Trouver sa palette de couleurs ? Le nouveau business juteux qui explose sur TikTok
Cette machine à tendances qui ne dort jamais, répondant au nom de TikTok, met la lumière sous un nouveau phénomène qui rapporte. Populaire dans les années 1980, l’analyse des couleurs connaît de nouveau un succès inattendu chez de nombreuses personnes, prêtes parfois à payer des centaines d’euros pour savoir à quelles saisons de couleurs elles appartiennent. Pour cela, elles toquent à la porte d’experts en colorimétrie qui leur indiquent les nuances qui vont le mieux à leur couleur de peau. Teintes chaudes ou au contraire très froides ? Été caniculaire ou automne chaleureux ? Pour connaître leur diagnostic, les clients sont installés face à un miroir comme ils le seraient chez le coiffeur, le professionnel juste derrière, et essaient différents bavoirs de tissus de couleurs, afin de mettre le doigt sur l’évidence, la teinte qui permettra de définir la saison qui correspond le mieux à leur carnation.
Tatum Schwerin se fait appeler la reine de l’analyse des couleurs sur les réseaux sociaux. Elle organise environ 60 séances par mois depuis son domicile à Frisco, au Texas, dans le but d’identifier la palette qui convient autant à la peau, aux cheveux qu’aux yeux d’une personne. Chaque consultation de 90 minutes coûte 479 dollars, rapporte le New York Times. Et les demandes sont nombreuses. L’Américaine de 44 ans a expliqué avoir du mal à répondre à toutes les sollicitations. Très populaires sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok, ces vidéos cumulent les millions de vues. Tatum Schwerin fait partie d’une vague d’influenceurs qui transforment l’analyse des couleurs saisonnières en une activité très lucrative. Si certains trouvent cela intéressant, très friands des recommandations en matière de vêtements ou de maquillage, d’autres questionnent encore l’utilité de payer 500 dollars pour savoir que le jaune n’illumine pas tant leur visage.
La Corée du Sud à l’assaut de cette tendance
Si le phénomène s’est répandu partout dans le monde, il est aussi très populaire en Corée du Sud. Temple de la skincare et des soins esthétiques en tout genre, les coiffeurs y pratiquent l’analyse des couleurs afin de savoir quelles nuances iraient le mieux à leur client. Il existe également des salons dédiés à cette pratique. Et quelques fois, les résultats sont surprenants pour les clients. «On a déterminé que les couleurs chaudes m’allaient le mieux. La spécialiste m’a dit que j’étais un “printemps brillant”, ce qui signifie que les couleurs vibrantes sont celles qui me conviennent le plus», explique Darcei Giles dans une de ses vidéos TikTok, après avoir effectué 14 heures de vol, de Toronto à Séoul, pour obtenir cette consultation. «Petit bémol : je ne porte que des couleurs neutres ou du noir. (…) Et vous pouvez voir la déception sur mon visage quand elle me dit que toutes les couleurs pastels que j’aime me font ressembler à un enfant malade de l’époque victorienne», finit-elle par ajouter. Elle a cependant précisé que ce rendez-vous lui avait permis de faire ses achats plus efficacement. «C’est presque comme découvrir votre signe astrologique pour la première fois et vous dire : “Oh mon Dieu, c’est tellement logique”», s’enthousiasme la jeune femme devant son téléphone. Chez Meime Color and Beauty, un salon d’analyse de couleurs à Séoul, une séance de deux heures coûte 120 000 won, soit un peu plus de 80 euros. L’établissement est d’ailleurs complet jusqu’en juin prochain.
Ces analyses vues par la science
Bevil Conway, un neuroscientifique qui a étudié la façon dont les humains perçoivent les couleurs, explique que si les teintes peuvent contraster différemment en fonction des vêtements ou du maquillage avec lesquelles elles sont associées, les conseils apportés par ces «spécialistes» relèvent de la subjectivité. «Les gens prennent un petit grain de science et ensuite cela se gonfle pour devenir un énorme sujet, a-t-il déclaré au journal américain. Ce qui est flatteur est très subjectif. L’utiliser comme un outil, c’est bien. Je pense que commencer à formuler des affirmations normatives sur la beauté est le point où je tracerais la limite», a-t-il tenu à ajouter.
Certains y voient aussi une fascination toujours plus grande pour l’examen, l’évaluation et la catégorisation de nos apparences. Sarah Novio, une influenceuse qui pratique ces analyses, est la première à soulever ces questions. «Les gens aiment avoir un sentiment d’appartenance. Être catégorisé dans une saison donne aux gens ce sentiment», explique-t-elle au New York Times. Cette astrologie des couleurs est rapidement devenue un business juteux où des «spécialistes» vantent leur expertise à des personnes en quête de connaissance de soi.
Cependant, cela ne fonctionne pas à tous les coups. «Chez le coiffeur en Corée du Sud, tu peux faire une analyse de couleur pour savoir ta couleur de cheveux idéale. Elle m’a par exemple expliqué d’éviter les tons rouges. J’étais trop déçue, donc dès que je suis rentrée en France, je suis partie chez le coiffeur me faire les cheveux rouges», raconte avec humour Nour Benh dans sa vidéo TikTok. Et parfois, il est aussi bon de se faire confiance.
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