« Des femmes refusent d’avoir des promotions au travail » : pourquoi la ménopause est devenue un sujet politique
Emmanuel Macron souhaite qu’une mission parlementaire se saisisse de la ménopause. LP/Aurélie Ladet
«Ã‚ Quand on est dans une pièce et qu’on dit qu’on a tout d’un coup chaud, il faut voir les regards qu’on nous lance », raconte la députée Stéphanie Rist. Elle a été choisie par le gouvernement pour participer àune mission parlementaire sur la ménopause, que l’on définit comme l’arrêt des règles. D’après les données 2023 de l’Insee, plus de 14 millions de femmes sont concernées en France.
Dans une interview accordée au magazine Elle, Emmanuel Macron détaille : « On s’est aperçu que l’on connaissait très très mal ce sujet. C’est un vrai tabou de la société, avec tout ce qu’elle entraîne de conséquences, de déséquilibres hormonaux et de pathologies, déplore le président. J’ai tendance à penser que si les hommes y étaient confrontés, ce sujet aurait été traité bien plus rapidement ! », a-t-il ajouté.
Cette mission parlementaire devra dresser l’état des lieux de la prise en charge actuelle de la ménopause : traitements, accompagnement, ostéoporose, suivi cardio et psychologique. Un volet concernera également les difficultés que rencontrent les femmes sur le suivi et l’information. Elle devrait « servir à informer de ce qu’est la ménopause et à mettre en place des actions de prévention », avance Florence Trémollières, directrice du Centre de ménopause au CHU de Toulouse qui va également y participer.
Des conséquences au travail
Catherine Grangeard, psychanalyste, psychosociologue et autrice de « Il n’y a pas d’âge pour jouir » (Ed. Larousse), accueille positivement cette annonce. Mais « il ne faudrait pas considérer la ménopause seulement sous l’angle médical », assure-t-elle. « S’il n’y a que des personnes du corps médical dans la mission parlementaire, ça n’a pas de sens. Il faut dédramatiser la ménopause », précise la psychanalyste, qui espère qu’on pourra introduire la ménopause dans le champ social et dans l’espace politique.
Mais cela passe par la mise en place de mesures préventives. Sur le plan médical certes, mais il faut aussi informer le grand public car « c’est quelque chose de naturel. Il faut que les femmes puissent s’y préparer. L’impact de la ménopause sur la vie au travail est très important par exemple », illustre Micheline Misrahi-Abadou, professeure à Paris-Saclay, spécialiste des infertilités. « On a des femmes qui refusent d’avoir des promotions au travail car elles ont peur d’être confrontées à un phénomène lié à la ménopause pendant une réunion importante », signale la directrice du Centre de ménopause au CHU de Toulouse.
Dans une enquête menée fin 2023, SimplyHealth, prestataire britannique de soins de santé sur le lieu de travail, a interrogé plus de 2000 femmes actives âgées de 40 à 60 ans. Vingt-trois pour cent ont envisagé de démissionner en raison de l’impact de la ménopause.
Vers une libération de la parole
Aux États-Unis, des personnalités se sont emparées du sujet publiquement. L’actrice Halle Berry s’est mobilisée devant le Capitole à Washington, avec des sénatrices américaines pour soutenir une loi pour la recherche, la formation des médecins et la sensibilisation dans le domaine de la ménopause.
En Belgique et au Royaume-Uni, des femmes ont également pris la parole sur ce sujet pour sensibiliser davantage et briser le tabou. Début mars, le Sénat belge a demandé la mise en place d’une politique de santé sur la ménopause qui a été approuvée.
Avec cette mission parlementaire, « on va essayer de mobiliser en France des personnes de la santé, des personnalités publiques, des entreprises…, explique Florence Trémollières, pour permettre de faire bouger les lignes ».
De son côté, Stéphanie Rist espère une libération de la parole sur ce sujet et une levée du tabou dans la société. « On se sent seul, ce serait bien que des femmes puissent en parler plus librement », confie-t-elle.