Hollywood, l’homophobie, la transition… On a lu l’autobiographie d’Elliot Page

Hollywood, l’homophobie, la transition… On a lu l’autobiographie d’Elliot Page

En 2020, Ellen Page devient Elliot. Dans son autobiographie « Pageboy », l’acteur se raconte à travers sa carrière, sa vie sentimentale, sa transition de genre et les traumatismes causés par le rejet qu’il a vécu tout au long de son existence.

Dans la préface, la star confie écrire ce texte comme une main tendue que lui-même aurait aimé saisir lorsqu’il grandissait :

«Ã‚ Ecrire, lire et partager nos multiples expériences constitue une étape essentielle pour affronter les gens qui veulent nous faire taire. Je n’ai rien de nouveau ni de profond à raconter, rien qui n’ait déjà été dit, mais je sais que les livres m’ont porté secours, sauvé même, alors peut-être que ce récit pourra aider des personnes à se sentir moins seules, mieux considérées, quel que soit leur parcours. Merci de vous intéresser au mien. »

Ombres et lumières d’Hollywood

Dans ce livre poignant, Elliot Page raconte ses castings, la liberté ressentie lors du tournage de « Juno » et de « Bliss », les belles rencontres… Mais aussi l’envers du décor lorsqu’on exerce un métier de l’image et qu’on n’est soi-même pas en phase avec son reflet. Jouer dans un film, c’est aussi assurer sa promotion, et qui dit promotion dit robe, talons et maquillage pour les filles. Elliot aurait préféré porter des smokings, mais impossible, à l’époque, d’avouer cette préférence. De même, l’exposition offerte par le succès de « Juno » en 2007 a accéléré les questionnements du jeune homme sur sa sexualité et son genre. En première page de tous les tabloïds, comment se construire quand on entend l’avis des autres sur soi en permanence ?

A Hollywood, l’acteur a aussi été victime d’homophobie récurrente, et notamment de la part d’une célébrité dont il ne dévoile pas le nom. Dans le chapitre « Un célèbre connard », il révèle que ledit individu l’a insulté peu de temps après son coming out lesbien, lui disant :

«Ã‚ C’est dans ta tête, t’es pas lesbienne ! T’as juste peur des hommes ! »

Mais l’industrie cinématographique a aussi charrié son lot de bonnes surprises, comme la rencontre avec Olivia Thirlby, sa partenaire dans « Juno ». Elliot Page révèle qu’elle et lui ont vécu une idylle durant le tournage du film. C’est aussi lors d’un tournage, celui de « Bliss » en 2009, qu’Elliot rencontre ses co-actrices dont Kristen Wiig, qui s’avérera être une fidèle amie et un pilier sur lequel s’appuyer dans la longue lutte de l’acteur vers l’acceptation de soi. Egalement, le fait de jouer une personne qui entre dans le monde du roller derby (sport intimement lié aux luttes des communautés queer) l’a aidé dans le cheminement vers le coming out.

Hollywood, résume Elliot Page, est une industrie ambivalente en ce qui concerne la reconnaissance des personnes LGBTQIA + :

«Ã‚ Hollywood joue sur les deux tableaux quand il s’agit d’homosexualité. Quand ça l’arrange, l’industrie du cinéma ne veut pas en entendre parler ; si ça devient rentable, elle s’empare du sujet en se congratulant. Ce n’est pas Hollywood qui va montrer l’exemple, l’industrie ne fait que rebondir, suivre, et toujours avec un train de retard. Elle ne comprend pas la complexité d’un coming out, la multitude de secrets enfouis que cela induit. Hollywood est insensible aux conséquences de son fonctionnement. »

Un témoignage nécessaire

Outre sa carrière compliquée, Elliot a aussi vécu des violences familiales, notamment de la part de son père, sa belle-mère et les enfants de celle-ci qui le harcelaient moralement. Dans le livre, le comédien raconte à quel point cette cellule familiale supposée aimante a pu être violente.

Dans « Pageboy », l’acteur partage surtout un quotidien hors du commun : celui d’un personnage public qui est également une personne trans. Il aborde des thèmes primordiaux en ce mois de juin des fiertés comme la dysphorie de genre (sentiment de détresse exprimé par les personnes dont l’identité de genre ne correspond pas au sexe qui leur a été assigné à la naissance), la découverte de sa sexualité ou l’importance de se faire aider par des professionnels de la santé mentale.

« Pageboy »

, par Elliot Page, traduit de l’anglais par Marie Brazilier, Kero, 288 p., 21,50 euros.