Missak Manouchian : les coulisses d’une panthéonisation

Le résistant communiste arménien entrera le 21 février, accompagné de sa femme, dans le temple des immortels français.

Missak Manouchian : les coulisses d’une panthéonisation

Quelques heures avant d’être fusillé au Mont-Valérien, comme vingt et un autres résistants de son groupe, le 21 février 1944, Missak Manouchian écrit à sa femme, Mélinée, une lettre d’adieu prophétique. « Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la liberté sauront honorer notre mémoire dignement. » Quatre-vingts ans plus tard, jour pour jour, le poète arménien, à qui l’on a refusé deux fois la nationalité française, militant communiste chef militaire des Francs-tireurs et partisans de la Main-d’œuvre immigrée (FTP-MOI), fera son entrée au Panthéon accompagné de son épouse. La fameuse phrase sera inscrite sur le caveau numéro XIII, dans la crypte du temple des grands hommes français.

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«РІР‚‰JРІР‚в„ўai toujours considГ©rГ© Missak Manouchian comme un personnage exceptionnel et un symbole », note Jean-Pierre Sakoun, Г  lРІР‚в„ўorigine de cette panthГ©onisation, aprГЁs une premiГЁre tentative lancГ©e par le dГ©putГ© socialiste Jean-Marc Germain en 2014, qui avait proposГ© lРІР‚в„ўentrГ©e de Р’В­lРІР‚в„ўensemble du groupe Manouchian. « On entre toujours au PanthГ©on comme un symbole, ajoute Sakoun. Jean Moulin Г©tait celui de la rГ©sistance, JosГ©phine Baker de la lutte contre lРІР‚в„ўapartheid et de la rГ©sistance des Г©trangers dans les Forces franГ§aises libres. Missak Manouchian comme symbole des Г©trangers, de la rГ©sistance communiste et de lРІР‚в„ўamour du pays et de la littГ©rature. »

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Président de l’association Unité laïque, Jean-Pierre Sakoun a d’abord créé un groupe sur Facebook, en 2009, avant d’attendre la bonne occasion pour aller plus loin. « Fin 2020, l’initiative pour l’entrée de Joséphine Baker a commencé, ajoute-t-il, ­portée par un de mes amis, Laurent Kupferman, qui m’a demandé si mon association pouvait la soutenir. Ça correspondait à nos idéaux. Je lui ai dit : “Est-ce que ça ­t’ennuie si dans notre communiqué nous demandons d’y associer, ‘un jour ou l’autre’, Missak Manouchian” ? Et ça s’est fait. »

Pour le 80e anniversaire de sa mort

Les choses s’accélèrent en mars 2021. En ligne de mire : février 2024 et le 80e anniversaire de sa mort. La démarche est fondée sur l’unité nationale pour « participer à la reconstruction d’une mémoire et d’une histoire républicaine positive de notre pays ». On recherche le soutien d’un éventail politique allant des communistes aux Républicains. Une première tribune est publiée dans « Libération » début 2022, puis en mars, un vote de soutien passe au conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes de Laurent Wauquiez (LR) et d’Occitanie chez Carole Delga (PS). D’articles de presse en comités de soutien, la démarche attire ­l’attention de l’Élysée, où le groupe est reçu par le conseiller mémoire du président, Bruno Roger-Petit.

Le Palais tient à ce que la dépouille soit transférée au Panthéon, pas seulement son cercueil. La famille accepte à condition que les époux ne soient pas ­séparés. Emmanuel Macron confirme fin mars 2022 que cette entrée a « beaucoup de sens ». Le 16 juin 2023, il reçoit les initiateurs du projet et leur confie qu’il annoncera la panthéonisation quelques jours plus tard, après une cérémonie au Mont-Valérien. « Je lui ai demandé que les 23 noms du groupe Manouchian (dont Olga Bancic, exécutée en Allemagne en mai 1944) et de leur chef Joseph Epstein (fusillé en avril 1944) soient également inscrits sur le caveau. Il a accepté. »

En décembre 2023, nouvelle rencontre, cette fois dans la crypte du Panthéon, avec la petite-nièce du résistant, Katia Guiragossian, pour choisir le caveau. Il fera face à celui ­d’André Malraux, dont les mots ont accompagné la panthéonisation de Jean Moulin, comme ceux de Louis Aragon ­résonneront, mercredi prochain, pour Manouchian.