité budgétaire en même temps. En diminuant la dépense publique, la demande des ménages, des entreprises et bien sûr des administrations publiques est impactée. La situation économique en Allemagne est aussi à surveiller car il s’agit de notre principal partenaire économique.
Pensez-vous que les Jeux Olympiques auront un impact important sur l’économie ?
Les JO pourront dynamiser temporairement l’activité mais ne permettront pas d’échapper au ralentissement économique qui nous attend en 2024.
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