Doigts d’honneur lors d’une visite de Macron en Alsace : une manifestante relaxée
Le président Emmanuel Macron fait face à des accusations de comportement antidémocratique après avoir fait adopter la réforme des retraites sans vote parlementaire. JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP
Une femme jugée pour avoir fait des doigts d’honneur lors de la visite d’Emmanuel Macron en Alsace en avril 2023 a été relaxée mardi par le tribunal correctionnel de Colmar, qui a jugé l’infraction « insuffisamment caractérisée ».
Le 19 avril 2023, le président de la République avait été abondamment hué lors d’une visite à Sélestat (Bas-Rhin), son premier bain de foule après la promulgation de la loi réformant les retraites.
Cinq mois plus tard, deux hommes qui avaient fait des doigts d’honneur et proféré des insultes avaient été condamnés à des amendes pour outrage à personne dépositaire de l’autorité publique.
Jugée à son tour pour outrage, une femme de 32 ans a expliqué lors d’une audience en avril qu’elle avait crié « Macron démission » et exprimé son mécontentement en pointant les majeurs en l’air, mais sans les diriger vers le président. Le parquet avait requis une amende de 300 euros avec sursis et un stage de citoyenneté.
La manifestante a finalement été relaxée ce mardi, le tribunal considérant que « l’infraction est insuffisamment caractérisée » et qu’ « il n’y a pas assez d’éléments au niveau de la constatation matérielle des faits ».
Seconde relaxe, celle de l’auteur d’une fresque anti-Macron
La cour d’appel de Nîmes a confirmé de son côté ce mardi la relaxe prononcée à Avignon d’un graffeur ayant représenté l’économiste Jacques Attali en marionnettiste manipulant un président Emmanuel Macron-Pinocchio, écartant le caractère antisémite dont l’œuvre était accusée.
La relaxe prononcée en novembre par le tribunal correctionnel et contre laquelle le parquet avait fait appel est « confirmée dans toutes ses dispositions », indique l’arrêt de la cour d’appel consulté par l’AFP.
Connu sous le nom de Lekto, ce graffeur âgé d’une trentaine d’années avait réalisé cette peinture murale en juin 2022 sur un transformateur électrique à l’entrée d’Avignon.
Représentant Jacques Attali, qui est juif, en un Geppetto au regard inquiétant manipulant telle une marionnette un Emmanuel Macron caricaturé en Pinocchio, la peinture reprenait l’iconographie antisémite de l’entre-deux-guerres, selon plusieurs associations antiracistes.
Elle avait été effacée 72 heures après, à l’initiative de la préfecture et de la communauté d’agglomération. Son auteur avait ensuite fait l’objet de poursuites à l’initiative du parquet et sur citation directe de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra).
Il devait répondre d’ « injure publique en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion » et de « provocation à la discrimination en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion ».
L’absence d’un antisémitisme avéré
En première instance, il avait expliqué aimer « tourner en dérision ceux qui ont du pouvoir » et nié toute intention antisémite, affirmant avoir ignoré que Jacques Attali était juif.
Le tribunal correctionnel l’avait relaxé sur toute la ligne, alors que le parquet avait requis contre lui 6.000 euros d’amende, dont 2.000 euros avec sursis.
Le tribunal avait estimé qu’« aucun élément (…) ne permet d’affirmer avec une absolue certitude que l’utilisation (par le prévenu) d’une image de marionnette à fil, dont l’usage dépasse largement la seule utilisation à des fins racistes, ait été conduite par un sentiment antisémite ».
Le juge avait également affirmé que la fresque « ne contenait aucun appel ou exhortation, même implicitement formulé, à la discrimination, à la haine ou à la violence ».
L’avocat de SOS-Racisme avait à l’époque regretté que le tribunal n’ait pas regardé « comme un ensemble » les éléments iconographiques, alors que le « débat portait précisément » sur « l’accumulation de symboles à caractère insidieusement antisémite ».