Guerre en Ukraine : le récit de deux combattants français de la « Task Force Baguette »

guerre en ukraine : le récit de deux combattants français de la « task force baguette »

Guerre en Ukraine : le récit de deux combattants français de la « Task Force Baguette »

Ils ont décidé de se battre pour un pays qui n’est pas le leur. Adam K. et Donny D. sont deux anciens soldats français engagés dans la « Task Force Baguette ». Dans un livre portant le nom de leur unité, les deux trentenaires français racontent les dix-neuf mois qu’ils ont passés en Ukraine. Un récit à hauteur d’hommes dans lequel ils narrent leur quotidien de combattants : l’attente, les discussions entre « frères d’armes », les missions réussies mais aussi les échecs.

Les raisons de leur engagement en Ukraine sont similaires à celles qui les ont poussés à rejoindre l’armée française il y a quelques années : « défendre les valeurs démocratiques et occidentales ». « En plus, ton pays supporte la cause, il y a un contrat légal avec l’armée ukrainienne », complète Adam K. Ce dernier précise aussi avoir des origines d’Europe de l’Est. « Il y a toujours eu cette pression russe. » En 2022, au moment de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Adam et Donny ne sont plus en contrat avec l’armée française et peuvent rejoindre l’Ukraine.

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La Task Force Baguette, dont le nom a été décidé au coin du feu après une blague, compte dans ses rangs entre trois et quatorze Occidentaux, selon les périodes. Les combattants ont notamment participé à des missions de reconnaissance et d’infiltration. Donny et Adam racontent aussi leur participation à la contre-offensive ukrainienne de septembre 2022, « une fierté » pour eux. La Task Force a été mise au courant de l’opération « un ou deux jours avant » le début des hostilités. « On savait qu’on allait faire quelque chose de gros », racontent-ils.

guerre en ukraine : le récit de deux combattants français de la « task force baguette »

La Task Force Baguette regroupe majoritairement des combattants occidentaux.

La Task Force Baguette regroupe majoritairement des combattants occidentaux. Les deux Français n’avaient jamais connu un conflit similaire. « Même des soldats qui ont fait l’Afghanistan ou l’Irak n’ont pas connu ça. Personne n’avait expérimenté une guerre comme ça auparavant. »

Donny, ancien chasseur alpin, a été déployé en opération extérieure en Afrique. Mais pas Adam qui, lui, a participé à Sentinelle. Une opération aux antipodes de ce qu’il a expérimenté durant dix-neuf mois en Ukraine. Et notamment à Bakhmout où l’unité a longtemps été déployée. Il raconte la difficulté des combats urbains et notamment les tirs fratricides. « Tout le monde se tire dessus. Il y a le stress, la peur, la nuit et le froid, c’est le chaos total. Et à la vue de la mort, tu ne réfléchis pas longtemps, tu tires. »

Même s’il a travaillé à Bakhmout, Adam n’en tire pas de gloire particulière. « À Bakhmout ou ailleurs, le danger est partout. Pas besoin d’y être pour se faire éclater », raconte-t-il, le sourire en coin. « Le plus important, c’est la mission. »

« Si t’es pas débrouillard, tu meurs »

Aucun membre de la Task Force Baguette n’est mort en Ukraine. Adam en est conscient, il est chanceux d’être encore en vie. « C’est 50 % de chance, 50 % de compétence. On est tous vivant grâce à la chance, c’est le loto de la guerre. »

En Ukraine, Adam et Donny découvrent un pays confronté subitement à une guerre de haute intensité où un mot est roi : la débrouillardise. « On s’est sortis de chaque situation compliquée aussi car nous sommes des soldats entraînés. Si t’es pas débrouillard, tu meurs. Personne ne viendra te chercher. »

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Les nombreux impacts d’obus témoignent de la violence des combats auxquels la Task Force Baguete a pris part.

Les nombreux impacts d’obus témoignent de la violence des combats auxquels la Task Force Baguete a pris part.

Là-bas, les deux Français rencontrent les civils ukrainiens, « toujours choqués de nous voir ». « Ce n’est pas la même connotation que si on était polonais ou géorgiens. Ils se sentent soutenus. Et les soldats ukrainiens ont encore plus la hargne quand ils se battent avec nous, notre présence booste leur moral. »

Leur témoignage permet de comprendre le quotidien d’un soldat engagé dans un conflit de haute intensité. Un quotidien fait d’attentes. « Sur les dix-neuf mois, si on cumule toutes nos missions, on a passé environ trois mois sous le feu, je pense », estime Adam. Pour passer le temps, il y a bien sûr le sport et les entraînements, mais aussi l’humour. « Il faut se marrer pour survivre, sinon tu finis dépressif », rigole Adam.

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Le livre revient longuement sur le déroulé de certaines de leurs missions et les difficultés rencontrées pour une unité composée d’étrangers. « La communication, c’est la merde. Mais t’arrives toujours à te faire comprendre. Quand t’es au feu, tu n’as pas besoin de parler pour comprendre ce qui se passe », raconte Adam, qui vit au Canada. Lui est formel : il ne retournera pas en Ukraine. « J’ai fait dix-neuf mois là-bas, il faut penser à soi aussi. Je suis fier de ce que j’ai fait mais il faut tourner la page. Je m’acclimate au retour à la vie normale, j’ai laissé la guerre où elle était. »

Deux ans après le début de l’invasion, Donny combat, lui, encore en Ukraine mais avec une unité autre que la Task Force Baguette.

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Task Force Baguette, deux soldats français sur le front ukrainien, d’Adam K. et Donny D., éd. Denoël, février 2024, 185 pages, 19 euros.

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